Des milliers de messages de comptes automatisés sur Twitter, liés à la propagande russe, ont tenté de dénigrer les défenseurs d’un plus strict contrôle des armes à feu aux États-Unis, après la tuerie dans un lycée de Floride, mercredi.
Les "bots" – comptes Twitter automatisés – russes contre-attaquent. Après la tuerie du lycée de Floride, qui a coûté la vie à 17 personnes mercredi 14 février, une avalanche de messages sur Twitter a été automatiquement générée par des comptes, qui avaient déjà fait les beaux jours numériques de la campagne de Donald Trump lors de la présidentielle américaine.
Un réveil de ces "bots" politiquement motivés, qui a affolé les compteurs de Hamilton68 (créé par l’ONG Alliance for securing democracy), et Botcheck.me (fruit du travail de deux étudiants de l’université de Berkeley), deux sites qui suivent l’activité de ces comptes, a constaté le magazine Wired. Depuis la controverse autour de l’influence de ces "bots" lors de la campagne présidentielle américaine, ces deux plateformes ont comptabilisé plus de 600 de ces faux comptes encore actifs, qui agissent de manière coordonnée, postent essentiellement les mêmes liens, souvent favorables à la politique de Donald Trump, et se suivent entre eux.
Prise d’otage de hashtags
Leurs cibles, cette fois-ci : les hashtags #gunreformnow et #gunreform, censés promouvoir un renforcement de la législation américaine sur le contrôle des armes. Des milliers de tweets ont été postés par ces "bots", accompagnés de liens vers des articles pour défendre le deuxième amendement de la Constitution (le fondement du droit américain de posséder une arme), a constaté Botcheck.me, qui surveille plus de 1 500 “comptes automatisés de propagande”. Le lien le plus partagé par ces machines à tweets est un article de 2014 du site Politifact qui critique les statistiques souvent utilisées pour promouvoir une législation plus stricte.
D’autres ont consciencieusement retweeté plus vite que leur ombre des messages d’utilisateurs réels, si possible influents, qui s’élèvent contre ceux qui veulent que cette nouvelle fusillade meurtrière entraîne un contrôle plus strict de la vente d’armes, a souligné l’Alliance for securing democracy.
Résultat : une véritable prise d’otage de ces hashtags pour parasiter autant que possible son message d’origine. Pour autant, cela ne signifie pas que “le Kremlin a une préférence sur la question du contrôle de la vente d’armes aux États-Unis”, souligne Bret Schafer, porte-parole de l’Alliance for securing democracy.
Appâter les conservateurs
Cette opération servirait davantage à renforcer l’impression d’une fracture béante au sein de la société américaine, constituée de deux blocs irréconciliables. Un même phénomène, moins marqué, s’était produit lors de la fusillade de Las Vegas, le 1er octobre 2017. Les événements traumatisants comme ces tueries sont du pain béni pour ces "bots" car “ils offrent une formidable caisse de résonnance sur des sujets politiquement très polarisants”, note Bret Schafer.
Néanmoins, selon ce dernier, ces fusillades peuvent profiter à Moscou. Ces tragédies “servent d’appât pour ensuite délivrer des messages qui servent plus directement les intérêts russes”, assure cet expert. Ces robots cherchent à attirer l’utilisateur conservateur de Twitter avec des messages qui vont dans son sens, dans l’espoir qu’il visite ensuite le fil Twitter du "bot", rempli de liens vers des articles favorables à la Russie. C’est ainsi, a noté l’Alliance for securing democracy, qu’un message pour promouvoir le droit à porter des armes peut rapidement mener à d’autres tweets faisant la promotion du rapport Nunes, du nom du républicain Devin Nunes, qui a tenté de discréditer le travail du FBI dans l’enquête sur l’ingérence russe lors de l’élection présidentielle américaine. Qui a dit qu’un robot ne pouvait pas être cynique ?