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L'armée américaine va réduire la voilure sur le front oriental de l'Otan
En plein conflit russo-ukrainien, les États-Unis vont réduire leur présence militaire sur le front oriental de l'Europe, a annoncé mercredi Budapest. Un responsable de l'Otan évoque un simple "ajustement" du dispositif américain qui n'empêchera pas les forces américaines de rester "plus importantes" qu'avant 2022.
Environ 130 soldats du bataillon de soutien logistique de la 87e division de l'armée américaine attendent d'embarquer dans un avion affrété pour leur déploiement en Europe, le 11 mars 2022, à l'aérodrome militaire Hunter de Savannah, en Géorgie. © Stephen B. Morton, AP

Alors que le conflit russo-ukrainien continue de faire rage, le flanc est de l'Otan se dégarnit. Les États-Unis vont réduire leur présence militaire sur le front oriental de l'Europe, a annoncé mercredi 29 octobre la Roumanie, concernée en premier lieu par cette décision.

Quelque 85 000 troupes américaines sont stationnées en Europe, dont 20 000 venues en renfort après l'invasion russe à grande échelle de l'Ukraine le 24 février 2022, selon le ministère américain de la Défense.

"Le redimensionnement des forces américaines est le résultat des nouvelles priorités de l'administration présidentielle, annoncées en février", a souligné le ministère roumain de la Défense dans un communiqué. Cette décision "a également pris en compte le fait que l'Otan a renforcé sa présence et son activité sur le flanc oriental", a-t-il ajouté.

Un "mauvais signal" envoyé à Moscou

Il s'agit d'un "ajustement" qui n'empêchera pas les forces américaines de rester "plus importantes" qu'avant 2022, a réagi de son côté un responsable de l'Otan interrogé par l'AFP, soulignant que l'organisation avait été informée au préalable et que les "ajustements" à la présence américaine en Europe "ne sont pas inhabituels".

Toutefois, pour l'ancien conseiller à la sécurité nationale du président roumain George Scutaru, il s'agit d'"un mauvais signal envoyé à la Russie" concernant la région de la mer Noire.

"La Russie pourrait considérer que la mer Noire n'est pas si importante pour les intérêts américains en Europe", a-t-il déclaré à l'AFP, estimant qu'elle serait dès lors "encouragée à essayer de faire pression davantage, en particulier sur la Roumanie, en utilisant des drones, des incursions dans l'espace aérien".

George Scutaru, qui dirige le centre de réflexion New Strategy Center, a demandé aux alliés européens d'envoyer un "signal de solidarité", et "peut-être de réfléchir à renforcer la présence militaire pour compenser", citant notamment la France, à la veille d'une visite de la ministre française de la Défense, Catherine Vautrin, en Roumanie.

Le ministre polonais de la Défense, Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, a assuré pour sa part mercredi que Varsovie n'avait "reçu aucune information (...) sur une réduction du contingent en Pologne", devant les médias.

Concrètement, en Roumanie, les États-Unis vont suspendre la rotation d'une brigade, a précisé le ministère roumain de la Défense.

"Nous ne parlons pas d'un retrait des forces américaines, mais de la cessation de la rotation d'une brigade qui avait des éléments dans plusieurs pays de l'Otan, y compris la Bulgarie, la Roumanie, la Slovaquie et la Hongrie", a déclaré également le ministre de la Défense, Ionut Mosteanu, lors d'une conférence de presse.

Relève européenne

"Environ 900 à 1 000 soldats américains resteront en Roumanie, contribuant à dissuader toute menace et représentant une garantie de l'engagement des États-Unis envers la sécurité régionale", a-t-il insisté.

Selon les dernières statistiques disponibles, 1 700 soldats américains sont actuellement déployés en Roumanie.

"Les capacités stratégiques restent inchangées", a encore affirmé Ionut Mosteanu, précisant que "le système de défense antimissile à Deveselu restait pleinement opérationnel. La base aérienne de Campia Turzii continue d'être un point essentiel pour les opérations aériennes et la coopération alliée, la base de Mihail Kogalniceanu continue d'être développée, et le drapeau américain restera présent sur ces trois sites".

"Un groupe de combat aérien restera sur la base de Kogalniceanu, comme c'était le cas avant le déclenchement du conflit en Ukraine", a-t-il encore dit.

Soulignant que la décision américaine était "un développement prévisible que nous avons tous anticipé", il a rappelé que l'Europe avait commencé à investir davantage dans ses propres armées et qu'elle avait "décidé de prendre sa défense en main".

La décision américaine va cependant "affaiblir la sécurité" de la Roumanie, un "État en première ligne", a estimé Phillips Payson O'Brien, un historien américain et professeur d'études stratégiques à l'Université de St Andrews, en Écosse, sur X.

"Réveillez-vous, Europe – les États-Unis ne vous défendront pas contre la Russie", a-t-il ajouté.

Avec AFP