Cette semaine dans Ici l'Europe, nous recevons le ministre français délégué chargé du Commerce extérieur et de l'Attractivité, Franck Riester. Il revient sur l'accord commercial de Brexit, sur la pandémie de Covid-19 ainsi que sur les polémiques autour des stratégies vaccinales en Europe. Il réagit également aux récents événements à Washington et affiche son espoir dans les futures relations avec l'administration Biden.
Alors que les nombreux embouteillages attendus à Douvres et Calais après la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne le 1er janvier n’ont finalement pas eu lieu, Franck Riester explique qu’il "faut rester très prudents" car "beaucoup d’entreprises ont anticipé le Brexit et ont donc constitué des stocks avant la fin de l’année".
Le ministre français délégué chargé du Commerce extérieur et de l'Attractivité revient également sur la longue phase préparatoire de trois ans, qui a consisté "à recruter des douaniers, à investir dans des plateformes d’accueil des camions pour s’assurer que tous les contrôles douaniers, les contrôles phytosanitaires, les contrôles sanitaires et les contrôles administratifs soient bien faits" car, insiste-t-il, "même avec cet accord qui limite les contraintes, qui limite les perturbations, il y a forcément des différences avec la situation préexistante".
Interrogé sur les zones de duty-free rouvertes à Calais, il confirme que le Royaume-Uni a "en effet accès au duty-free comme les autres pays-tiers de l’UE", mais qu’il n’y a "aucun tarif douanier" entre le Royaume-Uni et l’Union européenne et que "l’avantage du duty-free est donc beaucoup moins important que quand il s’agit d’un pays qui a des tarifs douaniers très importants avec l’UE".
Il rappelle par ailleurs que l’accord commercial met en place "des garanties, des garde-fous, pour ne pas que, à travers des ports francs ou des pratiques déloyales, les Britanniques créent une forme de dumping ; dumping fiscal, dumping social, dumping environnemental".
Le sort de la City, place financière britannique, n’ayant pas été réglé dans le cadre de l’accord commercial, il constate qu’"un certain nombre d’acteurs de services financiers se sont déjà installés en France ou ailleurs en Europe" et pense que "ce mouvement va s’amplifier", en raison des atouts non négligeables des places financières européennes.
Franck Riester met en garde les Britanniques qui ont "soi-disant retrouvé une souveraineté qu’ils vont perdre progressivement dans les faits, puisque par exemple sur les services financiers, les entreprises qui vont vouloir avoir accès au marché européen devront être installées dans l’Union européenne".
"Faire confiance à notre administration" pour la campagne de vaccination
Les pays européens durcissent les restrictions pour lutter contre la pandémie de Covid-19 et les campagnes de vaccination se mettent en place en ordre dispersé au sein de l’Union. Franck Riester rappelle le caractère "historique et inédit de cette pandémie qu’il faut aborder avec humilité dans la façon de régler la question à la fois d'un point de vue sanitaire, d’un point de vue économique, et en matière vaccinale tout particulièrement".
Il reconnaît une certaine "lourdeur" dans la campagne de vaccination en France, mais insiste cependant sur le fait "qu’il faut garder du calme, il faut de la méthode et faire confiance à notre administration pour pouvoir mettre en place une stratégie de vaccination qui permette, en fonction de l’arrivée des doses vaccinales, de vacciner celles et ceux qui en ont le plus besoin, tout de suite, avec une stratégie de vaccination juste entre tous les territoires, entre toutes les populations".
Il salue les efforts collectifs dans le monde entier qui ont permis de "créer des vaccins en moins d’un an, pour une épidémie, pour une maladie, pour un virus comme celui-là" et se félicite que la France et les pays européens aient "fait appel à l’Europe, parce qu’on a plus de garanties que les vaccins qui sont validés sont les bons vaccins, que toutes les mesures sont prises pour s’assurer qu’il n’y a pas d’effets secondaires et que le vaccin est efficace. Et parce que si on est plus nombreux à acheter, on peut avoir des prix plus intéressants."
L'assaut au Capitole et les "menaces contre la démocratie"
Après les images des supporters de Donald Trump entrant dans le Capitole, qu’il qualifie d'"absolument terribles", Franck Riester met en garde contre "les menaces à la démocratie" et rappelle que "les hommes et les femmes politiques ont une responsabilité dans leurs paroles et dans leurs actes" car "les politiques influencent aussi ce que pensent les gens, et donc nous avons, nous, responsables politiques, une responsabilité particulière quand nous nous exprimons."
Il insiste sur "les conséquences sur le temps long de cette façon de faire de la politique et des débats publics simplistes, simplificateurs, populistes", et affirme qu’en France "il faut être prudent, car nous ne sommes jamais à l’abri d’avoir demain des responsables politiques en responsabilité qui sont aussi populistes que peut l’être Donald Trump, avec les conséquences qu’on peut voir tant dans la façon dont parfois il peuvent mettre en danger la démocratie que dans les comportements commerciaux des États-Unis que nous avons à subir".
Joe Biden et l'"opportunité" de restaurer une relation transatlantique
Franck Riester revient également sur les taxes appliquées par l’administration Trump aux produits français, et plus particulièrement aux vins, et appelle à la "désescalade" car "nous n’avons aucun intérêt entre Américains et Européens à faire en sorte d’être dans une escalade de surtaxe douanière", sans pour autant oublier de se faire "respecter", insistant ainsi sur le fait que "nous ne pouvons pas accepter que les Américains taxent nos produits sans que nous, nous taxions les leurs à partir du moment où nous sommes autorisés à le faire par l’OMC".
Il conteste la décision "illégitime et illégale d’un point de vue du commerce international qui a été prise par les USA le 30 décembre dernier" et assure que la France est "en train de voir comment nous allons réagir d’une manière très ferme avec nos partenaires européens". Franck Riester assure, cependant, attendre l’arrivée de l’administration de Joe Biden, pour mettre en place "une démarche de dialogue" car "il a dit qu’il souhaitait renouer une relation transatlantique forte de partenariat, d’amitié entre les États-Unis et l’Union européenne et il a là une belle opportunité de le démontrer."
Une émission préparée par Perrine Desplats.