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Pour la LDH, la multiplication des violences policières demeure préoccupante

Vice-présidente de la Ligue pour les droits de l'Homme (LDH), Dominique Noguères affirme recueillir de nombreux témoignages similaires à celui du jeune Anyss Arbib. Interview.

France 24 - Le témoignage d’Anyss Arbib, publié sur son compte Facebook et dans le journal Libération de ce mardi, se rapproche-t-il de ceux que vous recueillez quotidiennement auprès de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) ?

Dominique Noguères - Plus nous disposerons de ce genre de témoignages, mieux ce sera. Ces violences et ces insultes sont tellement courantes qu’il devient nécessaire de s’en préoccuper. La plupart des victimes pensent que cela ne sert à rien d’en parler. C’est intéressant que cet étudiant ait parlé et qu’il ait été écouté.
Tous les jours, nous recueillons des témoignages d’insultes à caractère raciste, de contrôles au faciès qui se basent sur l’attitude et la tenue vestimentaire. On ne peut pas continuer à banaliser ces faits. Cela crée un sentiment d’impunité et de fatalité.

Comment accompagnez-vous les personnes qui souhaitent porter plainte ?

On leur conseille de saisir l’Inspection générale des services (IGS), la ‘’police des polices’’. Mais nous savons d’avance que nous n’obtiendrons pas beaucoup de résultats. Parallèlement, nous pouvons saisir la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), qui enquête sur les dérives des forces de l’ordre. Mais, de toute évidence, cette commission dérange puisqu’elle va être noyée au sein d’une nouvelle institution appelée ‘’Défenseur des droits’’. Cette réforme va empêcher un certain nombre de dossiers de ressortir.
Nous distinguons deux sortes de problèmes : les contrôles d’identité au faciès et les violences policières à proprement dites. Le contrôle peut être ‘soft’ mais enquiquinant. La violence, c’est autre chose.

En ce qui concerne les contrôles au faciès, comment faire bouger les choses ?

D’abord, il n’existe aucune statistique dans les commissariats. Il est anormal de ne pas savoir qui contrôle qui et combien de fois. On pourrait demander qu’à chaque fois qu’un contrôle d’identité est effectué, un procès-verbal soit adressé. On devrait également pouvoir identifier l’agent interpellateur par un numéro d’immatricule. Aujourd’hui, c’est votre parole contre celle des policiers et, au final, on ne peut pas grand-chose.
Concernant les violences, la seule chose à faire est de systématiquement porter plainte. Mais nous rencontrons souvent des gens qui ont été victimes de gardes-à-vue difficiles, et qui ne veulent pas engager de nouvelles procédures. Ils laissent tomber.
Parmi les plaintes que nous recevons, nous remarquons le ‘’menottage’’ quasi systématique. Cette situation est préoccupante. Dans son rapport 2008, la CNDS s’insurge d’ailleurs contre le fait que ‘’’le menottage’ continue à être la règle et non l'exception". Enfin, ce qui est nouveau, ce sont les interpellations de mineurs : usage de termes irrespectueux, garde-à-vue avec, dans certains cas, fouilles à nu.