Le journaliste algérien Khaled Sid Mohand, collaborateur de Radio France et du journal "Le Monde", a été arrêté à Damas le 9 avril. Entretien avec Fatima Sissani, co-coordinatrice du comité de soutien réclamant sa libération.
FRANCE 24 : Dans un article daté du 27 avril, le quotidien "El-Watan" évoque la "libération imminente" du journaliste Khaled Sid Mohand. Pensez-vous que les conditions sont réunies pour que celui-ci sorte de prison ?
Fatima Sissani : Je trouve ce genre d’article indécent, d’autant plus que l’on sait que, dans ce genre de situation, les retournements sont toujours possibles. Ces déclarations ne reposent sur rien. Il n’y a aucun argument nouveau qui vienne étayer ce propos. À la limite, cet article risque même de provoquer une démobilisation de ceux qui demandent sa libération, laissant croire que les choses sont réglées.
Il ne faut rien céder tant que Khaled Sid Mohand n’est pas sorti de prison, et tant qu’il n’a pas pu quitter le territoire syrien. Or, avec la dégradation de la situation politique intérieure en Syrie, rien ne permet de dire que cette libération est "imminente".
FRANCE 24 : Khaled Sid Mohand est retenu en Syrie depuis le 9 avril 2011. En sait-on plus sur ce qu’on lui reproche et sur ses conditions de détention ?
F. S. : On ne sait toujours pas ce qu’on lui reproche. L’ambassadeur d’Algérie en Syrie a bien demandé des précisions aux autorités syriennes, mais nous n’avons aucun retour concret. Nous sommes dans l’opacité. Le ministère syrien des Affaires étrangères reconnaît à mots couverts cette arrestation, sans pour autant donner la moindre information sur le sort de Khaled Sid Mohand.
Celui-ci est donc emprisonné sans raison valable, sans qu’on sache où il est détenu, ni dans quelles conditions. Mais nous avons de bonnes raisons de croire que c’est parce qu’il est journaliste qu’il a été arrêté. C’est tout ce qu’on peut dire.
FRANCE 24 : Khaled Sid Mohand était installé en Syrie depuis près de deux ans. Pourquoi était-il attiré par ce pays ?
F. S. : La Syrie est le seul pays au monde qui n’exige aucun visa pour les ressortissants arabes : cette première caractéristique avait piqué la curiosité de Khaled Sid Mohand, un grand voyageur. Avec son passeport algérien, c’était la première fois qu’il pouvait circuler sans être obligé de justifier sa situation avec de la paperasse.
Ensuite, il s’est rendu compte que la Syrie avait toujours été une terre d’accueil pour les minorités comme les Palestiniens, les chrétiens d’Irak, ou même les Algériens. Qu’on pense à l’exemple d’Abd el-Kader, qui a vécu à Damas pendant la colonisation française en Algérie. Il y a une histoire forte entre l’Algérie et la Syrie. Quand on est algérien, on est accueilli par les Syriens à bras ouverts.
Au fil des années, après quelques voyages, Khaled Sid Mohand s’était attaché à ce pays plein de paradoxes. Quand il a décidé de s’installer à Damas il y a deux ans, il avait envie de parfaire son arabe tout en racontant la Syrie avec de nouvelles approches.
Pour en savoir plus sur le Comité de soutien à Khaled Sid Mohand : www.liberezkhaledsidmohand.org/