Critiqué pour son obsession élyséenne, le troisième homme de la dernière présidentielle perd de ses soutiens, dont celui de l’emblématique co-fondatrice du mouvement centriste en 2007, Corinne Lepage.
Rien ne va plus au MoDem. Depuis le résultat du premier tour des élections régionales, où le parti de François Bayrou n'a recueilli que 4 % des voix au niveau national, le vide se fait autour du troisième homme de 2007.
Ce mercredi, la vice-présidente du parti, Corinne Lepage, a démissionné. L’avocate, élue au Parlement européen en 2009, avait co-fondé le MoDem avec François Bayrou il y a bientôt trois ans, au lendemain de la présidentielle où il avait recueilli plus de 18 % des voix au premier tour. Depuis, l’euphorie orange est retombée. Lors des élections suivantes, le MoDem n’a jamais dépassé les 10 % au niveau national.
Dans ses vœux à la presse, en janvier, François Bayrou avait reconnu que les régionales, comme toutes les élections à la proportionnelle, étaient des échéances qui n'étaient pas faciles pour des partis non installés. Le Béarnais est bien plus à l’aise avec le mode de scrutin présidentiel, uninominal, qui lui a permis de se placer en arbitre du deuxième tour de la présidentielle en 2007.
Dès lors, comment le MoDem pourrait-il apparaître comme autre chose qu’une écurie présidentielle ? C’est justement sur ce point que les frondeurs attaquent François Bayrou...
Le président du MoDem 76 appelle à voter UMP
Dans un entretien au "Monde" daté de jeudi, Corinne Lepage s’en prend à la stratégie du président du Mouvement démocrate. Elle juge que "la direction du MoDem est aujourd'hui incapable de changer de mode de fonctionnement, d'entendre les militants comme les électeurs, et, surtout, elle ne parvient pas à construire une stratégie qui n'ait pas pour seul objectif l'élection présidentielle".
Mercredi, Corinne Lepage, qui s’était par ailleurs présenté à la présidentielle de 2002 avec son propre mouvement Cap 21 (1,88 % voix), a claqué la porte pour travailler avec Europe Écologie. Ce qu’on pouvait présager du fait de sa présence avant le premier tour à un meeting de Jacques Fernique, tête de liste des Verts en Alsace, une dizaine de jours avant le premier tour.
Reste que ce départ s’inscrit dans une lignée de revers subit par François Bayrou depuis les dernières élections européennes. Dans la foulée du scrutin, le MoDem Michel Mercier devient une "prise" de "l’ouverture" voulue par Nicolas Sarkozy, qui le fait entrer gouvernement. A une plus petite échelle, pendant la campagne des régionales, des militants se sont ralliés à la liste de Ségolène Royal en Poitou-Charentes.
Aujourd’hui, Corinne Lepage quitte le navire. Tout comme le président du MoDem de Seine-Maritime, Florent Saint-Martin, qui, comble de la provocation, a appelé à voter pour l’UMP au deuxième tour en démissionnant.
Ce dernier fustige, lui aussi, la stratégie de François Bayrou, plus que l’homme : "[C’est] quelqu'un de grande valeur, qui a beaucoup de qualités, mais il nous a envoyés dans le mur. […] Je regrette la stratégie d'opposition systématique, je n'arrive plus à lire le message et je ne sais plus quoi dire aux militants."
Un "chevalier orange" en croisade contre le MoDem
Cette fronde est également entretenue sur Internet par le blogueur bien renseigné "Chevalier orange", un anonyme parti en croisade "parce que le MoDem est une secte".
Ça commence à faire beaucoup pour François Bayrou, même s’il peut encore compter sur les sénateurs Jean-Marie Vanlerenberghe et Jacqueline Gourault, qui sont montés au créneau ce mercredi pour demander à Corinne Lepage de quitter son siège de députée européen qu’elle a obtenu grâce aux voix du mouvement centriste.
A quatre jours du second tour, tous les espoirs du MoDem pour ces régionales ne reposent plus que sur Jean Lassale, seul tête de liste encore en lice dans une triangulaire en Aquitaine. Mais le fidèle d’entre les fidèles béarnais n’a recueilli que 10 % au premier tour...Autrement dit, le second tour s’annonce comme un nouveau moment délicat à passer pour François Bayrou. Celui-ci pourra toujours se consoler en regardant le calendrier électoral : le prochain scrutin, c’est 2012.