Des manifestants sont descendus, mercredi, dans les rues de plusieurs grandes villes américaines pour dénoncer un traitement judiciaire qu'ils considèrent trop clément à l'encontre des policiers qui ont tué, en mars, l'Afro-Américaine Breonna Taylor à Louisville.
Boston, New York, Washington, Philadelphie… Des rassemblements ont spontanément éclaté dans plusieurs villes des Etats-Unis, le 23 septembre. Le motif de leur colère : aucun des trois agents qui avaient fait irruption chez Breonna Taylor en enfonçant la porte de son domicile, à Louisville, en mars 2020, n'a été poursuivi pour son homicide.
Brett Hankison, unique membre du trio policier visé par une charge, est seulement poursuivi pour mise en danger de la vie d'autrui, en raison de ses tirs qui ont traversé l'appartement de voisins de la victime, a annoncé mercredi le procureur du Kentucky. Aucun chef d'inculpation n'a en revanche été retenu contre ses deux collègues, Jonathan Mattingly et Myles Cosgrove, qui sont pourtant les auteurs des tirs qui ont tué l'Afro-Américaine.
La décision est "scandaleuse et insultante", selon l'avocat de la famille de Breonna Taylor, Ben Crump. L'infirmière de 26 ans avait été tuée en pleine nuit à son domicile, le 13 mars, quand les trois policiers s'y étaient présentés, munis d'un mandat d'arrêt. À leur arrivée, son compagnon avait ouvert le feu avec une arme détenue légalement. Les agents avaient riposté et Breonna Taylor avait été atteinte de plusieurs balles.
Deux policiers blessés à Louisville
À Louisville, d'où était originaire Breonna Taylor, ce jugement a mis le feu aux poudres. Avant l'annonce de mercredi, la municipalité avait décrété l'état d'urgence. Un important dispositif policier était en place et plusieurs personnes ont été arrêtées dès l'après-midi.
Cela n'a pas empêché le rassemblement dans la journée de quelques centaines de personnes, certaines lourdement armées, sur Jefferson Square, une place du centre-ville, dans un climat tendu. Les manifestant ont finalement été dispersés par la police, peu avant l'heure du couvre-feu, instauré à 21h, heure locale. Mais des heurts ont opposé la police et les manifestants.
Deux policiers déployés vers 20h30 locales sur les lieux d'une des manifestations de cette ville du Kentucky "ont été blessés par balle. Ils sont en train d'être soignés à l'hôpital", a déclaré le chef par intérim de la police de Louisville, Robert Schrœder, lors d'une conférence de presse.
Leur état était stable et leur vie n'était a priori pas menacée, mais l'un d'eux a subi une intervention chirurgicale, a-t-il précisé, et un suspect a été interpellé. Le bureau du FBI à Louisville a indiqué mener l'enquête.
Donald Trump prie pour les agents blessés
Donald Trump a déclaré "prier pour les deux agents de police blessés" et s'être entretenu avec le gouverneur démocrate Andy Beshear, avec qui il s'est dit prêt à travailler.
Ce dernier a appelé, dans un message vidéo, les habitants à "rentrer chez eux". "Je sais que ces charges annoncées aujourd'hui ne satisferont pas tout le monde", a-t-il admis, avouant avoir eu "une discussion difficile" avec la famille de Breonna Taylor.
Selon les médias locaux, le policier Brett Hankison s'est présenté dans une prison de la région, puis a été remis en liberté après avoir payé une caution fixée à 15 000 dollars, une somme très basse comparée à d'autres cas similaires. Licencié par la police de Louisville en juin, il risque jusqu'à quinze ans de prison.
"Honte"
Selon l'avocat Ben Crump, il s'agit d'"un nouvel exemple d'absence de responsabilité pour le génocide des gens de couleur perpétré par des policiers".
"C'est ironique et typique que les seuls chefs d'inculpation de cette affaire concernent des coups de feu tirés dans l'appartement d'un voisin blanc", alors qu'une personne de couleur a été tuée, a-t-il ajouté.
De nombreux responsables démocrates ont dénoncé la décision de mercredi, à l'image du sénateur Bernie Sanders la qualifiant de "honte". L'adversaire de Donald Trump à la présidentielle, Joe Biden, a dit "comprendre la frustration", mais a dans le même temps appelé au calme : "La violence n'est jamais acceptable", a-t-il déclaré dans un communiqué.
Avec AFP