
Ancien directeur général du ministère libanais des Finances, Alain Bifani a démissionné avec fracas en juin dernier. Il dénonce depuis la "pieuvre politico-financière" qui a fait main basse sur le Liban. Dans un pays en faillite, sans gouvernement, où la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, il insiste sur le fait que "ce ne sont pas les petites réformes qui règleront les problèmes du Liban", mais des changements au "niveau systémique".
Alain Bifani revient sur le refus des principaux dirigeants du pays d'être interrogés dans l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth. Cela signifie, pour lui, que "l'indépendance des pouvoirs qui n'existe plus".
L'ancien directeur général du ministère des Finances rappelle son engagement en faveur du plan de redressement proposé par le FMI et soutenu par la France au moment où le pays s'est retrouvé en cessation de paiement. "Faire payer ceux qui ont profité du système, les corrompus de la politique" était, pour lui, la bonne option. Il dénonce le fait que le peuple, "des gens qui n'ont rien à voir avec ce système", paient aujourd'hui le coût de la crise.
D'après lui, "la caste dirigeante prédatrice" est en train de transformer le Liban en "Somalie d'il y a quelques années", c'est à dire un pays sans gouvernement capable de gérer les problèmes, dépourvu de services publics et où les disparités sont énormes.
Alain Bifani dénonce également l'audit de la banque centrale avorté, pour lequel il pointe la responsabilité à la fois de son gouverneur, Riad Salamé, et des dirigeants comme Michel Aoun et Saad Hariri. Il critique notamment le refus d'accès aux informations sensibles qu'a subi le cabinet d'audit mandaté, au prétexte du secret bancaire. Une pratique qu'Alain Bifani qualifie de "symptomatique" du manque de transparence dans le pays.
Enfin, l'ancien fonctionnaire libanais se positionne en faveur des sanctions évoquées notamment par le président français Emmanuel Macron. Il faut "toucher les dirigeants directement et toucher leurs poches", pour les forcer à entrer dans une spirale vertueuse.