L’attaque à l’arme blanche, vendredi, près des anciens locaux de Charlie Hebdo, est une nouvelle épreuve pour les habitants du quartier du 11e arrondissement de Paris, cinq ans après les attentats.
Cinq ans après la tuerie de Charlie Hebdo, l'attaque, vendredi 25 septembre à Paris près des anciens locaux du journal, rouvre des "cicatrices" dans le quartier.
Chantal réparait une fuite chez elle, à proximité du boulevard Richard-Lenoir, dans le 11e arrondissement, quand elle a entendu "hurler les sirènes" dehors peu avant midi.
"La première chose que je me suis dit, c'est : "Ça recommence". Je me suis replongée cinq ans en arrière", dans l'attentat du 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo, où 12 personnes ont été tuées.
"Les souvenirs reviennent à la surface. Entre ça et le Covid, on vit des moments vraiment pas sympas" ajoute-t-elle. Tout en précisant avoir, depuis début septembre et le début du procès des attaques de janvier 2015, "une sorte de prémonition". "Je sentais que ça devait inévitablement se passer ainsi."
Pour Denise Hamon, une retraitée qui habite depuis plusieurs années dans ce quartier animé proche de la place de la Bastille, les vieux souvenirs sont aussi remontés à la surface. Ça nous rappelle forcément le passé, mais ce n'est pas la même chose, c'est moins fort" puisque le bilan est moindre qu'il y a cinq ans, avec deux personnes blessées. "Mais on se dit qu'en sortant, il peut toujours nous arriver quelque chose" estime-t-elle.
"Ça fait mal"
"Le quartier a toujours des cicatrices. Revivre des choses comme ça, en plus en plein procès, ça fait mal" abonde Fred Rollat.
Ce père de famille a également eu une pensée pour sa fille Margo, scolarisée au collège Anne-Franck, non loin de là. Il a été averti qu'elle était confinée dans l'établissement par un message de la mairie de Paris.
"On nous a dit qu'il y avait un problème avec des gens avec un couteau, de rester dans la cour", raconte Margo. Sitôt le confinement levé, Fred est allé la chercher "pour la rassurer et me rassurer".
Sabrina vient, elle, d'aller chercher son fils de 2 ans à la crèche, avant de récupérer ses deux autres enfants de 9 et 4 ans, à l'école.
"C'est un soulagement. Je travaille à côté, j'ai entendu les sirènes, je me suis dit : 'il se passe quelque chose'. La vie continue, mais ce qui arrive n'est pas facile. L'attente (avant de pouvoir aller chercher ses enfants) n'a pas été facile non plus, mais j'ai été rassurée quand j'ai su qu'ils étaient en sécurité."
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"On n'a plus envie de vivre ici"
Pour Fred, l'attaque de 2015 a "soudé dans la douleur" les riverains. "Le quartier souffre mais se serre les coudes, s'entraide. On a tous fait la manif avec nos petites pancartes de soutien ‘Je suis Charlie’. Le fait d'avoir vécu des choses nous rapproche", développe-t-il.
D'autres ont envie de quitter le quartier, comme Céline, qui peste contre "une justice laxiste". "Ce qui vient de se passer est révoltant, navrant, triste. Bien sûr que ça réveille des choses, on s'en rappelle encore. On n'a plus envie de vivre ici, ni en France d'ailleurs" lance-t-elle.
Gilles et Say s'apprêtent, eux, à plier bagages pour de bon, après respectivement 25 et 40 ans de vie dans le quartier.
Ils venaient justement de faire l'état des lieux de sortie de l'appartement de Say quand, vers 11 h 50, boulevard Richard-Lenoir, ils ont vu "des flaques de sang, des flics qui couraient dans tous les sens, les pompiers".
"Ça m'a rappelé ce pauvre monsieur Merabet", le gardien de la paix tué boulevard Richard-Lenoir par les frères Kouachi après leur attaque contre Charlie Hebdo, dit Gilles.
"Beaucoup de gens sont partis du quartier après 2015 : à vol d'oiseau, on est à 50 mètres de Charlie Hebdo, et à 150 mètres du Bataclan. Pendant l'attaque (contre le Bataclan le 13 novembre 2015), j'ai entendu les rafales faire trembler les vitres. Nous, on se tire de Paris, car on ne s'est jamais remis des attentats."
Avec AFP