À deux jours de l’élection présidentielle de la Fifa, Joseph Blatter est désormais le seul candidat à sa propre succession. Mais en interne, des dissidents évincés dénoncent une direction corrompue, clanique et totalitaire.
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Alors que se profile le scrutin présidentiel de la Fifa, prévu pour ce mercredi, pas un jour ne passe sans que l’instance ne soit éclaboussée par de nouvelles déclarations fracassantes.
À deux jours de l’échéance, l’actuel président Joseph Blatter, désormais seul candidat à sa propre succession, ne peut plus laisser le trône lui échapper et devrait être reconduit à la tête du football mondial pour les quatre années à venir. Une conclusion inéluctable qui n’est pas du goût de tout le monde à la Fifa.
Dimanche, c’est Jack Warner, vice-président de la Fifa et patron de la Confédération de football d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et des Caraïbes (Concacaf), qui est monté au créneau après sa suspension prononcée par la commission d’éthique de la Fifa.
Jack Warner, impliqué dans l’affaire de corruption qui a également poussé le Qatari Mohammed Bin Hammam à jeter l’éponge dans la course à la présidentielle, ne décolère pas et s’estime victime d’un complot. "Un tribunal de république bananière, c'est le terme qui convient", a-t-il déclaré en conférence de presse, dimanche.
La thèse d’une guerre des clans est également défendue par Mohammed Bin Hammam depuis l’officialisation de sa suspension de toute activité liée au football, dimanche. Sur son blog, l’ex-candidat à la présidence de la Fifa a estimé que son éviction était "malheureuse", mais s’est fendu d’une déclaration équivoque : "C'est comme ça ici… c'est la Fifa."
Théorie du complot
Pour Mohammed Bin Hammam et Jack Warner, la décision de les exclure est d’autant plus suspecte qu’elle émane d’un comité mis sur pied par l’équipe dirigeante sortante. "Ces types ont été sélectionnés par Blatter", a continué Jack Warner, ancien allié de 30 ans aujourd’hui en disgrâce.
Chuck Blazer, membre du comité exécutif et secrétaire général de la Concacaf, est le premier visé par ces accusations. Ce proche de Joseph Blatter est celui qui a recueilli les preuves présentées devant le comité d’éthique.
Pour Mohammed Bin Hammam, la divulgation de ces ‘preuves’ a été savamment orchestrée. Selon lui, le secrétaire de la Fifa, Jérôme Valcke, qui a été alerté par Chuck Blazer de ces affaires de corruption dès le 24 mai, aurait notamment ajouté des éléments à charge au dossier après que les deux accusés ont été entendus par le comité. Un courrier électronique d'un dirigeant de Porto Rico dans lequel celui-ci admet avoir reçu 40 000 $, somme qu’il affirme par ailleurs avoir retourné depuis, aurait été présenté par Jérôme Valcke lors d'une conférence de presse tenue après le vote du comité.
"J'avais l'impression que le comité d'éthique de la Fifa était absolument indépendant, mais dans [cette] conférence de presse, nous avons vu que le secrétaire général [Jérôme Valcke] a clairement montré qu'il était celui qui avait de l'influence sur le comité d'éthique", accuse le Qatari sur son blog.
En dépit des déclarations de Mohammed Bin Hammam et Jack Warner, le comité d’éthique a estimé qu’il avait suffisamment de preuves pour justifier les allégations selon lesquelles le vice-président de la Fifa aurait procédé aux versements de pots-de-vin pour appuyer la campagne de Mohammed Bin Hammam.
La voie est libre
En revanche, le comité a décidé de blanchir Joseph Blatter des accusations de complicité de corruption portant sur des versements d’argent liquide à de hauts responsables de la Fédération internationale.
Cette série de décision ouvre un véritable boulevard à Joseph Blatter. Un scrutin qui, malgré les récents troubles, sera très vraisemblablement maintenu, a expliqué Jérôme Valcke en conférence de presse : "Pas de problème avec ça. Qu'est-ce qu'il y a de mal avec le fait de maintenir cette élection le 1er juin ? Ce qui est important, c'est l'engagement des membres du comité exécutif pour soutenir une politique de changement à l'intérieur de la Fifa."
Une politique déjà engagée dans le dernier mandat de Joseph Blatter, selon le secrétaire général, qui assure que "la Fifa est plus forte et plus transparente qu'elle n'était".
Du côté des bannis, le son de cloche est tout autre. Sur son blog, Mohammed Bin Hammam déplore la "dégradation de la réputation de la Fifa" et estime que "l’image" de l’institution "en a beaucoup souffert".
Un blason que l’actuel patron de la Fifa aura tout le temps de redorer puisque désormais, les obstacles à sa troisième reconduction à la tête du football mondial sont tous levés.