Une tentative de renflouage du géant des mers échoué, menée vendredi, n'a pas fonctionné. Il faudra peut-être plusieurs jours, voire plusieurs semaines, pour mener à bien cette opération complexe. En attendant, plus de 200 navires se retrouvent immobilisés de part et d'autre du canal de Suez.
Faudra-t-il quelques jours ou quelques semaines pour débloquer le canal de Suez ? Les efforts se poursuivaient, vendredi 26 mars, pour dégager un porte-conteneurs de 400 mètres de long coincé depuis quatre jours en travers de cette voie cruciale pour le fret maritime, durement affecté.
La société mandatée pour le "sauvetage" de l'Ever Given s'est montrée prudente, évoquant "des jours, voire des semaines" pour la reprise du trafic sur le canal, qui voit passer près de 10 % du commerce maritime international, selon des experts.
Une opération visant à renflouer ce géant des mers d'une longueur équivalente à quatre terrains de football "n'a pas réussi" vendredi, a indiqué la Bernhard Schulte Shipmanagement (BSM), compagnie basée à Singapour qui assure la gestion technique du navire, ajoutant que "deux remorqueurs supplémentaires de 220 à 240 tonnes" arriveraient d'ici dimanche pour aider à la remise à flot du navire.
L'incident survenu mardi et provoqué par des vents violents combinés à une tempête de sable, selon différentes sources, a entraîné des embouteillages massifs.
D'après la revue spécialisée Lloyd's list, plus de 200 navires sont bloqués aux deux extrémités et dans la zone d'attente située au milieu du canal, entraînant d'importants retards dans les livraisons de pétrole et d'autres produits, avec une brève répercussion sur les cours de l'or noir mercredi.
Le géant du transport maritime Maersk et l'allemand Hapag-Lloyd ont indiqué jeudi qu'ils envisageaient de dérouter leurs navires et de passer par le cap de Bonne-Espérance, soit un détour de 9 000 kilomètres et 10 jours supplémentaires autour du continent africain.
Or, les coûts globaux sont élevés dans le domaine du transport maritime de marchandises en conteneurs. Selon Lloyd's list, le porte-conteneurs coincé bloque chaque jour l'équivalent d'environ 9,6 milliards de dollars (8,1 milliards d'euros) de marchandises.
Aide internationale
Depuis mercredi, l'Autorité égyptienne du canal de Suez (SCA) tente de dégager le navire de plus de 220 000 tonnes. Il faudrait retirer de 15 000 à 20 000 mètres cubes de sable pour atteindre une profondeur de 12 à 16 mètres et remettre le navire à flot, explique la SCA qui a précisé vendredi que 87 % du processus de retrait du sable avait été effectué par les dragues.
Une importante marée haute, prévue en début de semaine prochaine, pourrait aider les équipes techniques à débloquer le navire.
L'Égypte a reçu plusieurs propositions d'aide internationales, notamment des États-Unis, selon la SCA.
La Turquie a également proposé d'envoyer un remorqueur pour tracter le porte-conteneurs, une proposition d'aide qui intervient au moment où Ankara s'efforce d'apaiser ses relations avec Le Caire, tendues depuis le renversement en 2013 du président Mohamed Morsi, que soutenait le dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan.
La société qui exploite le navire, Evergreen Marine Corp, basée à Taïwan, a sollicité la société néerlandaise Smit Salvage et l'entreprise japonaise Nippon Salvage pour mettre en place "un plan plus efficace" de sauvetage. Les premiers experts sont arrivés jeudi.
Smit Salvage a participé à de grandes opérations de sauvetage ces dernières années, notamment sur le Costa Concordia, navire de croisière italien qui s'était échoué au large de la Toscane en 2012, et sur le sous-marin nucléaire russe Koursk, qui avait sombré avec 118 hommes à bord en août 2000.
Dépendance au transport maritime
Près de 19 000 navires ont emprunté le canal en 2020, selon la SCA, soit une moyenne de 51,5 navires par jour.
Selon un rapport de l'assureur Allianz Global Corporate & Specialty sur la sécurité maritime, "le canal de Suez présente un excellent bilan de sécurité dans l'ensemble, les incidents de navigation étant extrêmement rares – au total, 75 incidents de navigation ont été signalés au cours de la dernière décennie".
Selon la journaliste britannique Rose George, autrice d'un livre sur le transport maritime, ce dernier "nous apporte encore 90 % de tout (...) et nous en sommes fondamentalement dépendants".
D'après elle, "plus des deux tiers des accidents maritimes sont dus à une erreur humaine".
Mais selon un responsable de la diplomatie russe, Nikolaï Korchounov, le blocage du canal de Suez "a mis en lumière la nécessité avant tout de la poursuite du développement de la route maritime du Nord", voie maritime dans l'Arctique russe de plus en plus praticable à cause du changement climatique.
Avec AFP