
Suspendu à plusieurs reprises pour des raisons sanitaires, le procès d'Ali Riza Polat, principal accusé des attentats de janvier 2015, a repris mercredi. Diagnostiqué positif au Covid-19 fin octobre, il s'est plaint à plusieurs reprises de son état de santé, empêchant la bonne tenue des débats.
Un temps suspendu après l’état de santé du principal accusé, le procès des attentats de janvier 2015 a repris dans la cacophonie et au milieu des récriminations du principal accusé. Ali Riza Polat a assuré être trop affaibli par le Covid-19 pour comparaître et a été sommé de quitter la salle d'audience.
Traits tirés, regard sombre et barbe fournie sous son masque, Ali Riza Polat, diagnostiqué positif fin octobre au nouveau coronavirus, a repris place en dernier dans le box vitré.
Ce Franco-turc de 35 ans, présenté comme le "bras droit" du tueur de l'Hyper Cacher Amédy Coulibaly, encourt la perpétuité. Ali Riza Polat souffre de troubles digestifs liés au Covid qui ont conduit à reporter le procès à plusieurs reprises.
Mais une dernière expertise l'a déclaré "apte" à assister à l'audience "tant sur le plan médical que sanitaire", a souligné le président de la Cour d'assises spéciale, Régis de Jorna, précisant que l'accusé refusait de prendre depuis plusieurs jours son "traitement anti-vomitif".
"Emmenez-moi à l'hôpital"
Une appréciation accueillie avec colère par l'accusé, coutumier des coups d'éclat depuis le début du procès le 2 septembre. "Emmenez-moi à l'hôpital, c'est tout ce que je vous demande !", s'est-il écrié, en crachant ostensiblement dans une bassine posée à ses pieds.
Nausée réelle ou bien surjouée ? Dans la salle, certains manifestent leur impatience. "Tous les examens cliniques et biologiques sont normaux", s'agace Me Méhana Mouhou, avocat de parties civiles. "On est devant quelqu'un qui théâtralise !"
"S'il refuse son traitement, c'est son choix, mais ce n'est pas à nous d'en tirer les conséquences (...). Il ne faut pas laisser à l'accusé le choix de la tenue ou non des débats", soutient de son côté l'avocate générale, Julie Holveck.
Le procès a été suspendu le 31 octobre après la découverte de trois cas de contamination au Covid-19 parmi les accusés. Cette suspension a été prolongée à plusieurs reprises, en raison des "troubles digestifs" d'Ali Riza Polat.
La visioconférence écartée
Face à cette situation, Régis de Jorna avait envisagé de reprendre le procès en utilisant la visioconférence, grâce à une ordonnance gouvernementale permettant que l'ultime partie d'un procès criminel puisse exceptionnellement se dérouler en l'absence physique des accusés.
Mais face à l'hostilité des avocats pour ce mode de comparution, la visioconférence a été écartée. Et cette possibilité a depuis été rendue impossible, le Conseil d'État, saisi par une association d'avocats pénalistes, ayant suspendu l'ordonnance du gouvernement.
Il faut maintenant "que les débats reprennent" et "que le procès aille à sa fin", insiste Me Benoit Chabert, agent judiciaire de l'État.
Plusieurs avocats insistent sur la souffrance des victimes. Ali Riza Polat, lui, se remet à cracher. Soudain, il explose dans le box : "Tout ce que je demande c'est d'aller à l'hôpital ! Je m'en bats les couilles d'écouter ces salades !" "Vous vous taisez ou je vous expulse !", lui lance d'un ton autoritaire Régis de Jorna, en invitant les avocats à reprendre leurs plaidoiries.
Sur les bancs de la défense, l'avocate d'Ali Riza Polat s'insurge. "Mon client ne va pas bien du tout, je souhaite qu'il y ait un médecin", réclame Isabelle Coutant-Peyre, en invitant le président à "prendre ses responsabilités". Sans succès.
Verdict attendu le 16 décembre
Dans le box, Ali Riza Polat tente de s'allonger, laissant penser à un malaise. L'audience est brièvement suspendue. "Il est malade comme un chien !", râle Me Coutant-Peyre. "Vous faites que de mentir !", lance à la cour Ali Riza Polat, qui tente à nouveau de s'allonger.
"Si vous êtes dans cet état-là, c'est que vous refusez de prendre votre traitement !", s'emporte Régis de Jorna. Dans un vaste brouhaha, l'accusé est menotté, puis expulsé hors de la salle.
Quatorze personnes au total sont jugées par la Cour d'assises spéciale de Paris, dont trois en leur absence, pour leur soutien présumé aux frères Kouachi et à Amédy Coulibaly, auteurs des attentats de Charlie Hebdo, Montrouge et de l'Hyper Cacher, qui ont fait 17 morts.
Le procès, ouvert le 2 septembre, devait initialement prendre fin le 10 novembre. Le verdict est désormais prévu le 16 décembre.