
À la veille du 78e anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau, l'invité de France 24 est Tal Bruttmann, historien et spécialiste de la Shoah. Il a travaillé plusieurs années avec les historiens allemands Stefan Hördler et Christoph Kreutzmüller pour publier le livre "Un album d’Auschwitz. Comment les nazis ont photographié leurs crimes". Un ouvrage de recherche dans lequel il se penche sur un document historique essentiel et mal connu du grand public, "l'Album d’Auschwitz".
Entre mi-mai et début juillet 1944, des centaines de milliers de Juifs de Hongrie sont déportés dans le camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau. Pour montrer à leur hiérarchie la "bonne mise en œuvre" de cette opération logistique d’envergure, deux SS photographient les étapes qui mènent de l’arrivée des convois jusqu’au seuil des chambres à gaz, ou au camp pour la minorité qui échappa à la mort immédiate.
Ces photographies, connues sous le nom d’"Album d’Auschwitz", ont été retrouvées par une rescapée, Lili Jacob, après la libération du camp, le 27 janvier 1944. Elle découvre l'album par hasard dans la table de chevet d'une ancienne chambre de SS. Et elle voit sur les photos quantité de gens qu'elle a connus, y compris ses parents. Elle s'accrochera à cet objet, précieusement conservé et emmené dans son émigration vers Miami après la guerre. Il servira de preuves dans différents procès et de faire l'objet de plusieurs éditions.
Dans le cas d'Auschwitz-Birkenau, camp d'extermination implanté dans le sud de la Pologne où ont été assassinées 1,1 million de personnes, les SS documentent le travail de réception de déportés juifs de Hongrie. Officiellement, il s'agit de "déplacer" des populations désignées comme indésirables, et d'en sélectionner les individus aptes au travail. De fait, les photographes savent qu'ils capturent les derniers instants de condamnés aux chambres à gaz.