La Cour constitutionnelle thaïlandaise a dissous le Thai Raksa Chart, parti d'opposition sous lequel la sœur du roi souhaitait se présenter au poste de Premier ministre. Un acte considéré comme "hostile envers la monarchie constitutionnelle".
Un important parti d'opposition de Thaïlande, qui avait osé intégrer sur ses listes la sœur du roi, a été dissout, jeudi 7 mars, par la Cour constitutionnelle à deux semaines des législatives que la junte au pouvoir espère remporter.
"La nomination par le parti Thai Raksa Chart de la princesse Ubolratana comme candidate au poste de Première ministre a été faite avec l'intention de saper le système politique thaïlandais", a annoncé la Cour lors d'un jugement lu en direct à la télévision, ordonnant la "dissolution" du parti.
Le fait de proposer la princesse Ubolratana comme candidate était un acte "hostile envers la monarchie constitutionnelle", et les responsables du parti le savaient, a jugé la Cour, à l'unanimité. "Faire entrer des membres de la famille royale en politique fait perdre sa neutralité" au palais, a argumenté la Cour, devant laquelle un important dispositif policier a été mis en place de crainte d'une mobilisation de l'opposition.
"Coups d'État judiciaires"
Ubolratana Rajakanya, 67 ans, avait annoncé le 8 février sa volonté de concourir au poste de chef du gouvernement civil qui doit être formé à l'issue des élections législatives du 24 mars. De fait, en cas d'élection, Ubolratana serait entrée dans l'Histoire comme la première princesse à diriger le gouvernement civil.
Mais sa candidature n'aura tenu qu'une journée : quelques heures après cette annonce qui avait pris tout le monde de cours, le roi avait torpillé les ambitions de sa soeur, qualifiant cette candidature de "hautement inappropriée". Sous la pression du palais royale, le Thai Raksa Chart avait alors fait machine arrière.
Le Thai Raksa Chart a été récemment créé par des proches de l'ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, bête noire des militaires au pouvoir depuis 2014, afin de soutenir lors des prochaines élections le Pheu Thai, principal parti du milliardaire aujourd'hui en exil.
Cette dissolution, si près des législatives du 24 mars, constitue un coup dur pour cette mouvance politique, qui remporte toutes les élections nationales depuis près de 20 ans, quelle que soit l'étiquette sous laquelle elle est contrainte de se reformer. Ce n'est pas la première fois que la Cour constitutionnelle dissout un parti des Shinawatra, habitués à ce que les analystes décrivent comme des "coups d'État judiciaires".
Le pouvoir judiciaire en Thaïlande est en effet traditionnellement proche des conservateurs ultra-royalistes "jaunes", opposés aux "rouges" soutenant Thaksin Shinawatra, considéré comme un dangereux réformateur et une menace pour la royauté par les "jaunes".
Sa dissolution étant actée, les candidats du parti Thai Raksa Chart, parmi lesquels des figures du clan Shinawatra comme l'ex-ministre Chaturon Chaisang, sont dans l'incapacité de se présenter au scrutin.
Le chef de la junte au pouvoir depuis le coup d'État de 2014
"Les responsables du Thai Raksa Chart ne peuvent pas créer de parti politique pendant dix ans", a ajouté la Cour suprême.
Le chef de la junte, au pouvoir depuis le coup d'État de 2014 contre le dernier gouvernement Shinawatra élu, le général Prayut Chan-O-Cha, espère bien conserver le pouvoir à l'issue du scrutin.
"Aujourd'hui, j'aimerais continuer à oeuvrer pour la Thaïlande", a écrit de son côté la princesse Ubolratana, portant une veste rouge, dans un message sur Instagram, posté depuis l'Allemagne, où vit son frère le roi. Elle y promeut le nord-est du royaume, moins connu du tourisme de masse et fief des Shinawatra.
Avec AFP