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Espions russes présumés : de la rousse sulfureuse aux banlieusards sans histoires

Les personnes arrêtées par le FBI pour espionnage présumé au profit de Moscou ont des profils très différents : une jeune séductrice de 28 ans (photo), un couple sans vague vivant dans le New Jersey, ou encore une journaliste pro-Chavez...

Une jeune rousse qui enflamme le Web, des Péruviens pro-Chavez, un couple menant une vie sans histoire dans la banlieue du New Jersey. Les profils - atypiques ou très convenus - des onze personnes accusées d’être des "illégaux" travaillant pour le compte de la Russie et arrêtées après 10 ans d’enquête menée par le FBI, commencent à filtrer dans la presse. Pour la première fois dans ce genre d'affaire, les informations personnelles postées sur le Web et les réseaux sociaux ont laissé des traces.

Anna Chapman, la rousse séductrice

La plus jeune des personnes qui se sont présentées au parquet à New York lundi est une citoyenne russe de 28 ans, Anna Chapman. N’hésitant pas à se dévoiler en lolita sur Facebook, la jeune femme aux cheveux roux fait les choux gras de la presse.

Lundi, la justice fédérale à New York a refusé de remettre en liberté sous caution cinq des personnes concernées, arguant du "risque de fuite", mais ne les a pas formellement inculpées pour espionnage. Les autres prévenus sont convoqués jeudi. Une audience préliminaire est prévue le 27 juillet.

Le document de 55 pages rédigé par le FBI donne très peu d’informations sur ce que ces personnes, formées par le service de renseignement extérieur de la Russie (SVR), ont réellement fourni comme données concernant les Etats-Unis. Ces personnes étaient missionnées pour "infiltrer les cercles politiques américains" et "obtenir des informations".

D’après un profil sur LinkedIn à son nom, Anna Chapman préside une entreprise immobilière sur le Web (www.domdot.ru) qui s’adresse aux investisseurs russes. Elle a travaillé auparavant dans la finance à Londres. D’après son avocat, Robert Baum, elle s’est installée aux États-Unis depuis peu, avait monté une affaire et détenait un visa de travail qui lui a été retiré samedi dernier. Des informations plus personnelles figurent sur son profil Facebook, notamment des photos glamour qui font le tour du Web…

Dans une banlieue tranquille

Le couple Murphy - un pseudonyme - se présente sous un profil beaucoup plus passe-partout. Ils habitent dans un quartier pavillonnaire de la ville Montclair, dans le New Jersey, non loin de New York. Le voisinage des Murphy est surpris par la nouvelle de leur arrestation par le FBI. Ensemble, ils parlaient barbecue, jardinage, école des enfants et Superbowl. "Je ne savais pas qu’ils travaillaient comme espions", déclare Stanley Skolnik, un habitant du quartier interrogé par le "New York Times". "Mais je sais ce qu’ils n’étaient pas : hors du commun."

Cynthia Murphy est décrite comme une jeune femme d’une trentaine d’années s’habillant avec élégance et parlant avec un accent scandinave. Elle travaille dans une banque à New York, d’après son profil LinkedIn. Richard Murphy est père au foyer.

Juan Lazaro et Vicky Pelaez, Péruviens pro-cubains

En comparaison, Juan Lazaro et son épouse Vicky Pelaez sont très atypiques. Ces Péruviens sont installés depuis plus de 20 ans à Yonkers, une ville non loin des rives de l'Hudson. Dans leur maison, le FBI a intercepté le bruit de cliquetis suspects, supposés être des messages envoyés en code morse. Le rapport explique comment le couple aurait récolté de l'argent dans un pays sud-américain auprès d’agents du gouvernement russe.

Vicky Pelaez est journaliste au quotidien new-yorkais en langue espagnole "Diario de la Prensa", où elle signe des éditoriaux très critiques à l’égard de l’administration américaine et sympathisants avec Cuba et le Venezuela.

Auparavant, elle s’était fait connaître à la télévision péruvienne, sur la chaîne Frecuencia Latina, où elle menait des interviews-chocs. Elle a défrayé la chronique en 1985, quand les journaux ont annoncé qu’elle avait été prise en otage par un mouvement communiste, le Tupac Amaru Revolutionary Movement (MRTA), dont elle avait interviewé les chefs peu de temps avant. Mais la chaîne de télévision Frecuencia Latina l’a ensuite accusée d’avoir inventé l’affaire du kidnapping et l’a limogée. La journaliste a émigré aux États-Unis quelques temps après.

Son compagnon, Juan Lazaro, a enseigné l’histoire politique sud-américaine au Baruch College, une université de New York. Il était connu par ses élèves pour ses positions pro-cubaines. Le "New York Times" évoque l’hypothèse que l’enquête du FBI au sujet de ces deux personnes aient été essentiellement motivées par leurs positions pro-communistes.

Un couple francophile

Dernier couple sous les feux de la curiosité médiatique : Donald Heathfield et Tracey Foley. Agés d’une quarantaine d’années, ils vivent à Cambridge, près de Boston, et travaillent tous deux dans l’immobilier. Le journal "Wicked Local" livre tous les détails de leur CV. Notamment comment Tracey Foley, qui se présente également sous le prénom Ann, a vécu à Montréal, étudié à l’Université McGill, et séjourne très régulièrement à Paris. Avant de se lancer dans l’immobilier, elle a longtemps géré une agence de voyages et organisé des séjours touristiques en France.

Lui prétend être diplômé de l'École des Ponts et Chaussées à Paris et de la London School of Economics. D'après le FBI, il a usurpé l'identité d'un bébé, mort à l'âge de six semaines à Montréal en 1963. Le frère du vrai Donald Heathfield, David Heathfield, redoute les conséquences pour sa famille : pourra-t-il voyager à l'étranger sans être inquiété et ne risque-t-il pas de recevoir la visite des services secrets russes ? Le gouvernement canadien se refuse à tout commentaire pour le moment.