Placée sous le signe du rêve et de la déambulation, la 8e édition de la Nuit blanche a donné à Paris des airs de romance et de fête. Jusqu'à l'aube dimanche, les badauds ont profité des œuvres contemporaines disséminées dans la capitale.
AFP - Une boule à facettes géante fait danser des ombres mi-festives, mi-inquiétantes dans le jardin du Luxembourg, un ivrogne envahit du sombre tourbillon de ses pensées une salle de dissection du XVIIIe siècle, des parapluies rouges fleurissent sur les pelouses des Buttes-Chaumont: la 8e édition de Nuit Blanche a investi Paris pour offrir une déambulation onirique.
Dans le Quartier Latin, le Marais et autour du parc des Buttes-Chaumont, ainsi que dans neuf villes de banlieue, les oeuvres de 30 artistes contemporains et une soixantaine de projets associés s'offrent aux passants.
Pour cette édition, à dimension "métropolitaine" à laquelle participent notamment Aubervilliers, Clichy-la-Garenne et Saint-Denis, la mairie de Paris a donné carte blanche à Alexia Fabre, conservateur en chef du MAC/VAL (musée d'art contemporain du Val de Marne), et Frank Lamy, chargé des expositions temporaires.
"Cette échelle spatiale et temporelle nous a beaucoup plu. On ne prend pas le public en tenailles comme dans un musée", s’enthousiasme Alexia Fabre.
L'an dernier, Nuit Blanche avait investi les gares parisiennes. Cette année, elle s’est installée notamment dans des lieux de spiritualité et de savoir -de Notre Dame à la Grande Mosquée et l’Ecole Normale supérieure-, créant des échos entre patrimoine et art contemporain.
"On peut tout oser au service de la beauté. Il faut oser l'éclectisme, les formes d'expression les plus diverses" a commenté le maire de Paris, Bertrand Delanoë, en contemplant "la maîtresse de la tour Eiffel", boule à facettes de 7,4 mètres de diamètre suspendue au-dessus du bassin du Luxembourg.
Une file d'attente vertigineuse s'allongeait déjà à 20h30 le long des grilles du parc.
Dans l’église Saint-Eustache, un écran placé au-dessus de l’autel diffuse l’oeuvre vidéo "Threshold of the Kingdom" du Britannique Mark Wallinger, qui montre des passagers dans le hall d’arrivée d’un aéroport. En fond sonore, le solennel Miserere d’Allegri, un des psaumes de la pénitence, fait naître l’idée d’une porte de l’au-delà ou d’une apparition divine.
Sur la façade de l’Hôtel de Ville, la vidéo "The Needle Woman in Paris" de la Coréenne Kimsooja allie également images du monde contemporain et réflexions universelles sur la solitude.
Dans le cour de l'Ecole Normale Supérieure, un public hésitant entre perplexité et sourires charmés écoute une performance sonore composée de multiples chants d'oiseaux.
"Les oeuvres que nous avons choisies ont différents degrés de lecture mais elles doivent être rapidement lisibles", insiste Alexia Fabre, la forme de la manifestation incitant au "zapping".
Afin de faciliter l’approche des oeuvres par des publics peu accoutumés aux galeries d’art contemporain, des médiateurs sont présents sur les lieux d’exposition temporaires.
Place Stalingrad, près d'un terrain de football fortement accidenté conçu par une artiste du Costa Rica, des médiateurs sportifs aident à organiser des matchs de football atypiques, par équipes de cinq joueurs.
Autour de l'Ile Saint-Louis et sur le pont Louis-Philippe, d’immenses yeux de femmes photographiés par l’artiste JR captent le regard des passants. Cette exposition est complétée par deux installations vidéo, que le public regarde assis par terre, dans une cabane provenant d’une favela de Rio.
Poétique avec les parapluies rouges et les disques d’or de l’artiste Noël Dolla figurant champs de coquelicots et tournesols, le parc des Buttes Chaumont prend une teinte surréaliste sous l’influence du Norvégien Rune Guneriussen, qui y a installé un parterre de lampes de bureau.
Les noctambules les plus endurants poursuivront leurs déambulations jusqu’à 07H00 dimanche.
Le concept ayant essaimé à travers la France, Charleville-Mézières organisait également sa Nuit Blanche samedi, après Metz vendredi et avant Amiens le 17 octobre.