La Birmanie et l'Afghanistan ont été retirés in extremis, lundi, de la liste des discours lors de l'Assemblée générale des Nations unies. Les Taliban avaient demandé que leur nouveau ministre des Affaires étrangères puisse intervenir à l'ONU, mais leur demande a été trop tardive pour être prise en compte, a indiqué un responsable de l'ONU.
Au dernier jour, lundi 27 septembre, des discours de dirigeants à l'Assemblée générale de l'ONU, la Birmanie et l'Afghanistan ne s'exprimeront pas. Une curiosité parmi d'autres du marathon diplomatique qui aura vu venir à New York une centaine de dirigeants et des dizaines de ministres en dépit de la pandémie.
Au programme initial de l'ONU, le débat général devait s'achever successivement par la Birmanie, la Guinée et l'Afghanistan, ce dernier pays étant encore prévu dans la nuit de dimanche à lundi avec l'ambassadeur Ghulam Isaczai, membre du cabinet du président déchu Ashraf Ghani, bien qu'il ait été révoqué par les Taliban.
Mais au début de la reprise des discours, surprise, l'Afghanistan n'est plus inscrite. "Ce pays a retiré sa participation au débat général", a annoncé à l'AFP la porte-parole du président de l'Assemblée générale, Monica Grayley, en précisant qu'"aucune raison n'avait été donnée" sur cette décision in extremis.
Conakry, où une junte a pris le pouvoir, sera bien représenté par l'ambassadeur à l'ONU, Aly Diane, nommé par l'exécutif déchu. Mais Ghulam Isaczai n'apparaîtra pas à la prestigieuse tribune internationale.
"Un accord" entre Washington, Pékin et Moscou sur la Birmanie
Les Taliban, au pouvoir depuis août, avaient demandé il y a une semaine à l'ONU que leur nouveau ministre des Affaires étrangères, Amir Khan Muttaqi, puisse intervenir à l'ONU. Mais leur demande a été trop tardive pour être prise en compte, a indiqué à l'AFP un responsable de l'ONU sous couvert d'anonymat.
La double demande d'intervention contradictoire concernant l'Afghanistan a-t-elle fait l'objet d'une entente entre Washington, Pékin et Moscou, similaire à celle survenue pour la Birmanie ?
"Un accord est intervenu entre les États-Unis, la Russie et la Chine" pour que le représentant birman rebelle Kyaw Moe Tun ne s'exprime pas, avait confié récemment sous couvert d'anonymat un ambassadeur issu de l'une de ces trois puissances.
"Profil bas", a confirmé à l'AFP Kyaw Moe Tun, cible récemment d'un complot présumé visant à le faire démissionner, quitte à le tuer s'il refusait.
Depuis le coup d'État militaire du 1er février, cet ambassadeur choisi par l'ex-dirigeante birmane Aung San Suu Kyi a conservé son siège auprès de l'ONU, soutenu par la communauté internationale. En mai, la junte a nommé un ex-militaire pour le remplacer mais il reste non entériné à ce jour par l'ONU.
Sa nomination comme celle d'un nouveau représentant pour l'Afghanistan passe par une commission onusienne formée notamment des États-Unis, de la Russie et de la Chine. Le consensus est la règle et, pour les deux pays, "il n'en y a pas, donc il y aura un vote" dans les mois qui viennent de l'Assemblée générale, indique un responsable de l'ONU.
La France s'exprime le dernier jour
"Comme c'est encourageant de voir l'Assemblée générale se réunir à nouveau en personne", s'était réjoui vendredi le Premier ministre belge, Alexander De Croo, alors que l'an dernier elle s'était rassemblée principalement de manière virtuelle. "N'aspirons-nous pas tous à 'revenir à la normale' ?", avait-il demandé.
Tous les Européens n'ont cependant pas suivi son exemple. Le président français Emmanuel Macron a successivement annoncé à l'ONU qu'il viendrait à New York, puis qu'il s'exprimerait par vidéo le premier jour après l'Américain Joe Biden, pour finalement laisser la voix de la France à son chef de la diplomatie, qui s'exprimera ce lundi. Par vidéo, alors qu'il a été physiquement présent à l'ONU pendant cinq jours.
"C'est rare pour l'un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité d'intervenir le dernier jour", souligne un diplomate européen. "C'est surprenant, je n'ai jamais vu cela", abonde un ambassadeur membre du Conseil de sécurité. Énigmatique, la France s'est bornée à évoquer les conditions sanitaires.
Si Washington, craignant un foyer de pandémie, a tout fait pour dissuader les dirigeants de venir à New York, avec des règles strictes – masques, distanciation, sept personnes par délégation à l'ONU –, leur application est restée aléatoire.
Mercredi, ironie de l'histoire, c'est le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, qui arpentait les couloirs de l'ONU flanqué d'une vingtaine de personnes, a constaté l'AFP.
Au final, quatre cas de Covid-19 ont été officiellement recensés, tous dans la délégation du Brésil, pays dont le président Jair Bolsonaro reste antivaccin même si sa femme a profité de sa visite à New York pour recevoir une dose.
Mais sans obligation de révéler sa contamination, de test avant d'entrer à l'ONU ou de prouver sa vaccination, combien de cas réellement ?
Les restrictions onusiennes ont été dissuasives. Au premier jour du débat, seulement 1 929 personnes ont franchi les portiques de sécurité contre 26 000 en 2019, selon l'organisation.
Au total, quelque 200 discours auront été prononcés. Des centaines de bilatérales ont aussi été organisées dans un "speed dating" effréné dans et hors de l'ONU, parfois de manière improvisée sur les trottoirs près de l'ONU pour des ONG interdites d'entrée, comme l'a expérimenté le Comité international de la Croix-Rouge.
Avec AFP