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La BNF acquiert de précieux manuscrits de Casanova

Des manuscrits exceptionnels de Casanova, dont l'unique exemplaire d'"Histoire de ma vie", ont été acquis par la Bibliothèque nationale de France après des années de recherche. Cette œuvre représente la plus importante acquisition de la BNF.

AFP - Emouvants, foisonnants, plein de vie et écrits en français d'une écriture serrée: des manuscrits exceptionnels de Casanova, dont la légendaire "Histoire de ma vie" du célèbre Vénitien, ont été acquis par la Bibliothèque nationale de France après des années de chasse au trésor.

Le manuscrit des Mémoires de Giacomo Girolamo Casanova (1725-1798), "Histoire de ma vie", constitue le coeur de ces 3.700 pages non reliées qui représentent "la plus importante acquisition patrimoniale de l'établissement", a expliqué jeudi à l'AFP Bruno Racine, président de la BNF.

Après des rebondissements rocambolesques, les précieux manuscrits ont pu être acquis par la BNF grâce à un généreux mécène anonyme qui a déboursé plus de 7 millions d'euros.

Selon les experts, il n'existe qu'un seul exemplaire d'"Histoire de ma vie".

"C'est le paradoxe d'un texte universellement célèbre et dont l'original restait méconnu", a poursuivi M. Racine. Beaucoup de versions, plus ou moins expurgées des passages érotiques, ont en effet circulé, alimentant la légende du libertin diplomate illustrée par le Casanova de Fellini en 1976.

"Cinq cents avatars éditoriaux ont été publiés avant la première édition fiable de l'oeuvre en 1960" par les éditeurs Plon et Brockhaus, a rappelé jeudi le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand avant de signer l'acte de vente.

Depuis, grandes bibliothèques et collectionneurs du monde entier ont espéré mettre la main sur l'oeuvre.

"L'histoire de ce manuscrit est aussi romanesque que la vie de Casanova", a souligné le ministre.

"Il a été acquis en 1821 par l'arrière, arrière grand-père de mon arrière, arrière grand-père. En 1823, les feuillets ont été enfermés et l'original n'a plus été montré", a expliqué Hubertus Brockhaus, descendant de la dynastie d'éditeurs allemands qui l'a conservé depuis cette date, et a cosigné l'acte de vente.

"Notre maison d'édition à Leipzig a été fermée en 1943 par les Nazis. Mon grand-père a alors pris les manuscrits et les a emportés à vélo pour les déposer dans le coffre de sa banque", a raconté M. Brockhaus. "C'est ainsi qu'ils ont pu être sauvés" du bombardement de la ville. Ils ont été acheminés en 1945 par les Américains à Wiesbaden.

Classé par la France "bien d'intérêt patrimonial majeur", ce chef-d'oeuvre de la littérature mondiale et française --toute l'oeuvre est en français-- est un "témoignage émouvant sur le Siècle des Lumières et une fresque vivante et haute en couleur" des aventures du génial mémorialiste, a confié Bruno Racine.

"C'est l'ambassadeur de France à Berlin qui m'a contacté en 2007. Il avait été approché par M. Brockhaus qui estimait que la BNF était la meilleure destination pour ce chef-d'oeuvre. Un choix qui nous va droit au coeur", a-t-il  insisté, précisant que l'oeuvre allait être numérisée.

L'éditeur "a eu l'élégance et la patience d'attendre près de trois ans. Le prix a été négocié. Les manuscrits auraient pu être vendus 20 millions d'euros aux enchères!", a-t-il relevé.

Au fil des Mémoires, on découvre un Casanova libertin, financier, diplomate, joueur, escroc, s'évadant des Plombs, la lugubre prison de Venise, fréquentant les cours européennes et les plus grands intellectuels.

Si l'auteur a publié dès 1780 des récits autobiographiques, il commence "Histoire de ma vie" vers 1789, remaniant ensuite inlassablement son oeuvre.

En 1798, mourant, il la lègue à son neveu Carlo Angiolini. C'est par les enfants de ce dernier que le manuscrit a été cédé au 19e siècle à Brockhaus.

Une exposition, à l'automne 2011 à la BNF, fera découvrir au public ces manuscrits mythiques.