Trois mois après le début du soulèvement populaire contre la classe dirigeante, accusée de corruption et d'incompétence, le Liban a connu samedi des heurts d'une violence inédite. Saad Hariri a exhorté dimanche à la formation rapide d'un nouveau gouvernement.
C'est une violence rare. Alors que le Liban entre dans son quatrième mois de contestation populaire, près de 400 personnes ont été blessées, samedi 18 janvier, à Beyrouth où de nouvelles manifestation sont de nouveau attendues.
Depuis la démission, fin octobre, du Premier ministre Saad Hariri, son successeur Hassan Diab, nommé le 19 décembre, n'a toujours pas formé d'équipe gouvernementale. Fasse à la dégradation de la situation économique et la véritable impasse politique, la colère semble désormais être montée d'un cran.
Une tension qui a d'ailleurs poussé l'ancien chef du gouverment à s'exprimer, dimanche, sur les réseaux sociaux. "Il y a une feuille de route pour calmer la colère populaire, a tweeté Saad Hariri. Arretez de perdre du temps, formez un gouvernement, ouvrez la porte aux solutions politiques et économiques".
خفنا على #بيروت البارحة لكنها لملمت كعادتها جراح ابنائها من قوى الأمن والمتظاهرين ومسحت عن وجهها آثار الغضب والشغب ودخان الحرائق. نسأل الله ان يمن على كل المصابين بالشفاء والسلامة وأن يجنب بلدنا خطر الوقوع في الفتن. ١/٣
— Saad Hariri (@saadhariri) January 19, 2020Saad Hariri, à la tête de trois gouvernements depuis 2009, a été chassé par la rue le 29 octobre dernier, soit 13 jours après le début des manifestations.
Pour Zeina Antonios, correspondante de France 24 au Liban, cette situation s'explique par le fonctionnement des institutions. "Si on regarde l’histoire du pays, on a toujours eu du mal à former des gouvernements ou élire des présidents, explique-t-elle. Cela pour une raison très simple : il faut prendre en compte les desiderata des uns et des autres notamment en matière d’équilibre confessionnel".
Si Hassan Diab peine a former son gouvernement, c'est pour satisfaire tous les acteurs politiques. "Il a buté dernièrement sur les demandes des partis politiques concernant les représentations des confessions et de l’équilibre, précise Zeina Antonios. On butait sur trois portefeuilles il y a quelques jours : la Défense, les Affaires étrangères et l’Économie. La fusion de certains ministères a également retardé la formation du gouvernement. Certains ne le veulent pas. C’est donc le partage du gâteau politique et qui renforce la colère des manifestants. Ils dénonçaient tout cela dès le départ".
Depuis octobre, le mouvement de contestation dénonce pèle-mêle une classe politique jugée corrompue et incompétente, mais aussi des conditions de vie difficile et des services publics en déliquescence.
La Banque mondiale a averti que le taux de pauvreté pourrait atteindre 50 % de la population, contre le tiers actuellement, et la frustration est de plus en plus forte face à l'absence de réponse des autorités.