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Entre armée israélienne et Hezbollah, la Finul prise entre deux feux dans le sud du Liban ?
Alors que sa mission est de contrôler la cessation des hostilités et d'assurer un accès humanitaire aux populations civiles, deux Casques bleus de la Finul ont été blessés jeudi par des tirs israéliens sur leur QG à Naqoura, au sud du Liban. Depuis le 30 septembre et le début de l'offensive israélienne, les troupes de la force internationale sont cantonnées dans leurs bases.

La Finul attaquée au Liban ? Le quartier général de la Force intérimaire des Nations unies pour le Liban (Finul) à Naqoura et les positions voisines ont déjà été pris pour cible ces derniers jours. Mais c’est la première fois depuis la récente escalade de part et d’autre de la Ligne bleue sevrant de démarcation entre Israël et le Liban que des Casques bleus de la mission onusienne sont touchés.

"Ce matin, deux Casques bleus ont été blessés après qu'un char Merkava de l'armée israélienne a tiré sur une tour d'observation du QG de la Finul à Naqoura, la touchant directement et faisant tomber" deux soldats indonésiens, dont les blessures sont "heureusement, cette fois, légères", a indiqué la Finul dans un communiqué, dans lequel elle fait également état de tirs israéliens sur une autre position de l'ONU à Labbouneh, où les troupes israéliennes combattent le Hezbollah libanais.

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La veille, les soldats israéliens avaient "également délibérément tiré sur l'UNP 1-32A à Ras al-Naqoura, où se tenaient régulièrement des réunions tripartites avant le début du conflit, endommageant l'éclairage et une station relais" poursuit encore la Finul dans son communiqué. Et de mettre en garde les belligérants : "Toute attaque délibérée contre des soldats de maintien de la paix constitue une grave violation du droit international."

La France, qui compte près de 700 Casques bleus dans son contingent, a exprimé dans une déclaration "sa forte préoccupation à la suite des tirs israéliens ayant touché la Force intérimaire des Nations unies au #Liban (FINUL) et condamne toute atteinte à la sécurité de la FINUL".

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Créée en mars 1978 par le Conseil de sécurité de l'ONU pour assurer le maintien de la paix le long de la frontière de facto entre Israël et le Liban, la Finul organise sous son égide des réunions réunissant haut gradés israéliens et libanais depuis le retrait de l’armée israélienne, en mai 2000, du territoire libanais, afin de régler de nombreux litiges frontaliers, notamment après la guerre de juillet 2006.

Entre 2006 et le 8 octobre 2023, date de l’ouverture du "front de soutien" du Hezbollah libanais au Hamas palestinien à la suite des attaques du 7 octobre, "le sud du Liban a connu l'une des périodes les plus calmes de l'histoire récente", considère Andrea Tenenti, porte-parole de la Finul, basé à Naqoura.

Entre armée israélienne et Hezbollah, la Finul prise entre deux feux dans le sud du Liban ?

La guerre que se livraient l’armée israélienne et le mouvement chiite pro-iranien était encore de basse intensité jusqu’à mi-septembre, avec des raids israéliens d’un côté et des tirs de roquettes côté Hezbollah. Mais elle a pris une tournure autrement plus dramatique après l’opération contre les bipeurs et talkies des membres du parti chiite libanais les 17 et 18 septembre, et le pilonnage par Israël du sud du pays et de la banlieue sud de Beyrouth qui s’en est suivi.

"Incursions terrestres limitées"

La guerre est encore entrée dans une nouvelle phase le 30 septembre, date à laquelle l’armée israélienne annonce qu’elle commencera à mener des "incursions terrestres limitées" au Liban pour déloger le Hezbollah. Elle prévient aussi la Finul, chargée de maintenir la paix dans le sud du pays, avant de lui demander d’évacuer certaines de ses bases, à l’instar des ordres d’évacuation qu’elle adresse aux populations civiles de Gaza ou du Liban avant de bombarder des zones résidentielles.

"L’armée israélienne (IDF) nous a demandé d’évacuer les bases proches de la ligne bleue", explique Andrea Tenenti, porte-parole de la Finul. Cette ligne, matérialisée par des barils de couleur bleue, a été tracée en juin 2000. Actuellement, la Finul compte 29 bases près de la Ligne bleue, soit 2 000 Casques bleus. 

