Les membres européens du Conseil de sécurité de l'ONU et Washington ont appelé mercredi l'Organisation de l'aviation civile internationale à "enquêter d'urgence" sur le détournement d'un avion de ligne par la Biélorussie. Le président Alexandre Loukachenko a de son côté assuré avoir agi "légalement".
Les Européens et les États-Unis ont appelé mercredi 26 mai à une enquête urgente sur le détournement d'un avion de ligne par la Biélorussie. Dimanche, un vol opéré par la compagnie Ryanair a été intercepté par les services de sécurité biélorusses sous prétexte d'une alerte à la bombe. Un journaliste d'opposition présent à bord a été arrêté à l'aéroport de Minsk.
Dénonçant un incident "sans précédent et inacceptable", les membres européens du Conseil de sécurité de l'ONU et Washigton ont appelé, dans une déclaration conjointe, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) "à enquêter d'urgence" sur cette affaire. Installée à Montréal, l'OACI doit tenir une réunion d'urgence ce jeudi.
Les Occidentaux ont également appelé à la "libération immédiate" de Roman Protassevitch et de son amie russe Sofia Sapega, tous deux interpellés alors qu'ils se trouvaient à bord de cet avion qui devait relier Athènes et Vilnius.
"Mépris flagrant du droit international"
Face à l'avalanche de condamnations occidentales et de nouvelles sanctions décidées par l'Union européenne (UE), Alexandre Loukachenko a assuré mercredi devant un parterre de dignitaires avoir "agi légalement en protégeant mes gens". S'il a reconnu avoir envoyer un chasseur MiG-29 pour intercepter le vol, il a martelé que sa mission était "d'établir la communication, d'accompagner l'atterrissage de l'avion de passagers en cas de situation d'urgence".
Pour les autorités biélorusses, la présence à bord de ce détracteur du régime et donc son arrestation relevaient du hasard mais l'Union européenne, les États-Unis et l'opposition biélorusse affirment que l'alerte à la bombe était un subterfuge pour arrêter le journaliste.
L'obligation faite à l'avion de se poser, "sur de faux motifs", a "mis en danger la sécurité aérienne", ont dénoncé Européens et Américains à l'ONU, fustigeant une "attaque" et un "mépris flagrant du droit international".
"Piraterie"
Alexandre Loukachenko a pour sa part assuré que la décision de se poser à Minsk avait été prise par le commandant de bord du vol Ryanair et qu'à l'exception de Minsk, "personne n'a voulu accueillir l'avion". Des propos qui se distinguent de transcription de l'échange entre les contrôleurs et le pilote, publiée mardi par Minsk. Cet échange témoigne du fait que les autorités ont insisté pour que le vol se pose en Biélorussie et non dans des pays voisins.
Quelques heures après ces déclarations, les premières d'Alexandre Loukachenko depuis l'incident, la Biélorussie a accusé la France de "piraterie" pour avoir refusé son espace aérien à un avion effectuant une liaison Minsk-Barcelone. Un acte "scandaleux" et "immoral", selon le dirigeant biélorusse, au pouvoir depuis 1994.
Dès lundi soir, l'UE a adoptés de premières sanctions : la fermeture de son espace aérien aux avions biélorusses et la recommandation à toutes les compagnies européennes de contourner le pays. Cet appel a été très suivi. À son tour, la Pologne a annoncé mercredi soir interdire son espace aérien aux avions de son voisin. Autre perturbation, Air France a dû annuler un vol Paris-Moscou qui contournait la Biélorussie et dont le plan de vol nécessitait "une nouvelle autorisation de la part des autorités russes", une première depuis l'incident.
Désormais, "les Biélorusses n'ont désormais plus la possibilité de fuir le pays s'ils veulent échapper au régime", a déclaré Svetlana Tikhanovskaïa, représentante de l'opposition en exil en Lituanie. "Nous étudions la possibilité de permettre des évacuations d'urgence de personnes poursuivies" par le gouvernement, a-t-elle dit à l'Agence France-Presse. Elle estime les sanctions européennes "raisonnables" et que les Biélorusses "ne peuvent blâmer personne d'autre que le régime".
Soutien russe
Minsk dispose dans cette affaire du soutien de son principal allié, la Russie, qui n'a pas rejoint les critiques occidentales. Après le discours d'Alexandre Loukachenko, le Kremlin a indiqué ne pas avoir "de raisons de ne pas croire les déclarations des autorités biélorusses".
La porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a pour sa part fustigé les accusations de complicité de Moscou dans cette affaire, des "interprétations fantasques". Elle a de nouveau appelé à une "enquête objective" sur l'incident.
Dans ce contexte, Alexandre Loukachenko et Vladimir Poutine doivent se rencontrer vendredi en Russie.
Avec AFP