logo

Expulsion des migrants vers le Rwanda : que contient le texte controversé du Royaume-Uni ?
Le parlement britannique a approuvé le projet de loi permettant l'expulsion vers le Rwanda de demandeurs d'asile entrés illégalement au Royaume-Uni. Approuvé en janvier dernier par la Chambre des communes, le texte était depuis lors bloqué à la Chambre des Lords, qui réclamait des protections supplémentaires. France 24 revient sur ce texte controversé.

Le parlement britannique a approuvé, mardi 23 avril, le projet de loi permettant l'expulsion vers le Rwanda de demandeurs d'asile entrés illégalement au Royaume-Uni.  Annoncé il y a deux ans par le gouvernement conservateur au pouvoir, ce projet est présenté comme une mesure-phare de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine. 

Adossé à un nouveau traité entre Londres et Kigali qui prévoit le versement de sommes substantielles au Rwanda en échange de l'accueil des migrants, le texte voté dans la nuit visait à répondre aux conclusions de la Cour suprême, qui avait jugé le projet initial illégal en novembre dernier.

  • Une réécriture du texte

Le projet de loi, d'abord voté par la chambre basse du Parlement, a été ensuite adouci par la chambre des Lords, très critique sur le texte, entraînant une phase dite de "ping-pong" entre les deux chambres.

Comme l'indique le site InfoMigrants, le texte a donc été réécrit en décembre, à la suite d’une visite du ministre de l’Intérieur  britannique, James Cleverly, à Kigali. L'objectif ? "Répondre aux préoccupations de la Cour suprême, en garantissant notamment que le Rwanda n’expulsera pas vers un autre pays les personnes transférées dans le cadre du partenariat", avait indiqué un communiqué du Home Office.

Le nouvel accord comprend notamment la mise en place "d'un tribunal conjoint avec des juges rwandais et britanniques à Kigali pour garantir que la sécurité des migrants est assurée et qu'aucun des migrants envoyés au Rwanda ne soit expulsé vers son pays", avait affirmé le porte-parole adjoint du gouvernement rwandais, Alain Mukuralinda. "Et il veillera également à écouter toutes les plaintes des migrants".

  • Une rémunération des demandeurs d'asile

Le gouvernement britannique prévoit par ailleurs de rémunérer à hauteur de 3 500 euros les demandeurs d’asile qui, de manière volontaire, souhaitent être délocalisés au Rwanda. Est éligible tout exilé débouté du droit d’asile au Royaume-Uni, et qui ne peut retourner dans son pays d’origine. Les demandeurs d’asile relocalisés seront par ailleurs autorisés à travailler légalement au Rwanda, et recevront "un soutien des autorités rwandaises" pour une période allant jusqu'à cinq ans, notamment pour le logement.

  • Le Rwanda, un pays sûr

Le texte définit aussi le Rwanda comme un pays tiers sûr. Or si le Rwanda se présente comme l'un des pays les plus stables du continent africain, son président Paul Kagame est accusé de gouverner dans un climat de peur, étouffant la dissidence et la liberté d'expression. 

Le texte prévoit également que le gouvernement pourra outrepasser une éventuelle injonction de la Cour européenne des droits de l'Homme à éviter les expulsions. 

  • Quelques exemptions

Autre amendement ajouté : l’exemption des personnes qui ont soutenu les forces armées britanniques à l'étranger d'être expulsées vers le Rwanda.

Selon le site InfoMigrants, le texte précise également que seuls 500 migrants seront expulsés à Kigali la première année, bien que l’accord soit conçu pour "inciter" le Rwanda à accepter "des volumes plus élevés".

  • Des nombreuses critiques

Ce texte est critiqué par des ONG et des institutions de protection des droits humains. Le Haut-Commissaire aux droits de l'Homme de l'ONU, Volker Türk, et son homologue en charge des réfugiés, Filippo Grandi, ont appelé, mardi matin, le gouvernement britannique à "reconsidérer son plan" et "à prendre plutôt des mesures pratiques pour lutter contre les flux irréguliers de réfugiés et de migrants, sur la base de la coopération internationale et du respect du droit international des droits de l'Homme".

Avec AFP et Reuters