L'ex-agent russe du KGB Sergueï Skripal a été exposé, début mars, à un poison de la famille Novichok, jugé plus dangereux que le sarin. Il s'agirait du premier cas d'empoisonnement à l'aide de cet agent innervant développé par l’Union soviétique.
C’est un poison tout droit sorti de la guerre froide qui a été administré à l'ex-agent double Sergueï Skripal et à sa fille, le 4 mars 2018, dans le sud de l'Angleterre. La Première ministre britannique Theresa May a affirmé, lundi 12 mars, qu’il s’agissait d’un agent chimique innervant de la famille Novichok.
Ce poison, qui signifie “nouveau venu” en russe, a été développé dans les années 1970 par l’Union soviétique. Malgré sa relative ancienneté, “aucun cas d’empoisonnement au Novichok n’a été répertorié jusqu’à présent”, assure Gary Stephens, pharmacologiste à l’université de Reading, contacté par France 24.
Il s’est fait beaucoup plus discret que deux agents innervant s qui lui sont proches, le gaz sarin - utilisé lors de l’attentat dans le métro de Tokyo en 1995 - et le gaz VX, qui a servi à tuer le beau-frère du dirigeant nord-coréen Kim Jung-un, en février 2017.
Poudre mortelle
Les poisons de la famille Novichok agissent par inhalation ou au contact de la peau et partagent les mêmes effets sur le corps humain que ses “cousins” plus connus. “Il rend la respiration d’abord plus difficile, fait pleurer les yeux, fait baver, ralenti t le cœur, entraîne des convulsions et pousse la victime à s’uriner et se déféquer dessus”, énumère Gary Stephens. La victime finit par mourir d’asphyxie.
Mais l’agent innervant Novichok est considéré comme à la fois plus efficace et plus mortel que le gaz sarin ou même le VX. Il peut se présenter sous forme de poudre , alors que le sarin et le VX n’existent qu’à l’état liquide, ce qui “rend le Novichok à la fois plus facile et plus stable à transporter”, explique l’expert britannique. Il en faut aussi moins pour être tout aussi mortel que les autres agents innervant s .
Les autorités britanniques n’ont, en revanche, pas précisé quel le souche d’agent Novichok avait été administrée à Sergueï Skripal. Il peut, en effet, apparaître sous différentes formes et peut également être prêt à l’emploi ou nécessit er d’être assemblé avant d’être administré à la victime. Dans ce dernier cas, les experts parlent d’”arme chimique binaire”, c’est-à-dire que le poison se présente sous la forme de deux composés qui, pris séparément, ne sont pas toxique s mais deviennent mortel s une fois réunis. Un avantage pour celui qui doit transporter le poison puisqu’il ne risque pas de se contaminer par erreur et qu’il est plus difficile à détecter lors d’éventuel s contrôle s . Le risque, en revanche, est de se tromper dans les proportions au moment de l’assemblage.
“C’est peut-être ce qui s’est passé dans le cas présent”, spécule Gary Stephens. L’un des mystères de l’affaire Skripal est, en effet, de savoir comment l’ex-agent du KGB a pu survivre à l’exposition à un agent innervant aussi dangereux, même s’il est toujours dans un état critique. Un cocktail de trois antidotes doit être administré dans les minutes qui suivent l’apparition des premiers symptômes pour espérer échapper à une mort jugé e certaine le cas échéant.