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Alors que Mouammar Kadhafi s'accroche au pouvoir et que les combats se poursuivent, un haut militaire américain juge l'Otan "dans l'impasse" en Libye. Pour le chercheur Yves Boyer, l'issue du conflit ne dépend pas seulement du volet militaire.

Quatre mois après le début des opérations militaires étrangères en Libye, une issue au conflit est-elle en vue ? Michael Mullen, chef d'état-major interarmées et plus haut gradé américain, semble en douter. À la veille de son départ à la retraite, lundi, celui-ci a estimé que l'Otan était "dans l'impasse" en Libye. Même s'il a toutefois reconnu que les raids effectués par l'organisation "ont considérablement amoindri" les forces du colonel Kadhafi et précisé que, "à long terme", il s'agit d'une "stratégie qui permettra de [le] chasser du pouvoir".

Prendre en compte la réalité libyenne

Un point de vue que ne partage pas Yves Boyer, le directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique. Selon ce spécialiste des questions de défense, les actions de l'Alliance, combinées à celles des insurgés, portent leurs fruits. "La coalition fait son travail, explique-t-il. Les capacités des forces de Mouammar Kadhafi ont été complètement annihilées. L'aviation libyenne n'existe plus, il n'y a plus de marine... Mouammar Kadhafi a perdu l'initiative militaire et n'est plus capable de repousser les insurgés lorsqu'ils gagnent des positions, même si leur progression est très lente."

Si les analyses militaires divergent donc, tous les experts de la question s'accordent en revanche sur un point : selon eux, la fin du conflit ne se jouera pas seulement sur le terrain militaire. De nombreux éléments, propres à la réalité libyenne, seront également déterminants pour l'issue du conflit : l'opposition séculaire entre Cyrénaïque [la région de l'est, foyer de la contestation, NDLR] et Tripolitaine [au nord-ouest, NDLR], le risque réel d'une partition du pays, les alliances fluctuantes entre tribus, etc. "Il faut absolument prendre en compte la situation politique, géographique et tribale, qui est extrêmement complexe", poursuit ainsi Yves Boyer.

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Finir la guerre avant le ramadan...
Quatre mois après le début de son intervention, l'Otan est-elle "dans l'impasse" ?

Patrick Haimzadeh, ancien officier de l'armée de l'air et auteur de "Au cœur de la Libye de Kadhafi", estime lui aussi que la situation prévalant au niveau local est déterminante. "Mouammar Kadhafi résiste [...] parce qu'il dispose encore d'une base sociale non négligeable au sein de la population, en particulier celle originaire du Fezzan (Sud) qui ne s'est jamais soulevée, mais aussi de certaines populations de Tripolitaine, explique-t-il dans un entretien publié sur le blog "Secret défense". Depuis 42 ans, Kadhafi a en effet mis en place un système de compromission et de rétribution généralisées qui s'est révélé d'une grande efficacité."

"Il est illusoire de penser que les habitants de Cyrénaïque iront porter la guerre et "libérer" les populations de l'Ouest", poursuit-il.

Vers une révolution de palais ?

Si les chefs des diplomaties française et britannique ont réaffirmé, lundi à Londres, lors d'une réunion consacrée à la Libye, leur volonté de poursuivre l'intervention militaire engagée mi-mars, - la coalition multiplie les frappes sur Tripoli à quelques jours du ramadan -, ils n'excluent pas pour autant la possibilité d'une solution politique. Alain Juppé la semaine dernière, puis William Hague cette semaine, se sont tour à tour dit prêts à accepter un accord de sortie de crise qui permettrait à Mouammar Kadhafi de quitter le pouvoir.

Reste qu'en l'absence d'issue militaire ou politique décisive, le scénario d'une révolution de palais est privilégié par de nombreux interlocuteurs. En grignotant peu à peu du terrain, les insurgés pourraient se retrouver aux portes de Tripoli, ce qui rendrait la situation encore plus délicate pour Mouammar Kadhafi et son entourage, déjà très isolés. "Mouammar Kadhafi peut être évincé par un groupe de l'intérieur, explique Yves Boyer. Pour l'instant, nous n'avons pas d'informations en ce sens. Mais son entourage peut être soudoyé, corrompu... Demain, Mouammar Kadhafi peut être parti, tout comme le conflit peut encore durer des semaines."

Le chef du Conseil national de transition (CNT), Moustafa Abdeljalil, juge lui aussi crédible l'hypothèse d'une révolution de palais. "La guerre s'achèvera de l'une de ces trois façons : Kadhafi se rendra, il fuira la Libye ou il sera tué ou capturé par l'un de ses gardes du corps ou par les forces rebelles", a-t-il déclaré dimanche au "Wall Street Journal".