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Moins de fonctionnaires et plus d'impôts : tout savoir sur le projet du budget 2025 de la France
Sous forte pression pour trouver "60 milliards d'euros", le gouvernement de Michel Barnier a dévoilé, jeudi, un projet de loi de finances 2025, comprenant la suppression de postes dans la fonction publique, la taxation des très hauts revenus, ainsi que des contributions "exceptionnelles" demandées aux grandes entreprises.

Moins de fonctionnaires, contribution des grandes entreprises et imposition des plus riches : le gouvernement français a drastiquement freiné les dépenses tout en renouant avec les hausses d'impôts dans son projet de budget pour 2025.

L'exécutif a détaillé, jeudi 10 octobre, comment il comptait trouver "60 milliards d'euros", un montant inédit sous la Ve République, dans les projets de loi de finances (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PLFSS) qui seront âprement débattus à l'Assemblée nationale où il est minoritaire.

Après un dérapage attendu à 6,1 % du PIB cette année, l'objectif est de ramener le déficit public à 5 % dès 2025 puis sous la limite de 3 % tolérée par Bruxelles en 2029. Si rien n'était fait, ce déficit dériverait à presque 7 % l'an prochain, selon Laurent Saint-Martin.

Moins de fonctionnaires et plus d'impôts : tout savoir sur le projet du budget 2025 de la France

La dette, de près de 3 230 milliards d'euros fin juin (112 % du PIB), frôlera les 115 % en 2025, alors que la croissance atteindrait 1,1 % comme en 2024.

Le Haut Conseil des finances publiques a jugé "fragiles" les attentes budgétaires du gouvernement, après un "dérapage" du déficit en 2024 jugé "absolument considérable et inédit" par son président Pierre Moscovici.

La position de l'exécutif est délicate avant le verdict de l'agence de notation Fitch vendredi sur la solidité financière de la France. Quoique sa dette reste prisée des investisseurs, le pays inspire déjà moins confiance et emprunte à des taux d'intérêt plus élevés. Cela alourdit la charge de la dette qui atteindrait 54,9 milliards en 2025, presque autant que le budget de l'éducation.

Le projet de budget prévoit de freiner les dépenses à hauteur de 40 milliards d'euros, selon le gouvernement. Dans un pays qui en est le champion européen, la dépense publique continuera à augmenter, mais moins fortement.

Une contribution "exceptionnelle" pour les ménages les plus aisés

L'État sera le plus gros contributeur, à hauteur de 20 milliards d'euros. Le budget prévoir la suppression de 4 000 postes d'enseignants principalement en maternelle et en élémentaire. La rue de Grenelle justifie cette baisse des postes enseignants par "la baisse du nombre d'élèves qui devrait s'accélérer avec 97 000 élèves en moins à la rentrée 2025".

Le budget prévoit, en revanche, le financement de 2 000 AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap) supplémentaires. Avec une baisse globale de quelque 2 000 postes, l'Éducation nationale fournit l'essentiel des suppressions d'emplois de fonctionnaires pour l'État et ses opérateurs (2 201 au total).

Les ministères seront, eux, mis à la diète : il leur sera demandé 5 milliards d'économies par amendement, outre un gel des crédits.

La Sécurité sociale doit dégager 15 milliards d'euros, notamment via le report décrié de six mois, au 1er juillet, de l'indexation des pensions (environ 4 milliards). Il est également prévu de transférer vers les complémentaires santé une partie des remboursements de consultations médicales.

Les aides à l'apprentissage subiront un coup de rabot, comme les allègements de cotisations sociales des entreprises (4 milliards). Cette "hausse du coût du travail" est décriée par le Medef, première organisation patronale, qui y voit une menace pour la compétitivité et l'emploi.

Les collectivités locales sont priées de fournir 5 milliards d'euros. "Indigné", le maire de Verdun (Meuse) Samuel Hazard a proposé "une démission généralisée des assemblées locales".

Par ailleurs, les hausses d'impôts atteindront 19,3 milliards d'euros selon Bercy, un revirement après sept ans de baisse de la fiscalité.

Quelque 65 000 foyers fiscaux les plus fortunés (soit 0,3 % du total), gagnant plus de 250 000 euros annuels pour un célibataire, s'acquitteront pendant trois ans d'une surtaxe qui portera leur taux minimal d'imposition à 20 % et doit rapporter 2 milliards.

Le gouvernement va soumettre environ 400 grandes entreprises, pendant deux ans, à une "contribution exceptionnelle" sur leurs bénéfices réalisés en France en 2024 et 2025. Cette mesure, qui concerne les entreprises réalisant un chiffre d'affaires d'au moins 1 milliard d'euros, doit rapporter 8 milliards d'euros en 2025 et 4 milliards en 2026.

"Austérité" pour la gauche, pas assez en rupture pour le RN

Les entreprises de fret maritime comme les transports polluants paieront également leur écot. Le malus écologique sera durci. Une taxe sur les billets d'avion est par ailleurs envisagée par amendement pour 1 milliard d'euros.

Se targuant de vouloir préserver "les plus modestes" et "ceux qui travaillent", le gouvernement va revaloriser de 2 % les tranches de l'impôt sur le revenu pour compenser l'inflation.

Mais après une baisse énorme durant la crise inflationniste, une taxe sur l'électricité (TICFE) serait relevée drastiquement (3 milliards), tout en garantissant une baisse de 9 % de la facture des ménages aux tarifs réglementés.

Ce PLF est jugé "d'austérité" par la gauche qui a vertement critiqué la taxe sur l'énergie. Jean-Luc Mélenchon (LFI) dénonce même "une calamité". Pour le RN, qui voit dans le report de la revalorisation des pensions un "vol", le texte manque de "rupture" après 50 ans de "mauvaise gestion". Le Modem, partenaire du gouvernement, s'est dit, lui, prêt à "donner sa chance" au texte.

Plusieurs élus ont déjà annoncé vouloir modifier le projet de loi au Parlement. Le gouvernement se dit ouvert au dialogue mais faute d'entente, le budget pourrait être adopté sans vote, via l'article 49.3 de la Constitution.

Avec AFP