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Une fosse commune découverte à Deraa

Des habitants ont découvert, lundi, une fosse commune dans la ville de Deraa, dans le sud de la Syrie. Les autorités en ont immédiatement interdit l'accès. Depuis deux mois, Deraa est l'un des foyers de la contestation contre le régime.

Damas dément l'existence d'une fosse commune

Le ministère de l'Intérieur syrien a démenti mardi l'existence d'une fosse commune dans la ville de Deraa, foyer de la contestation lancée il y a deux mois, dénonçant "une campagne calomnieuse" des médias "pour déstabiliser la Syrie", a rapporté l'agence officielle Sana.

AFP - Une fosse commune a été découverte lundi à Deraa, une ville du sud de la Syrie foyer depuis deux mois de la contestation contre le régime du président Bachar al-Assad, tandis que les proches des opposants sont désormais traqués, selon des militants des droits de l'Homme.

"L'armée a autorisé aujourd'hui des habitants à sortir de leur maison pour deux heures par jour", a indiqué Ammar Qurabi, de l'Organisation nationale pour les droits de l'Homme en Syrie, joint par téléphone en Egypte.

"Ils ont découvert une fosse commune dans la Vieille ville mais les autorités ont aussitôt mis en place un périmètre autour de la zone pour empêcher les habitants de chercher les corps, promettant que certains seraient remis plus tard", a-t-il ajouté.

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Au moins 750 Syriens ont traversé la frontière avec le Liban samedi
Une fosse commune découverte à Deraa

Son affirmation ne pouvait être vérifiée lundi de manière indépendante, les autorités empêchant les journalistes de se déplacer librement à travers le pays.

M. Qurabi a ajouté qu'il ignorait le nombre de personnes enterrées dans la fosse commune.

L'armée avait investi Deraa, située à 100 km au sud de Damas, le 25 avril pour mater la contestation, avant d'entamer son retrait le 5 mai.

M. Qurabi a également affirmé que 34 personnes avaient été tuées ces cinq derniers jours à Jassem et Inkhil, près de Deraa.

"Je crains que des dizaines de morts supplémentaires ne se trouvent dans les champs de blé et les vergers alentours, leurs familles n'ayant pu accéder à la région qui est encerclée par les forces de sécurité et des tireurs embusqués", a-t-il dit.

La répression du mouvement de contestation, débuté le 15 mars, a fait, selon les ONG, au moins 700 morts, dont plusieurs centaines à Deraa, et entraîné des milliers d'arrestations à travers la Syrie.

Dans la ville de Tall Kalakh (150 km au nord-ouest de Damas), la dernière assiégée par l'armée, un témoin a indiqué à l'AFP que des cadavres et des blessés étaient allongés dans les rues, les habitants étant incapables d'aller les chercher en raison des bombardements et des tirs.

Selon lui, de nombreux corps étaient également maintenus dans des camions réfrigérés à l'hôpital, en attendant qu'ils soient enterrés.

"Je peux voir six chars d'où je suis. Il y en a beaucoup plus devant la boulangerie centrale

et la mosquée Othman ibn Affan dans le centre de la ville", a raconté ce témoin, joint par téléphone, alors qu'on entendait derrière le bruit des tirs.

Des bombardements et des tirs ont eu lieu aussi lundi dans la ville voisine d'Arida, d'après un militant.

Dimanche, au moins dix personnes avaient été tuées par les forces de sécurité à Tall Kalakh, selon un militant des droits de l'Homme.

Au Liban tout proche, où des dizaines d'habitants ont fui à pied Tall Kalakh, une Syrienne avait également été tuée dimanche par des tirs syriens, et plusieurs autres personnes blessées.

De son côté, la télévision d'Etat syrienne a rapporté que deux soldats avaient été tués et 11 blessés par des "gangsters" à Tall Kalakh ce week-end. Depuis le début de la révolte, Damas accuse des "bandes armées" d'être à l'origine des troubles.

Des centaines de personnes arrêtées ont été libérées dimanche, après avoir signé une déclaration selon laquelle elles s'engagent à ne plus participer à de nouvelles manifestations, a affirmé lundi le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, Rami Abdel Rahmane, installé à Londres.

"Plusieurs ont dit avoir été torturées", a-t-il ajouté, précisant que des centaines étaient encore emprisonnées et que les interpellations se poursuivaient.

"Les dirigeants de la Syrie parlent d'une guerre contre des terroristes, mais ce que nous voyons sur le terrain, c'est une guerre contre des Syriens ordinaires", a déclaré dans un communiqué Sarah Leah Whitson, directrice pour le Proche-Orient de l'organisation américaine Human Rights Watch (HRW).

Selon l'ONG, les forces de sécurité ont, dans certains cas, détenu des proches et des voisins d'opposants au régime afin de savoir où ces derniers se trouvent.

"Le gouvernement syrien exploite toutes les solutions possibles pour détenir et punir ceux qui appellent à des réformes civiques", a estimé Mme Whitson.

La Maison Blanche a accusé lundi la Syrie d'avoir encouragé les manifestations dimanche sur le plateau du Golan, pour la commémoration de la "Nakba" (catastrophe), comme les Palestiniens appellent la création de l'Etat d'Israël en mai 1948 et l'exode qui en a suivi.

Quatorze réfugiés palestiniens du Liban et de la Syrie ont été tués, par des tirs israéliens selon ces deux deux pays, lors de ces manifestations.

Jugeant "inacceptable" l'attitude syrienne, les Etats-Unis ont affirmé qu'il leur semblait "évident" qu'il s'agissait "d'une tentative de détourner l'attention (...) de la répression violente exercée par le gouvernement syrien contre son propre peuple".