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Emmanuel Macron et Xi Jinping ont annoncé mardi vouloir resserrer les liens entre la France et la Chine face aux grands défis mondiaux. Côté économique, Areva et la filière bovine française ont de quoi avoir le sourire.

Discours flatteurs et gros contrats : Emmanuel Macron a en partie obtenu ce qu’il était venu chercher en Chine. Paris et Pékin ont décidé, mardi 9 janvier, de resserrer leurs liens dans tous les domaines et de travailler davantage de concert pour assumer une position de "leaders" face aux défis mondiaux.

"Les facteurs d’instabilité dans le monde sont de plus en plus palpables", a déclaré le président chinois, Xi Jinping, lors d’une conférence de presse à Pékin avec son homologue, estimant que la France et la Chine avaient dans ce contexte "une mission historique". "Nous avons décidé conjointement de rester étroitement en contact, de renforcer les échanges à haut niveau et de continuer ensemble à jouer un rôle de leaders sur les tendances internationales."

LIVE | Déclaration conjointe à la presse avec Xi Jinping à Pékin. https://t.co/HPdFzvhhDj

  Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 9 janvier 2018

La Chine, deuxième puissance mondiale, a-t-elle été séduite par Emmanuel Macron au point de faire de la France un partenaire privilégié, au même titre que les États-Unis ou le Japon ? "Non, répond Jean-Louis Rocca, chercheur au Centre de recherches internationales (Ceri), spécialiste de la Chine, interrogé par France 24. On est tout à fait dans le cadre un peu classique de la visite officielle qui se passe bien. Tout le monde est content officiellement, mais, hormis les annonces sur Areva et le bœuf français, il n’y a pas vraiment d’élément concret qui permette de dire qu’on sort de la diplomatie d’affichage."

Xi Jinping a, dans ce domaine, exprimé tous les espoirs placés dans sa visite en Chine par Emmanuel Macron. "Nous avons décidé de renforcer tous azimuts la coopération internationale, de respecter le cadre et les principes de la charte des Nations unies, de préserver ensemble le multilatéralisme, d'améliorer la gouvernance de la planète, de faire face ensemble aux défis", a ainsi dit le président chinois, citant en particulier le dérèglement climatique et le terrorisme.

"Respect mutuel" et "concurrence loyale"

Le président chinois n'est pas non plus resté sourd aux appels d'Emmanuel Macron à rééquilibrer les échanges commerciaux, évoquant les impératifs de "respect mutuel" et de "concurrence loyale", et il s'est dit optimiste quant à l'évolution à venir des relations entre la Chine et l'Union européenne.

Prenant la parole après Xi Jinping, Emmanuel Macron a voulu insister sur le caractère inédit, selon lui, de sa visite : entre la France et la Chine, "une nouvelle ère s'ouvre aujourd'hui", a dit Emmanuel Macron, en soulignant la coïncidence entre son mandat de cinq ans et l'organisation en octobre dernier du 19e congrès du Parti communiste chinois, un événement qui a lieu tous les cinq ans.

"Nous vivons un temps d'instabilité profond qui, du terrorisme aux crises régionales, menace notre système de sécurité collectif", a-t-il souligné.

Sur la crise nord-coréenne, pour laquelle Pékin est le premier acteur extérieur, la France et la Chine veulent apaiser les tensions, a-t-il déclaré, "pour qu’un retour à la normale (…) puisse s’opérer", a-t-il dit. "Je pense qu'à partir du mois prochain, nous aurons un contexte qui permettra d'œuvrer de concert en la matière", a poursuivi le président français.

La Chine souhaite participer au renforcement du G5 Sahel

Quant au terrorisme, la France et la Chine partagent la conviction que seul un règlement politique des crises, en Syrie, en Irak et en Afrique, permettra de venir à bout de la menace. En Afrique, les deux pays travailleront davantage ensemble, a-t-il dit, ajoutant que la Chine souhaitait renforcer l'initiative dite du G5 Sahel, sans préciser de quelle manière.

Xi Jinping s’est dit favorable à ce que la France puisse discuter avec la Chine de son projet de nouvelle "route de la soie", porteurs d'investissements considérables et d'accroissement de la puissance commerciale et de l'influence de la Chine.

Emmanuel Macron a souhaité que l'initiative se fasse dans un esprit d'échange et de "coopération équilibrée", qu'elle apporte "des éléments de stabilisation et de développement dans les zones traversées", et permettre de lutter contre la corruption dans les pays traversés.

Accord providentiel pour Areva

Mais le président français a surtout insisté sur les nombreux accords signés en Chine dans les secteurs de l’énergie nucléaire, de l’aéronautique, de la santé, des technologies, de l’agroalimentaire, de la culture ou de l'éducation.

Areva a en particulier conclu un protocole d'accord pour construire une usine de traitement-recyclage en Chine pour quelque 10 milliards d'euros. Cet accord est providentiel pour Areva, ancien fleuron du nucléaire civil en grande difficulté, qui négociait depuis dix ans avec son partenaire chinois CNNC.

Toujours dans le nucléaire civil, le réacteur EPR construit par EDF dans le sud de la Chine, devrait démarrer dans environ six mois, a fait savoir la présidence française. Ce serait le cas échéant le premier EPR opérationnel dans le monde, avant ceux en chantier à Flamanville (France) et en Finlande, qui ont subi de nombreux retards et surcoûts.

Aucune vente d'avion n'a été annoncée lors de la cérémonie de signature d'accords, mais Airbus a signé un protocole d'accord pour porter à six par mois la production de monocouloirs de la famille A320 en Chine en 2020.

Levée de l'embargo sur le bœuf français

Emmanuel Macron a ajouté que l'ouverture du marché chinois au bœuf français, qui subissait un embargo depuis 2001 et la crise de la vache folle, serait actée dans les six prochains mois et que le travail se poursuivrait sur le porc, les fruits et légumes et d'autres filières.

En dehors des questions économiques, les deux pays sont tombés d'accord sur l'ouverture d'un Centre Pompidou d’art contemporain à Shanghai. Ce partenariat prévoit également d'organiser une édition des Rencontres photographiques d'Arles dans la ville de Xiamen (est de la Chine), a-t-il ajouté.

Emmanuel Macron quittera Pékin mercredi. Dans son premier discours, il avait promis, lundi, de revenir "au moins une fois par an" en Chine pour "créer de la confiance pas à pas". Dans ce contexte, ne pas trop parler de la question des droits de l’Homme fait sans doute partie de sa stratégie.

"C'est dans ce dialogue respectueux des différences et dans cette diplomatie efficace et amicale qu'on obtient des rapprochements et des résultats, beaucoup plus que dans une diplomatie de l'hygiaphone ou de la provocation", a-t-il dit commenté à ce sujet.

Avec AFP et Reuters