Le 1er octobre, les premières troupes israéliennes mettent un pied dans le sud du Liban. Elles se rapprochent du village de Maroun al-Ras, au sud-est duquel est stationné le bataillon irlandais de la Finul. Ceux-ci refusent d’évacuer la position, le président irlandais Michael Higgins jugeant ensuite "scandaleux" et "insultant" les "menaces" d’Israël adressées aux troupes irlandaises de la Finul.

Le Hezbollah, lui, accuse l'armée israélienne d'utiliser la force internationale comme un "bouclier humain". Le mouvement chiite pro-iranien appelle "ses combattants à attendre et à ne pas réagir à ce mouvement afin de protéger la vie des soldats de la Finul".

Entre armée israélienne et Hezbollah, la Finul prise entre deux feux dans le sud du Liban ?

Casques bleus cantonnés dans leurs casernes

Andrea Tenenti le reconnait, ces mouvements israéliens "mettent en danger la sécurité de nos troupes". Pourtant, décision a été prise "par tous les pays constituant la Finul" de "rester", indiquait encore le porte-parole quelques heures avant l’attaque de jeudi.

La Finul ajustera sans doute les choses, comme elle le fait toujours, mais prévoirait de rester sur place, selon une source au sein de l’institution onusienne contactée après l'attaque. En 2006 non plus, elle n’avait pas évacué la zone.

À revoir Avec les soldats de la Finul, qui maintiennent une paix fragile entre le Liban et Israël

Une réunion des pays européens contributeurs à la Finul se tiendra la semaine prochaine entre la France, l'Italie, l'Espagne et l'Irlande.

Pour le porte-parole de la Finul, "il est important que la communauté internationale surveille la situation sur le terrain et que le drapeau de l'ONU flotte toujours là-bas". Il ajoute : "Nous ne pouvons pas laisser d'autres pays nous dicter ce qui doit être fait. Nous relevons des Nations Unies. Et nous avons décidé de rester, bien que les capacités de surveillance soient très difficiles pour le moment."

Les Casques bleus sont en effet désormais cantonnés dans leurs casernes, et n’effectuent plus leurs habituelles patrouilles conjointes avec l’armée libanaise depuis le 30 septembre. Sous-équipée, celle-ci s’est d’ailleurs retirée de nombre de ses positions dans le sud du Liban.

La Finul fait primer la sécurité et la sûreté de ses 10 500 personnels, dont plus de 9 500 soldats. En "relative" sécurité dans leurs bases, ils disposent encore de capacités de surveillance. "Nous sommes toujours en mesure, depuis l'intérieur des bases, de rendre compte au Conseil de sécurité de la situation sur le terrain, du nombre de tirs, car nous avons aussi des radars", explique Andrea Tenenti, avant de poursuivre : "Le commandant de la force est toujours en contact avec les parties [israéliennes et libanaises] pour essayer de régler le conflit et de tenter de ramener une certaine stabilité dans le sud [du Liban]."

Violations de la résolution 1701

La Finul, dont le mandat, renouvelé chaque année, a été prorogé d’un an le 28 août dernier à l’unanimité par le Conseil de sécurité de l'ONU, se voit parfois reprocher de ne pas parvenir à accomplir sa mission, à savoir la mise en œuvre de la résolution 1701.

Adoptée à l'unanimité par le Conseil de sécurité en 2006 en échange d’un cessez-le-feu entre les deux parties, elle prévoit en effet le désarmement de tous les groupes armés au Liban, notamment le Hezbollah. Le mouvement chiite est censé se replier au-delà du fleuve Litani, à 30 kilomètres au nord de la Ligne bleue. Or, il ne l’a jamais fait, arguant de l’occupation continue d’une zone d’une vingtaine de kilomètres carrés par Israël.

"La résolution 1701 reste une résolution très valable, mais elle nécessite l’engagement sérieux des deux pays", juge Andrea Teneti. "La résolution n'a pas été mise en œuvre. Nous pouvons les aider, mais c'est leur rôle de la mettre en œuvre", se dédouane-t-il. En attendant, la Finul est aux premières loges des affrontements entre l'armée israélienne et le Hezbollah, assurant avoir prévu "des plans d’urgence immédiatement opérationnels en cas de nécessité".