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Les insurgés sont en passe de gagner la bataille du Net

A Tripoli, l’accès au web semble en voie de rétablissement, selon plusieurs sources contactées par France 24. Même si la situation du paysage numérique y est encore confuse, ce retour à la normale serait un coup dur pour le pouvoir.

Dans l'ombre de la bataille faisant rage dans les rues, une lutte pour l’accès à l’Internet semble également se dérouler à Tripoli. Le pouvoir est à deux doigts de la perdre.  "Nous avons accès à l’Internet, ce qui signifie que Mohammed Kadhafi n’a pas repris le contrôle de l’unique FAI [Fournisseur d’accès à Internet, NDLR] du pays", assure ce mardi Freedom Fighter, un habitant de Tripoli qui relate sur Twitter les derniers événements dans la capitale libyenne.

Un changement majeur. En effet, depuis le début de l’insurrection en février dernier, la plupart des internautes basés à Tripoli, comme dans le reste du pays, ne pouvaient pas se connecter. Dimanche soir, tout a commencé à basculer. Sur les réseaux sociaux, les internautes libyens ont commencé à saluer le retour de l’Internet dans leur vie.

Depuis lors, les connexions au Web font du yo-yo à Tripoli. "La situation change d’heure en heure", confirmait lundi Renesys, une société américaine de veille sur le trafic Internet, dans un rapport publié sur son blog. Sur Twitter, les messages contradictoires se sont également succédés. Certains se réjouissaient de revoir en ligne des contacts dont ils n’avaient plus de nouvelles depuis six mois, tandis que d’autres postaient des informations selon lesquelles l’Internet n’étaient accessible lundi que par intermittence, et avec une connexion très lente.

Reste qu’il y a bel et bien une tendance au redémarrage. "Aujourd’hui, le trafic est 7,8 fois plus élevé qu’hier, et même si on n'est pas encore à un retour aux niveaux du mois de mars, ça remonte", explique à FRANCE 24, Julien Coulon, co-fondateur de Cedexis, une société qui se qualifie "d’aiguilleur du Net" et observe, entre autres, l'état du trafic sur l’Internet.

Message étrange

Le retour de l’Internet, s’il se confirmait, serait une preuve de plus, selon Renesys, de la fragilité grandissante de l’emprise exercée par la famille Kadhafi sur le pays. Ainsi, un message étrange posté ce lundi sur le site officiel de la Libya Telecom and Technology (LTT) – contrôlé par Mohammed Kadhafi, l’un des fils du leader libyen - félicitait "la Libye [qui a su s'émanciper] de l’emprise du tyran". Le lendemain, ce soutien aux insurgés du seul FAI libyen avait disparu au profit d'un communiqué plus neutre : "La Libye est une tribu unie". Impossible de savoir, à l'heure qu'il est, si le premier message, célébrant la chute du colonel Kadhafi, était le fruit - ou non - d'un piratage du site.

Pour le régime libyen, perdre la bataille du Net serait un coup dur. Le clan Kadhafi avait dès le début de l’insurrection drastiquement réduit l’accès au web pour éviter tout scénario à l’égyptienne. Les opposants au dictateur déchu Hosni Moubarak avaient, en effet, massivement utilisé les réseaux sociaux pour s’organiser et informer le reste du monde du cours de leur révolution. Lorsque le régime égyptien, vacillant, s'était finalement décidé à couper l'accès au Net dans tout le pays, il était déjà trop tard.

Pour autant, Internet ne présente probablement pas une menace aussi importante pour le pouvoir libyen qu’en Egypte. En effet, moins de 10% de la population libyenne est connectée au web contrairement à l'Egypte, où ce chiffre est de plus de 20%, selon les statistiques 2010 du site internetworldstats.com.