Abassi Madani, chef historique du Front islamique du Salut (FIS) algérien, parti islamiste dissous en 1992, a été enterré samedi à Alger, où des milliers de partisans sont venus lui rendre hommage.
Décédé mercredi 24 avril en exil, Abassi Madani a été enterré samedi 27 avril en Algérie. Des milliers de personnes sont venues saluer la mémoire du chef historique du Front islamique du Salut (FIS) algérien, parti islamiste dissous en 1992.
Cette année-là, il avait appelé à la lutte armée, après l'interruption par l'armée du processus électoral, face à la victoire annoncée du FIS aux premières législatives multipartites du pays qui avait ensuite sombré dans une décennie de guerre civile.
La dépouille du chef islamiste est arrivée samedi dans l'après-midi à l'aéroport d'Alger, puis emmenée dans la maison familiale dans le quartier de Belcourt, dans le centre de la capitale, où étaient rassemblés des milliers de partisans, selon des journalistes de l'AFP.
Certains d'entre eux ont porté sur leurs épaules le cercueil à la mosquée Ennadi où les fidèles ont fait "la prière du mort", avant de l'emmener au cimetière de Sidi M'hamed, non loin.
En marchant vers le cimetière, les partisans de Madani ont scandé "Allah Akbar" et "Il n'y a de dieu que Dieu, et Mohamed est son prophète, c'est pour le Front que nous vivons, pour lui que nous mourrons et que nous atteindrons Dieu", un slogan du FIS dans les années 1990. Certains ont brandi des portraits de lui.
L'un de ses compagnons de route, Ali Belhadj, qui avait été emprisonné avec Madani au début des années 1990, a indiqué sur sa page Facebook avoir été "empêché d'assister aux funérailles", sans donner davantage de précisions.
Un personnage controversé
Son décès a ravivé le débat sur sa personne sur les réseaux sociaux, des internautes le qualifiant de "criminel".
Abassi Madani avait quitté l'Algérie en 2003 après avoir été libéré de prison où il avait purgé une peine de douze ans pour atteinte à la sûreté de l'État. Il avait été aussi interdit de toute activité politique.
Madani et quelques autres avaient fait sortir l'islam politique de la clandestinité à la faveur des réformes – dont le multipartisme – lancées après les émeutes d'octobre 1988, en créant en 1989 le FIS. L'objectif du parti était d'instaurer un État théocratique dans le pays.
Pour de nombreux Algériens, les noms d'Abassi Madani et du FIS resteront tragiquement associés à la "décennie noire" dans laquelle l'Algérie a plongé au début des années 1990.
Après la large victoire en juin 1990 du FIS aux élections locales– premier scrutin pluraliste de l'histoire de l'Algérie – Madani s'est comporté en successeur virtuel du président Chadli Bendjedid, en fin de mandat.
Arrêté en juin 1991, c'est depuis sa cellule, qu'il a assisté à la fin de cette même année à la victoire du FIS au premier tour des législatives, puis à l'annulation du second tour et à la dissolution de son parti début 1992.
Cette dissolution du FIS a interrompu le processus démocratique et le pays a alors basculé dans la guerre civile : groupes islamistes armés contre forces de sécurité.
Mais les civils figureront en nombre parmi les 200 000 morts officiels du conflit, victimes notamment des attentats ou des massacres attribués aux maquis islamistes.
La mort de Madani survient plus de trois semaines après la démission du président Abdelaziz Bouteflika, porté au pouvoir par l'armée en 1999 et qui s'était employé à rétablir la paix, via des lois d'amnistie.
Le pays est en proie depuis le 22 février à des manifestations populaires, inédites depuis vingt ans. Elles réclamaient dans un premier temps le départ d'Abdelaziz Bouteflika et veulent désormais la fin du "système".
Avec AFP