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Un navire iranien soupçonné de livrer du pétrole à la Syrie, en violation des sanctions contre Damas, a été arraisonné jeudi au large de Gibraltar. Une "excellente nouvelle", selon Washington. L'Iran dénonce un "acte de piraterie".

Un navire iranien soupçonné de livrer du pétrole à la Syrie, en violation des sanctions contre Damas, a été arraisonné jeudi 4 juillet au large du territoire britannique de Gibraltar, entraînant la convocation de l'ambassadeur britannique à Téhéran. Son immobilisation pourrait être prolongée de quatorze jours, la Cour suprême de Gibraltar ayant donné son feu vert vendredi à une telle action.

L'Iran a réagi, vendredi, en demandant à Londres la "libération immédiate" du pétrolier. Téhéran a jugé "inacceptable" l'interception de son pétrolier, accusant le Royaume-Uni d'avoir agi "à la demande des États-Unis".

"Insistant sur le fait que le pétrolier croisait dans les eaux internationales", les Affaires étrangères iraniennes ont dénoncé un acte de "piraterie". "Si la Grande-Bretagne ne relâche pas le pétrolier iranien, il est du devoir des autorités responsables d'agir réciproquement et d'intercepter et de saisir un pétrolier britannique", a averti le Gardien de la Révolution Mohsen Rezaï, secrétaire du Conseil de discernement, un poste clé du système politique iranien.

"Excellente nouvelle"

L'arraisonnement du pétrolier est une "excellente nouvelle", a commenté pour sa part le conseiller américain à la sécurité nationale, John Bolton sur Twitter, sans confirmer que les États-Unis avaient demandé l'interception de ce navire.

Selon le ministre espagnol des Affaires étrangères, Josep Borrell, l'opération aurait eu lieu suite à une "demande adressée par les États-Unis au Royaume-Uni".

L'opération intervient quelques jours après l'annonce du dépassement par Téhéran de la limite imposée à ses réserves d'uranium faiblement enrichi, sur fond de tensions exacerbées avec Washington qui font craindre un embrasement dans la région du Golfe.

En réaction à l'interception de ce navire baptisé Grace 1 et battant pavillon panaméen, Téhéran a convoqué l'ambassadeur du Royaume-Uni en Iran pour dénoncer "l'interception illégale d'un pétrolier iranien", selon un porte-parole des Affaires étrangères iraniennes.

Gibraltar n'a pas précisé l'origine du pétrole mais selon la publication spécialisée dans le transport maritime Lloyd's List, ce pétrolier aurait chargé en Iran au courant du mois d'avril avant de faire le tour de l'Afrique et de rentrer en Méditerranée où il a été intercepté jeudi alors qu'il faisait route vers la Syrie, selon Gibraltar.

Équipage interrogé

"Nous avons des raisons de croire que le Grace 1 amenait sa cargaison de pétrole brut à la raffinerie de Banias en Syrie (...) propriété d'une entité sujette aux sanctions de l'Union européenne contre la Syrie" et agissait "en violation" de ces sanctions, a indiqué le chef du gouvernement de Gibraltar, Fabian Picardo, dans un communiqué.

Damas est la cible depuis le début du conflit en 2011 de sanctions internationales, qui touchent notamment son secteur pétrolier.

En novembre, le Trésor américain a menacé de sanctions les personnes ou sociétés livrant des produits pétroliers au gouvernement syrien. Le Premier ministre syrien Emad Khamis a indiqué que les livraisons de pétroliers iraniens s'était arrêtées depuis. Selon Damas, le secteur des hydrocarbures syrien a subi depuis 2011 des pertes estimées à 74 milliards de dollars.

Jeudi après-midi, l'équipage du navire, stationné à l'est de Gibraltar, était interrogé par les autorités du territoire britannique situé à l'extrême sud de l'Espagne. La police et les douanes de Gibraltar, assistées d'un détachement de Royal Marines britanniques, ont arraisonné le pétrolier tôt jeudi à environ quatre kilomètres au sud du "Rocher".

Sanctions européennes à l'encontre de la Syrie

L'opération a eu lieu alors que le pétrolier ralentissait dans une zone utilisée par les navires pour se faire ravitailler notamment en nourriture et considérée par Gibraltar comme faisant partie des eaux territoriales britanniques. Ce qui est contesté par l'Espagne, qui revendique la souveraineté sur ce territoire.

"Nous étions naturellement au courant de cette opération" mais "nous sommes en train de regarder de quelle manière cela touche à notre souveraineté", a souligné Josep Borrell devant la presse.

Dans un communiqué, le ministère britannique des Affaires étrangères a "salué cette action ferme des autorités de Gibraltar qui ont agi pour faire respecter le régime européen de sanctions à l'encontre de la Syrie".

Fabian Picardo a indiqué avoir "écrit aux présidents de la Commission et du Conseil européens, pour leur communiquer les sanctions prises" par Gibraltar à l'encontre du navire. Mais contactée par l'AFP, la Commission européenne s'est refusée à tout commentaire.

Avant d'être arraisonné à Gibraltar, le Grace 1, qui avait quitté les Émirats le 13 mai, a fait le tour de l'Afrique depuis le Golfe au lieu d'emprunter le canal de Suez, selon Marine Traffic.

Avec AFP