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France : vers une proposition de loi pour inscrire l'IVG dans la Constitution

Le groupe Renaissance à l'Assemblée nationale déposera une proposition de loiconstitutionnelle visant à sanctuariser le droit à l'accès à l'interruption volontaire de grossesse (IVG), a annoncé samedi sa cheffe de file à l'Assemblée nationale, Aurore Bergé. La cheffe des députés LFI a fait une déclaration dans le même sens dès vendredi soir.

La cheffe du groupe Renaissance (ex-LREM) à l'Assemblée, Aurore Bergé, a annoncé, samedi 25 juin, le dépôt d'une proposition de loi pour inscrire "le respect de l'IVG dans notre Constitution", après la décision historique de la Cour suprême des Etats-Unis de révoquer ce droit. À gauche, la cheffe des députés insoumis, Mathilde Panot, avait elle aussi évoqué un tel texte.

Au-delà des États-Unis, cette décision est "catastrophique pour les femmes dans le monde : vous avez une femme qui meurt toutes les 9 minutes parce qu'un avortement a été mal pratiqué, de manière non sécurisée", a souligné sur France Inter Aurore Bergé.

"Cela appelle aussi à ce que nous prenions en France des dispositions pour qu'on ne puisse pas avoir demain des revirements qui pourraient exister. C'est la raison pour laquelle, dès aujourd'hui, avec mon groupe nous allons déposer une proposition de loi constitutionnelle pour inscrire le respect de l'IVG dans notre Constitution", a ajouté l'élue des Yvelines, une ex-LR à l'engagement féministe et désormais la nouvelle présidente du groupe majoritaire à l'Assemblée. 

????"En France, nous garantissons et faisons progresser les droits des femmes. Nous les sanctuarisons.

Dès aujourd'hui, avec mon groupe Renaissance, nous déposons une proposition de loi constitutionnelle pour protéger l'accès à l'IVG." @franceinter #mybodymychoice #RoeVsWade pic.twitter.com/W2WKm2hidR

— Aurore Bergé (@auroreberge) June 25, 2022

"Les droits des femmes sont toujours des droits qui sont fragiles"

Elle avait notamment vivement défendu l'allongement en France du délai légal de l'IVG, voté à la fin de la précédente législature. Craint-elle une remise en cause en France ? "Malheureusement, rien n'est impossible et les droits des femmes sont toujours des droits qui sont fragiles et qui sont régulièrement remis en cause", a répondu Aurore Bergé.

Pointant les nouveaux députés RN, "des opposants farouches à l'accès des femmes à l'IVG", elle a jugé qu'il ne fallait "prendre aucun risque en la matière et donc sécuriser (le droit à l'IVG) en l'inscrivant dans le marbre de notre Constitution".

Le FN (devenu RN) a été pendant longtemps radicalement anti-avortement. En 2011, Marine Le Pen avait redit son souhait de dérembourser l'IVG, puis prôné le statu quo sur le sujet, en se présentant comme la première défenseure des droits des femmes.

La patronne des députés LREM a insisté : "On ne change pas la Constitution comme on change la loi" donc "c'est une garantie qu'on doit donner aux femmes". Elle estime que la mesure sera "largement partagée sur les bancs de l'Assemblée nationale et du Sénat". Sa proposition de loi, transmise à l'AFP, stipule que "nul ne peut être privé du droit à l'interruption volontaire de grossesse".

"L'avortement est un droit fondamental pour toutes les femmes"

Vendredi soir, la cheffe des députés insoumis, Mathilde Panot, avait annoncé aussi qu'elle proposerait dès lundi à l'alliance de gauche Nupes "de déposer une proposition de loi pour inscrire le droit à l'avortement dans la Constitution" française.

La très conservatrice Cour suprême des États-Unis a enterré vendredi un arrêt qui, depuis près d'un demi-siècle, garantissait le droit des Américaines à avorter mais n'avait jamais été accepté par la droite religieuse. Dans la foulée de la décision, plusieurs États américains ont déjà annoncé prendre des mesures pour interdire les interruptions volontaires de grossesse sur leur territoire.

En France, la décision a fait réagir de nombreux responsables politiques, de la gauche à la droite. Emmanuel Macron a regretté la "remise en cause" des libertés des femmes, soulignant que "l'avortement est un droit fondamental pour toutes les femmes".

En 2019, les députés de gauche avaient, à l'initiative du socialiste Luc Carvounas, déposé une telle proposition de loi constitutionnelle, mais qui n'avait pas été inscrite à l'ordre du jour.

En juillet 2018, des députés d'opposition avaient par amendement cherché à inscrire le droit à la contraception et à l'avortement dans le préambule de la Constitution, mais majorité et gouvernement s'étaient prononcés contre, jugeant ces droits suffisamment garantis.  

Reste à voir comment le nouveau texte sociétal pourrait cheminer, alors que l'urgence est aux mesures de pouvoir d'achat et qu'Emmanuel Macron, qui a perdu la majorité absolue à l'Assemblée, cherche à "bâtir des compromis" avec ses opposants.  

Une révision constitutionnelle nécessite l'adoption du même texte par Assemblée et Sénat, puis un vote à une majorité des 3/5es des suffrages exprimés du Parlement en Congrès. L'autre option est le référendum, mais seulement après le vote conforme par les deux assemblées.

Avec AFP et Reuters