
Au Guatemala, la sociale-démocrate Sandra Torres et le conservateur Alejandro Giammattei s'affrontent dimanche pour la succession du président sortant, Jimmy Morales. Plus de 8 millions d'électeurs sont appelés aux urnes.
C’est au compte-gouttes que les électeurs guatémaltèques ont commencé à se présenter, dimanche 11 août, dans les bureaux de vote pour élire le prochain président du Guatemala.
Plus de huit millions d'électeurs sont appelés aux urnes. Ils doivent départager la sociale-démocrate Sandra Torres et le conservateur Alejandro Giammattei pour succéder en janvier 2020 au président Jimmy Morales, dont le mandat a été entaché de scandales.
À Sumpango, petite ville située à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de la capitale, et dont la majeure partie de la population est maya, les quatre responsables d'un des bureaux de vote ont fait une rapide prière au début du second tour de l'élection, à 7 h. Ce n’est pourtant qu’une bonne heure plus tard qu’ils ont vu arriver la première électrice de la journée, vêtue d’un costume traditionnel, comme la plupart des femmes de la localité.
"Un président pour de vrai"
Bien qu’ils soient désabusés, les électeurs ont toujours l'espoir que le prochain chef de l'État aura enfin à cœur de lutter contre les trois principales plaies de leur pays : la corruption, la violence criminelle et la misère.
"Nous voulons un président pour de vrai... Qu'il tienne ses promesses", a déclaré Marta Lidia Subuyuj, une paysanne âgée de 43 ans.
L'affluence a été tardive, certes, mais la participation au scrutin devrait être d'environ 70 %, selon un dernier sondage publié jeudi par le quotidien Prensa Libre. Ce même sondage donnait au médecin de droite, Alejandro Giammattei, une large avance dans les intentions de vote.
De manière générale, l'enthousiasme n'était pas au rendez-vous pour les électeurs. Il est vrai que les deux finalistes sont des vieux routiers de la politique du Guatemala et sont loin de pouvoir combler les aspirations au changement.
Sandra Torres en est à sa troisième tentative et Alejandro Giammattei brigue pour la quatrième fois un mandat présidentiel.
"La seule chose que j'espère, c'est que le président ou la présidente, en s'asseyant (dans le fauteuil du chef de l'État), n'oubliera pas les gens : quand (les politiques) sont en campagne, ils viennent vers nous, et après ils nous oublient", s'indigne Maria Raxon, une mère de famille âgée de 30 ans.
Déçus de Jimmy Morales
Les Guatémaltèques ont aussi été échaudés par le président, Jimmy Morales. En élisant cet humoriste de la télévision sans aucune expérience politique en 2015, ils pensaient renouveler la classe politique. Résultat des courses : il finit son unique mandat de quatre ans sous le coup d'une enquête pour financement illégal de campagne électorale.
"Je n'ai pas confiance dans les politiques, car il y a quatre ans les gens ont voulu quelque chose de différent avec Jimmy Morales et ça a été pire", se désole Kimberly Sal, une institutrice de 19 ans, après être allée, malgré tout, glisser son bulletin dans l'urne.
Pacte migratoire humiliant
La corruption qui gangrène le Guatemala et le pacte migratoire humiliant imposé par le président américain Donald Trump ont dominé la campagne électorale en vue du second tour.
Chacun des deux candidats assure qu'il luttera contre la corruption, mais cette volonté affirmée se heurte cependant au scepticisme de leurs opposants et des analystes, d'autant que Sandra Torres et Alejandro Giammattei ont annoncé vouloir se passer de l'aide de la CICIG, la mission anticorruption de l'ONU, déclarée indésirable pour avoir mis en accusation le président sortant.
À la préoccupation lancinante du combat contre la corruption est récemment venue s'ajouter l'humiliation d'un pacte migratoire arraché par Donald Trump.
Malgré le tollé soulevé au Guatemala par cet accord aux termes flous et conclu dans l'opacité, les deux candidats se sont montrés jusqu'ici d'une grande prudence dans leurs commentaires et quant à leurs intentions.
Selon la Maison Blanche, cet État est dorénavant considéré comme un "pays tiers sûr" auprès duquel les demandeurs d'asile devront effectuer leurs premières démarches.
Pour nombre de responsables d'ONG, le Guatemala ne peut recevoir les migrants en route pour les États-Unis alors qu'il n'arrive même pas à subvenir aux besoins de sa propre population. En effet, au Guatemala, 60 % des 17,7 millions d'habitants vivent sous le seuil de pauvreté.
Ce pays du "triangle nord" de l'Amérique centrale fournit lui-même, avec le Honduras et le Salvador voisins, un des plus gros contingents de candidats au "rêve américain", qui se jettent sur les routes pour fuir la misère et la violence des gangs.
"Comme il n'y a pas de travail au Guatemala, beaucoup de gens veulent partir (aux États-Unis), et c'est parfois désespérant et triste de voir ce qui se passe, de voir nos frères guatémaltèques mourir ou être assassinés parce qu'ils cherchent une vie meilleure afin d'aider leur famille", se lamente Emilio Canel, un paysan de 26 ans.
Avec AFP