À l'approche des prochaines échéances électorales, Europe Écologie-Les Verts élabore peu à peu son projet politique. Lors des Journées d'été des écologistes, le parti a réaffirmé sa volonté de s'associer à d'autres formations politiques, y compris La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Une stratégie dont l’ambition est de rassembler le plus largement possible la gauche, en vue de l'élection présidentielle de 2022.
Lors des Journées d'été des écologistes, le parti Europe Écologie-Les Verts (EELV) a assumé son rapprochement avec d'autres formations politiques, à l'instar de La France insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon et de Génération.s, parti créé par l'ancien candidat socialiste à la présidentielle de 2017, Benoît Hamon.
Galvanisés par la "vague verte" des municipales, les écologistes se projettent sur les prochaines échéances électorales, dont la présidentielle de 2022. Progressivement, ils dessinent leur stratégie, avec l’ambition de prendre la tête d’une union de la gauche et d'"éviter un deuxième tour Marine Le Pen / Emmanuel Macron", selon Julien Bayou, secrétaire national d'EELV.
Pour élargir son électorat après ses victoires dans plusieurs grandes métropoles françaises, EELV élabore un "projet fédérateur bienveillant", a-t-il affirmé vendredi à la Cité fertile de Pantin (Seine-Saint-Denis), où se tenait l'université d'été.
"Travailler en commun avec les autres forces"
Pour que ce projet voie le jour, a souligné Julien Bayou, il faut "se dépasser" et apprendre à "travailler en commun avec les autres forces, comme nous le faisons" à Pantin, où la 36e rentrée des écologistes était coorganisée par six partis de la gauche écologiste. "Nous devons patiemment construire ce projet rassembleur et collectif pour convaincre et gagner", a-t-il encore déclaré.
Pendant trois jours, l'écologie a été le thème central des débats mais d'autres sujets plus sociétaux ont été abordés, comme les violences policières, la relocalisation de la production française ou encore le féminisme. Pour EELV, il s’agit de bâtir un "projet clair, cohérent, courageux" plutôt que de se focaliser sur les "étiquettes" et "alliances de partis", selon Julien Bayou, interrogé jeudi sur RTL.
C’est dans ce contexte que le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, invité samedi, est revenu sur ses déclarations qualifiant les écolos d’"ayatollahs verts" et sur les accusations de propos jugés sexistes auxquelles il fait face depuis sa nomination.
"J'ai dit que le mouvement #MeToo allait libérer la parole des femmes et que c'était positif. J'ai demandé que les femmes soient mieux accueillies par la police quand elles viennent porter plainte pour violences conjugales, j'ai même dit que les salauds devaient être condamnés", s'est défendu le garde des Sceaux. "En revanche, j'ai dit que la Toile ne pouvait pas être le réceptacle de ces plaintes", a-t-il ajouté.
Jean-Luc Mélenchon tend la main aux Verts
De jeudi à dimanche, les membres de La France insoumise (LFI) se sont eux aussi réunis lors de leur université d'été, à Châteauneuf-sur-Isère, dans la Drôme. Le maire EELV de Grenoble, Éric Piolle, s'y est rendu vendredi et a rencontré le chef de file de LFI, Jean-Luc Mélenchon. Cet échange confirme l'existence de liens proches entre le parti de Jean-Luc Mélenchon et l'édile, réélu en 2020 à la tête de la mairie de Grenoble avec le soutien des Insoumis.
"Sa présence ici a une signification qu'il n'est pas question de diminuer", a ainsi clamé Jean-Luc Mélenchon à propos d'Éric Piolle. "Nous ne sommes pas en train de négocier, créer je ne sais quel complot", a assuré le député Insoumis. "Mais dans le moment où nous nous trouvons, il faut aller à l'essentiel, certes discuter sur les désaccords mais aussi savourer ce sur quoi on est d'accord", a-t-il ajouté.
Merci @JLMelenchon pour l'accueil. Notre pays doit relever d'immenses défis. Identifions nos convergences, travaillons. Notre objectif est commun : gagner et changer la vie, pour la justice sociale et climatique. Notre adversaire est commun : Macron et la droite. pic.twitter.com/towAsu0rCz
— Éric Piolle (@EricPiolle) August 21, 2020Quand Éric Piolle a rappelé qu'un dialogue avec le Parti socialiste était prévu à Blois le week-end suivant, ces propos ont déclenché quelques rires moqueurs des Insoumis, preuve que le chemin vers une union complète de la gauche reste compliqué.
Si Jean-Luc Mélenchon dit souhaiter des listes communes aux élections départementales et régionales de 2021, il a laissé entendre que l'union serait plus compliquée en 2022 compte tenu de "divergences importantes sur l'État et l'Europe", notamment.
Depuis plusieurs semaines, le chef de file des Insoumis laissait par ailleurs planer le doute sur une éventuelle candidature à la présidentielle. Dimanche, Jean-Luc Mélenchon a affirmé qu'il prendrait "au mois d'octobre" sa décision de se présenter ou non à la présidentielle. Malgré les amabilités, il ne fait guère de doutes qu’EELV et LFI ambitionnent tous deux de prendre le leadership de la gauche en 2022.
Divergences internes
Pour fédérer la gauche, EELV doit aussi se montrer moins divisé. Éric Piolle et l'eurodéputé écologiste Yannick Jadot, jugé trop libéral par les Insoumis, ne cachent pas leurs ambitions pour une candidature écologiste à la présidentielle. Yannick Jadot a demandé que le candidat soit choisi "avant le mois de janvier" afin de "prendre le temps de rassembler très largement".
Mais cette vision ne fait pas l'unanimité au sein d'EELV, et en particulier du côté de Julien Bayou, qui souhaite d'abord se concentrer sur les sénatoriales de septembre, et sur les régionales et départementales prévues en mars 2021. À Pantin, Julien Bayou a assuré que ces deux derniers scrutins représentent "une étape décisive pour, après-demain, offrir une alternative heureuse au pays" en 2022.
"Pour être durable, la construction politique se fait sur le temps long" et "c'est pour ça que chaque étape électorale est importante et nous permettra d'ancrer un peu plus l'écologie dans les territoires et le paysage politique", a plaidé le numéro un d'EELV. Sur RTL, Julien Bayou avait par ailleurs déclaré jeudi que "le temps de la désignation [du candidat à la présidentielle] n'est pas venu".
Parmi les membres d'EELV en accord avec cette stratégie, Julien Bayou peut compter sur l'eurodéputée Karima Delli ou sur Éric Piolle. "Organiser la désignation de notre candidat [à la présidentielle] lors de la campagne des régionales et départementales, c’est une mauvaise chose. C’est presque un suicide pour nos candidats", estime ainsi le maire de Grenoble.
Samedi, les six partis écologistes ont appelé lors de l'université d'été à la création de "listes communes" et de "programmes communs" pour les régionales et les départementales. D'après Julien Bayou, les têtes de liste devraient être révélées en septembre et validées le mois suivant. Des étapes décisives pour un parti en pleine progression depuis les européennes de 2019.