À l'occasion d'une visite officielle du dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan à Paris, Emmanuel Macron a proposé vendredi à la Turquie un "partenariat avec l'UE", à défaut d'une adhésion, afin de préserver "l'ancrage" de ce pays en Europe.
"Un partenariat", plutôt qu'une adhésion à l'Union européenne. C'est l'alternative proposée ce vendredi 5 janvier par Emmanuel Macron au dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan en visite officielle à Paris, où les deux hommes ont donné une conférence de presse commune en fin d'après-midi à l'Élysée.
"Il faut (...) regarder si on ne peut pas repenser cette relation non pas dans le cadre du processus d'intégration mais peut-être d'une coopération, d'un partenariat avec une finalité (...), c'est de préserver l'ancrage de la Turquie et du peuple turc dans l'Europe et de faire que son avenir se construise en regardant l'Europe et avec l'Europe", a dit le président français à l'issue d'un entretien avec son homologue.
"Nous devons sortir d'une hypocrisie"
"Ma volonté c'est que nous fassions davantage ensemble, c'est que la Turquie reste ancrée, arrimée à l'Europe mais je pense que le processus (d'adhésion, ndlr) tel qu'il a été ouvert ne permettra pas de déboucher dans les prochaines années", a-t-il insisté lors d'une conférence de presse commune.
Je ne pense pas que le processus d'adhésion à l'Union européenne puisse aboutir dans les prochaines années. Mais ma volonté est bien de préserver l'ancrage de la Turquie et du peuple turc dans l'Europe, et de faire plus ensemble. pic.twitter.com/6WKZY9wTRT
Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 5 janvier 2018"Nous devons sortir d'une hypocrisie qui consiste à penser qu'une progression naturelle vers l'ouverture de nouveaux chapitres (de négociation) est possible", a poursuivi Emmanuel Macron, concédant avoir eu une "discussion très franche" à ce sujet avec le président Erdogan.
Il a proposé en revanche qu'un "dialogue apaisé" et "repensé, reformulé dans un contexte plus contemporain, prenant en compte les réalités d'aujourd'hui" soit ouvert dans les prochains mois.
La Turquie "fatiguée"
"Ca fait 54 ans que la Turquie attend dans l'antichambre de l'UE (...) On ne peut pas en permanence implorer une entrée dans l'UE", a répliqué Recep Tayyip Erdogan. La Turquie est "fatiguée" d'attendre une éventuelle adhésion à l'Union européenne, a indiqué le président turc.
"Je pense que l'Union européenne n'a pas toujours bien fait avec la Turquie parce qu'elle a laissé croire que des choses étaient possibles alors qu'elles ne l'étaient pas totalement", a renchéri Emmanuel Macron.
Sur la question de l'incarcération de certains journalistes turcs en Turquie, ce dernier a appelé Recep Tayyip Erdogan à "respecter l'État de droit", ajoutant que les deux hommes avaient abordé une liste de cas individuels au cours de leur entretien.
Dans une interview accordée à France 24, Denise Guéguen, la coordinatrice Turquie d'Amnesty International, ONG dont le président de la section turque Taner Kiliç est actuellement emprisonné, "salue" la prise de parole du président français au sujet des atteintes aux droits humains dans le pays. "Nous demandons au président français de continuer à en parler", affirme-t-elle.
Depuis le coup d'État manqué de juillet 2016, les purges se multiplient en Turquie. Plus de 140 000 personnes ont été limogées ou suspendues et plus de 55 000 ont été arrêtées, dont des universitaires, des journalistes et des militants pro-kurdes, accusés de propagande "terroriste" ou de collusion avec les réseaux du prédicateur Fethullah Gülen. Cet opposant exilé au États-Unis est accusé par le régime d'être à l'origine de la tentative de putsch.
Avec AFP