L'ancien président égyptien Hosni Moubarak mort mardi, à l'âge de 91 ans, à l'hôpital militaire du Caire, sera inhumé mercredi. Retour en images sur le règne de celui qui dirigea l'Égypte d'une main de fer de 1981 à 2011, avant d'être contraint de quitter le pouvoir après 18 jours d'une révolte sans précédent contre son régime.
L'ancien président égyptien Hosni Moubarak, âgé de 91 ans, s'est éteint, mardi 25 février, à l'hôpital militaire Galaa, au Caire. Ses obsèques se tiendront mercredi à la grande mosquée, à l'est du Caire.
Au pouvoir de 1981 à 2011, l'ancien raïs qui jouissait d'une réputation de "modéré" au sein du monde arabe, sera chassé du pouvoir à la faveur de la "révolution du Nil", avant d'être traduit en justice, puis emprisonné et finalement acquitté en 2017.
Né le 4 mai 1928, dans la région du Delta du Nil, et issu d'un milieu modeste, Hosni Moubarak envisageait dès son plus jeune âge de consacrer sa vie à l'armée. Diplômé de l'Académie de l'armée de l'air en 1950, il est envoyé en Union soviétique pour divers stages de formation, puis nommé à des postes de commandement.
En 1972, il est nommé commandant des Forces aériennes égyptiennes et joue un rôle actif pendant la guerre du Kippour contre Israël. Considéré comme un héros de guerre, il est promu général, puis parachuté par le président Anouar al-Sadate à la vice-présidence de la République en 1975. Quelques jours après l'assassinat de Sadate par des islamistes lors d'une cérémonie militaire au Caire, le 6 octobre 1981, Hosni Moubarak, qui a échappé à la fusillade ce jour-là, est élu à la présidence à l'unanimité par l'Assemblée du peuple. À 53 ans, il commence un long règne au sommet de l'État.
Réélu à la tête du pays en 1987, 1993 et 1999, selon le même procédé constitutionnel, Hosni Moubarak remportera ensuite, en 2005, la première élection présidentielle directe jamais organisée dans le pays. Visé par au moins six tentatives d'assassinat, notamment par le groupe armé islamiste Jamaa Islamiya, le raïs resserre la vis sécuritaire à plusieurs reprises durant ses différents mandats. Tout au long de son règne, la question des fraudes électorales, des violations des droits de l'Homme et la liberté d'action dévolue aux forces de sécurité, sur lesquelles il s'appuie pour asseoir son pouvoir, seront fréquemment pointées du doigt. Au cœur des critiques : la loi sur l'état d'urgence, instaurée après l'assassinat de Sadate, et qui donne des pouvoirs élargis à la police en matière d'arrestation et de détention, et permet le renvoi devant des tribunaux d'exception. Elle ne sera levée qu'en mai 2012 par l'armée.
Pendant trois décennies au pouvoir, le président égyptien s'est surtout attaché à donner à son pays un rôle clé sur la scène internationale. Même si, sur le plan régional, l'Égypte ne retrouvera qu'en mai 1989 sa place au sein de la Ligue arabe, qu'elle avait perdue en 1979 pour avoir signé la paix avec Israël. L’Égypte, puissance sunnite et modérée, constitue toutefois un pôle particulièrement stratégique et permet à Hosni Moubarak de jouer les médiateurs dans le conflit israélo-palestinien.
Hosni Moubarak fera également de son pays, pivot entre l’Afrique et le Proche-Orient, un intermédiaire essentiel dans la résolution des crises continentales et régionales.
Mais c'est surtout sur les États-Unis, alors principal allié stratégique et économique de l'Égypte et de son armée, que le président égyptien s'appuiera pour entretenir son influence internationale. C'est dans ce sens que Hosni Moubarak (ici en 2010 avec le président Barack Obama) se rangera du côté de Washington contre le dictateur irakien Saddam Hussein lors de la première guerre du Golfe (1990-1991).
Reçu en grandes pompes et écouté par les dirigeants des principales puissances mondiales, Hosni Moubarak s'impose comme un allié des Occidentaux, devant lesquels il se présente comme un garant de la stabilité régionale et un rempart contre le terrorisme et l'islamisme. Il sera reçu à plusieurs reprises en France, notamment par le président Jacques Chirac, avec lequel il tisse des liens personnels et amicaux.
Toutefois, à l'intérieur du pays, le pouvoir du raïs, qui est au centre d'un culte de la personnalité organisé par le pouvoir, est contesté. En 2005, face au mécontentement grandissant de la population et aux critiques l'accusant d'avoir verrouillé la vie politique égyptienne, Hosni Moubarak fait modifier la Constitution pour permettre la tenue d’élections multipartites. Un "pluralisme" qui n'empêche pas Hosni Moubarak d'être réélu avec plus de 88 % des voix.
Au début des années 2010, alors que la colère monte en raison des inégalités sociales et des scandales de corruption, paradoxalement, le verdict des urnes ne laisse transparaître aucun signe de mécontentement. Les législatives organisées entre fin novembre et début décembre 2010, offrent au contraire au pouvoir une victoire écrasante. Une victoire au prix d'accusations de fraude émanant de l'influente confrérie des Frères musulmans, officiellement interdite mais tolérée dans les faits par Hosni Moubarak, et de critiques internationales. Le 25 janvier 2011 débutent des manifestations massives contre son pouvoir. Le 1er février, plus d'un million de manifestants défilent contre les violences policières et la corruption du "système Moubarak". Une marée humaine envahit la place Tahrir, au Caire, épicentre de la contestation.
Alors que les Égyptiens réclament le départ du raïs, qui est également soupçonné de vouloir transmettre le pouvoir à son fils Gamal, Hosni Moubarak tente de reprendre la main. Alors qu’une élection présidentielle est prévue en septembre 2011, il annonce dans un discours télévisé, le 1er février, qu'il ne briguera pas de nouveau mandat, tout en promettant des réformes. "Dégage", répondent les manifestants. Lâché tour à tour par Washington, puis par l'armée égyptienne, Hosni Moubarak est contraint de quitter le pouvoir après 18 jours d’une mobilisation sans précédent dans l'histoire de la République arabe d'Égypte. Le 11 février, la télévision d'État égyptienne interrompt ses programmes pour annoncer la démission du chef de l'État et la remise de ses pouvoirs au Conseil suprême des forces armées.
Deux mois après sa chute, Hosni Moubarak et ses deux fils, Alaa et Gamal, sont placés en détention par la justice égyptienne dans le cadre d'une enquête sur l'usage de la violence contre les manifestants pendant le soulèvement de janvier et février. La répression du mouvement a fait au moins 850 morts. L'ancien homme fort de l'Égypte sera ensuite traduit en justice, puis condamné, au terme d'un long feuilleton judiciaire, à la perpétuité pour complicité et conspiration en vue de tuer des manifestants.
Au total, il restera emprisonné six ans, avant d'être remis en liberté à la faveur du retour au pouvoir de l'armée, dirigée par l'actuel président, Abdel Fattah al-Sissi, lorsque les dernières charges sont abandonnées contre lui en mars 2017. Ironie de l'histoire, sa dernière apparition publique a eu lieu en décembre 2018, lors d'un procès contre Mohamed Morsi, l'ancien chef de l'État issu des Frères musulmans, emprisonné depuis son renversement en 2013.