L'Arabie saoudite a annoncé qu'elle avait décidé d'expulser l'ambassadeur du Canada et de geler toute relation commerciale, après des critiques répétées d'Ottawa sur la répression des militants de droits de l'Homme.
L’Arabie Saoudite ne veut pas d’intrusion canadienne dans ses affaires domestiques. Elle l’a fait comprendre, lundi 6 août, en décidant d'expulser l'ambassadeur du Canada en poste à Riyad et de suspendre tout nouvel échange commercial avec Ottawa.
Cette mesure a été prise après un appel de l'ambassade du Canada à la libération immédiate de militants des droits de l'Homme emprisonnés dans le royaume wahhabite. Dans un communiqué, le ministère saoudien des Affaires étrangères réaffirme l'engagement de Riyad à s'abstenir d'intervenir dans les affaires domestiques d'autres pays, dont le Canada, et en retour ne veut pas d'ingérence étrangère dans ses affaires internes et ses relations avec ses citoyens.
"Tout autre pas du Canada dans cette direction sera considéré comme une reconnaissance de notre droit à interférer dans les affaires domestiques canadiennes", dit le document.
Le royaume saoudien a ainsi donné vingt-quatre heures au diplomate canadien pour quitter le pays et rappelle son ambassadeur au Canada "pour consultations", dans un soudain durcissement des relations entre ces deux pays.
Le Canada "sérieusement inquiet"
Le Canada n'a pas tardé à réagir à l'expulsion de son ambassadeur à Riyad. "Nous sommes sérieusement inquiets de ces informations de presse et nous cherchons à en savoir plus sur la récente déclaration du royaume d'Arabie saoudite", a ainsi affirmé Marie-Pier Baril, porte-parole du ministère canadien des Affaires étrangères, dans un communiqué.
"Le Canada défendra toujours la protection des droits humains, notamment des droits des femmes et de la liberté d'expression partout dans le monde", a-t-elle ajouté. "Notre gouvernement n'hésitera jamais à promouvoir ces valeurs et nous croyons que ce dialogue est crucial pour la diplomatie internationale".
L'ambassade canadienne s'était, auparavant, dite "gravement préoccupée" par la nouvelle vague d'arrestations de militants des droits de l'Homme dans le royaume. "Nous appelons les autorités saoudiennes à les libérer immédiatement ainsi que tous les autres activistes pacifiques des #droitsdel'Homme", avait déclaré l'ambassade vendredi sur Twitter.
Le 2 août 2018, la cheffe de la diplomatie canadienne, Chrystia Freeland, s'était déjà dite "très alarmée d'apprendre l'emprisonnement de Samar Badawi", une militante de l'égalité entre hommes et femmes, arrêtée la semaine dernière avec sa collègue Nassima al-Sadah. Samar Badawi est la récipiendaire du Prix international du courage féminin 2012 décerné par le département d'État américain. Elle a fait campagne pour la libération de son frère, Raif Badawi un blogueur dissident, et de Walid Abou al-Khair, son ancien mari.
Citoyen saoudien, Raif Badawi est emprisonné depuis 2012 en raison de propos tenus sur son blog. Il a été condamné en novembre 2014 à dix ans de prison et à 1 000 coups de fouet pour "insulte à l'islam". Son épouse Ensaf Haidar, est installée au Québec depuis l'automne 2013 avec ses trois enfants.
Les arrestations de Samar Badawi et de sa collègue sont intervenues quelques semaines après celles d'une dizaine de militantes des droits des femmes, accusées de porter atteinte à la sécurité nationale et de collaborer avec les ennemis de l'État. Certaines ont été relâchées depuis.
Avec AFP et Reuters