Le gouvernement nigérien va débloquer 3 millions d'euros pour dédommager des enfants victimes d'une eau polluée au fluor. Le scandale avait été révélé en 2000 par une ONG, alarmée par les nombreux cas de malformations graves.
Vingt-ans après le "scandale de Tibiri", le Niger va finalement procéder à l'indemnisation des victimes. En 2015, l'État nigérien avait été condamné à indemniser à hauteur de 3 millions d'euros des centaines d'enfants de la ville de Tibiri (centre-sud nigérien) victimes de malformations graves après avoir bu de l'eau à forte teneur en fluor, a annoncé le ministre des Finances, dimanche 21 octobre.
En 2001, le Centre de santé de Tibiri avait dénombré 4 918 garçons et filles atteints par diverses malformations provoquées par un taux excessif de fluor dans l'eau distribuée entre 1985 et 2000 par la Société nigérienne des eaux (SNE-publique).
"Nous allons payer. Il n'y a pas de raison que la justice tranche et que le gouvernement ne s'y plie pas", a déclaré à la télévision publique, Hassoumi Massoudou, le ministre nigérien des Finances. "Il n'y a pas de problème de ressources pour payer (indemniser) ces jeunes gens" et des "dispositions seront prises pour que la décision de justice soit appliquée", a souligné le ministre qui s'exprimait au Parlement.
Le gouvernement va "débloquer 2 milliards FCFA (3 millions d'euros)" pour "dédommagement des enfants de Tibiri victimes il y a 20 ans d'une eau polluée", conformément à une décision de justice rendue "il y a trois ans". Hassoumi Massoudou n'a cependant pas donné de délais pour le versement des indemnisations.
"Jambes et dos arqués"
Le scandale "des enfants de Tibiri" avait été révélé en 2000 par l'Association nigérienne de défense des droits de l'Homme (ANDDH) après avoir été alertée par des médecins inquiets de la multiplication de cas de malformations graves chez les enfants âgés de 15 mois à 15 ans : jambes et dos arqués, têtes volumineuses, os fragilisés, dents rougeâtres et friables.
Une autre enquête de 2002, diligentée par la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH), avait confirmé "une teneur en fluorures supérieure à 3mg/litre et grimpant parfois à 6,4 mg/litre", donc " largement supérieure à la norme de 1,5 mg/litre de l'OMS. La FIDH avait accusé les responsables de la SNE d'avoir "caché cet empoisonnement aux populations".
Le drame de Tibiri s'est estompé en 2001 après la mise en service d'un nouveau forage par le groupe français Vivendi qui a racheté la SNE. Mais depuis 2016, les autorités de la région de Maradi, où se trouve Tibiri, s'inquiètent de la "prolifération anarchique" de forages privés, où des habitants déshérités se ravitaillent souvent gratuitement en eau.
"À Maradi, la teneur du fluor dépasse les normes", ont mis en garde les responsables locaux de l'hydraulique. De nombreux forages suspects, creusés par le gouvernement et des ONG ont déjà été fermés après des analyses, ont-ils affirmé.
Avec AFP