Le Panama est appelé, dimanche 5 mai, à choisir son nouveau président parmi huit candidats, dont le remplaçant de l'ex-président Ricardo Martinelli (2009-2014), condamné pour blanchiment et réfugié à l'ambassade du Nicaragua mais dont l'ombre n'a cessé de planer sur la campagne.
L'avocat conservateur José Raul Mulino, 64 ans, est largement en tête du dernier sondage d'opinion, avec plus de 37% des intentions de vote lors de ce scrutin à un tour qui doit également renouveler les 71 députés du parlement monocaméral et les gouvernements régionaux.
Parmi les sept autres prétendants, trois se démarquent bien que nettement distancées, en dessous des 15%: l'ancien président social-démocrate Martin Torrijos (2004-2009) et deux candidats de centre-droit, l'ancien ministre des Affaires étrangères Romulo Roux et l'ancien consul Ricardo Lombana.
Un temps candidat à un nouveau mandat avant d'être rattrapé par la justice qui l'a condamné à 11 ans de prison, ce qui lui interdit de se présenter, Ricardo Martinelli, réfugié depuis le 7 février à l'ambassade du Nicaragua, a désigné José Raul Murillo, son colistier pour la vice-présidence, comme son successeur.
Les deux hommes sont proches. José Raul Mulino a été ministre de la Sécurité sous le mandat Martinelli, puis ministre des Affaires étrangères et ministre de la Justice. Entre 2015 et 2016, il a été placé en détention provisoire pour corruption, mais a été libéré pour des erreurs de procédure.
Et les Panaméens estiment à 65%, selon un sondage Doxa, que si Mulino l'emporte, c'est l'ancien président Martinelli qui agira dans l'ombre. Et qui pourrait en cas de victoire de son dauphin se voir gracié. Un scénario que redoute l'antenne au Panama de l'organisation anticorruption Transparency international.
"Préférer comme président le représentant direct d'un fugitif condamné pour corruption, c'est se prononcer en faveur de la tricherie comme mode de vie et embrasser publiquement la corruption", a déclaré le célèbre chanteur de salsa panaméen Rubén Blades, qui s'est personnellement impliqué dans la campagne.
Perspectives en berne
Pourtant, la probité entachée de Ricardo Martinelli n'empêche pas de nombreux Panaméens de louer la prospérité économique sous sa présidence. "Il a triché mais il a agi", disent en résumé ses soutiens qui vantent le boom passé des infrastructures avec l'élargissement du canal interocéanique et la construction de la première ligne de métro d'Amérique centrale.
D'autant que le bilan du président sortant social-démocrate Laurent Cortizo --un mandat ne peut être immédiatement renouvelé au Panama-- est miné par des affaires de corruption de son administration, des troubles sociaux fin 2023 déclenchés par une affaire de concession minière contestée, et une dette publique élevée.
Au Panama, environ 45% des emplois sont sur le marché informel, avec un taux de chômage avoisinant les 10% et un tiers de la population rurale vivant dans la pauvreté.
Le futur président et son gouvernement devront faire face à des prévisions économiques en berne avec une croissance chutant de 7,3% en 2023 à 2,5% en 2024, selon le Fonds monétaire international (FMI), et une dette publique de 50 milliards de dollars.
Dans le même temps, le canal de Panama, moteur de l'économie par lequel transite environ 6% du commerce maritime mondial, a dû limiter son trafic en raison d'une sécheresse qui a vidé les lacs d'alimentation en eau douce des écluses et qui remet en question sa pérennité.
La question migratoire a aussi été un argument de campagne. En 2023, plus d'un demi-million de migrants en quête d'une vie meilleure aux États-Unis ont traversé la dangereuse jungle du Darién entre Panama et Colombie. Nombre d'entre eux y sont victimes de gangs criminels dénoncent les nombreuses organisations de défense ds droits humains qui leur viennent en aide.
Les Panaméens, dont les principales préoccupations sont la corruption, le coût de la vie, l'accès à l'eau potable ou la protection sociale, sont appelés dans les bureaux de vote à partir de 7h00 locales (12h00 GMT) jusqu'à 16h00 (21h00 GMT).
Avec AFP