Quelques 6 000 migrants ayant rejoint ces derniers jours l'enclave espagnole de Ceuta ont été refoulés vers le Maroc, selon les autorités espagnoles. Si parmi eux figure un nombre impressionnant de mineurs, d'autres ont échappé aux contrôles de police et errent désormais dans les rues. À Ceuta, les équipes de secours, comme celles de la Croix-Rouge, sont débordées face à ces mineurs isolés en détresse.
Depuis lundi, plus de 8 000 candidats à l'exil, en grande majorité des Marocains, ont rejoint le petit port espagnol de Ceuta à la faveur d'un relâchement des contrôles frontaliers : parmi eux, un nombre impressionnant de jeunes partis seuls ou d'enfants en bas âge, emmenés par leur famille.
Ces derniers jours, des adolescents seuls parfois très jeunes ont ainsi tenté leur chance à la frontière et sont arrivés par la mer sur la plage espagnole. Ceux qui ne se sont pas faits refouler errent dans les rues de Ceuta.
En première ligne dans cette crise migratoire, les organismes comme la Croix-Rouge espagnole travaillent d'arrache-pied. Les équipes apportent des vivres, des vêtements et des soins à ces nombreux mineurs isolés, qui sont parfois déshydratés ou en état d'hypothermie.
Du côté de la frontière, de nombreux parents s'approchent des barrières barrant la route vers l'Espagne dans l'espoir d'avoir des nouvelles de leurs enfants partis de l'autre côté.
"Je cherche ma fille de 15 ans, elle est sortie de la maison pour traverser, une autre fille m'a dit l'avoir vue à Ceuta, je n'ai pas de nouvelles, personne ne sait rien", déclare, visiblement inquiet, Abdelhak Bouchahtaoui, un quinquagénaire croisé près de la frontière.
Des jeunes à la recherche d'un avenir meilleur
Venue en catastrophe de Tanger, Ouafa a été "soulagée" de retrouver son fils de 15 ans, même si elle a, dans un premier temps, "espéré qu'il ait réussi à passer la frontière".
"Ma mère ne cesse de m'appeler pour que je revienne mais l'aventure ne me fait pas peur", lâche Abdellah, 16 ans, refoulé mardi par les gardes espagnols. Le jeune, déscolarisé depuis deux ans et employé comme mécanicien à Tanger, a passé la nuit dans un jardin près du passage frontalier. D'autres ont investi les ruelles de Fnideq, où les habitants leur ont donné à boire et à manger.
"Je n'ai aucun avenir ici, je veux travailler pour aider ma famille", peste Mohamed, arrivé mercredi à Fnideq après une longue marche. Adossé sur un mur en bas d'un immeuble de la petite ville côtière marocaine, il ne regrette pas d'avoir abandonné ses études pour tenter sa chance. Comme lui, la plupart des mineurs désireux de s'exiler viennent d'un milieu défavorisé, sont déscolarisés et exercent parfois des petits métiers pour survivre.
Parmi les 8 000 migrants qui ont rejoint Ceuta par la plage ou par la mer depuis lundi, 6 000 ont déjà été expulsés vers le Maroc, selon les autorités espagnoles.
Une première à Ceuta
Cet afflux "impressionnant" de mineurs vers la frontière est une première pour Omar Naji, un militant marocain des droits humains qui suit la question migratoire.
"Leur expulsion par l'Espagne est contraire aux traités internationaux des droits des enfants", s'indigne-t-il. "Les autorités marocaines les ont impliqués pour faire pression sur l'Espagne à des fins politiques", condamne-t-il du même souffle.
Mercredi après-midi, le flux vers Ceuta a peu à peu décru. Les quelques téméraires qui tentaient de rallier l'enclave à la nage ont été rapidement ramenés vers la rive marocaine par la marine royale. Côté espagnol, ceux qui arrivaient par la mer ont été très vite appréhendés et ramenés vers la frontière.
Si Abdellah se résigne à attendre, ayant de quoi "survivre quelques jours". Son compagnon Hassan, 17 ans, a décidé de rentrer à pied chez lui, à Tanger. Il "rêve de vivre en Europe" mais ne veut pas "prendre le risque de partir aujourd'hui". "Un jour ou l'autre, je retenterai ma chance et j'y arriverai", dit-il.
Avec AFP