logo

Quand la réalité virtuelle active le système immunitaire : coulisses d'une expérience scientifique
Démontrer que notre cerveau, stimulé par la réalité virtuelle, déclenche une réaction immunitaire dans notre corps, dans l'espoir – notamment – d'améliorer un jour la vaccination : c'est le pari d'un scientifique suisse, Andrea Serino. Il emmène France 24 dans les coulisses de son expérience.

Pour afficher ce contenu YouTube, il est nécessaire d'autoriser les cookies de mesure d'audience et de publicité.

Accepter Gérer mes choix

Une extension de votre navigateur semble bloquer le chargement du lecteur vidéo. Pour pouvoir regarder ce contenu, vous devez la désactiver ou la désinstaller.

Réessayer
Une personne portant un casque de réalité virtuelle. © Getty Images - humonia
04:53

Mettre un casque de réalité virtuelle, observer des avatars malades s'approcher... et obtenir le déclenchement d'une réponse immunitaire, s'apparentant à celle après l'administration d'un vaccin contre la grippe.

Précédemment décryptée par France 24, cette expérience a démontré que notre cerveau active nos défenses immunitaires à la simple vue de symptômes virtuels.

Parmi les auteurs de cette découverte, Andrea Serino, professeur à l'Université de Lausanne (Unil), spécialiste de la cognition spatiale et de la réalité virtuelle. Il raconte la genèse de cette expérience et en révèle des résultats encore inédits.

À (re)lire Pourquoi la vue d'avatars "malades" suffit à activer notre système immunitaire

France 24 : Démontrer le lien entre cerveau et immunité... Comment vous est venue cette idée ?

Andrea Serino : C'était lors d'un atelier sur la diversité organisé par une grande entreprise. Je travaillais sur la façon dont nous percevons les autres : comment nous détectons si quelqu'un nous ressemble ou nous est étranger, notamment par le toucher et la vision.

En creusant ce sujet, j'ai découvert le "système immunitaire comportemental" – tous ces réflexes que nous avons développés pour éviter la contamination. Avec le Covid-19, chacun a expérimenté cela : on se protège instinctivement des personnes qui semblent malades.

Et je me suis posé cette question : ce système comportemental peut-il collaborer avec, "aider" notre immunité biologique ? Beaucoup de collègues ont trouvé mon idée folle... et il a fallu beaucoup de persévérance pour obtenir un financement.

Comment la réalité virtuelle pourrait-elle améliorer la vaccination ?

La vaccination reste le moyen le plus efficace de se protéger contre les maladies. Mais la réalité virtuelle pourrait préparer ou moduler le système immunitaire pour mieux répondre à une stimulation comme la vaccination.

Exposer une personne à des "infections" virtuelles juste avant la vraie vaccination pourrait améliorer sa réponse immunitaire, et donc l'efficacité du vaccin.

Si vous êtes exposé à la réalité virtuelle puis recevez le vaccin, vous avez déjà développé une réponse immunitaire. Il est donc possible d'augmenter l'efficacité du vaccin.

Une autre possibilité améliorerait une situation que nous connaissons tous : lors d'une grippe, on pourrait amplifier l'effet du paracétamol une fois de plus en s'exposant à des avatars "malades" en réalité virtuelle. Cela devra être testé avec des expériences ultérieures.

Les espoirs concernant la vaccination ont-ils suscité l’intérêt du grand public ?

Savoir si la réalité virtuelle peut accroître notre immunité est en effet la question fondamentale pour le grand public. Et nous avons joui d’une très bonne couverture médiatique internationale : outre France 24, The Economist, The Guardian, Le Figaro, Der Spiegel.

Mais l'intérêt est aussi lié aux jeux vidéo, à la réalité virtuelle – des sujets accessibles, qui suscitent la curiosité.

Je pense enfin qu'il y a également une explication sociétale : les gens s'intéressent de plus en plus à l'influence de notre cerveau sur le corps.

Avez-vous fait des découvertes qui ne sont pas encore publiques ?

Nous avons mesuré la sensibilité des témoins en leur faisant répondre à des questionnaires. Plus une personne est facilement "écœurée", plus sa réaction immunitaire est faible.

L'hypothèse est que les personnes les moins sensibles au dégoût ont été potentiellement en contact avec des éléments pathogènes au cours de leur vie : leur système est aujourd'hui mieux entraîné. Nous avons aussi exposé des personnes allergiques aux piqûres de guêpes à de faux insectes dans un pique-nique virtuel. La méthode reste la même.

Notre organisme est composé de systèmes – digestif, cardiaque, immunitaire – qui ne sont pas indépendants. Au contraire, il y a beaucoup de communication entre ces systèmes. Le système immunitaire utilise la capacité du cerveau pour savoir ce qui va se passer, et ainsi se préparer.