Quelque 2,5 millions d'habitants du Kurdistan étaient appelés, samedi, à élire leur Parlement et leur président, pour la première fois au suffrage universel. Un conflit territorial oppose cette région autonome du nord de l'Irak et Bagdad.
AFP - La province autonome du Kurdistan irakien a élu samedi son président et son Parlement, qui devront affronter le défi d'un conflit territorial avec Bagdad autour de cette région pétrolière.
Le scrutin, qui s'est achevé à 19H00 (16H00 GMT), s'est déroulé dans les trois provinces d'Erbil, Dohouk et Souleimaniyeh, à l'issue d'une vibrante campagne électorale en raison de la présence de plusieurs listes concurrentes.
Devant les centres de vote, de longues queues s'étaient formées dès l'ouverture à 08H00 (05H00 GMT) des bureaux de vote. Aucun incident n'est venu perturber le scrutin.
Environ 2,5 millions d'électeurs devaient choisir le président du Kurdistan, élu pour la première fois au suffrage universel, et les députés de l'Assemblée composée de 111 sièges.
L'actuel président kurde et chef de Parti démocratique du Kurdistan (PDK), Massoud Barzani, ainsi que quatre autres candidats sont en lice pour la présidentielle alors que 24 listes, dont celle commune du PDK et de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), concourent pour le scrutin législatif.
"C'est la première fois de ma vie que j'ai l'impression de participer à une élection où il existe plusieurs choix et une vraie concurrence", a affirmé à l'AFP Ziz Hassan, un ingénieur de 44 ans, devant un bureau de vote à Souleimaniyeh, deuxième ville du Kurdistan.
"Lors des précédentes élections les deux parties ne donnaient pas le choix aux électeurs", a-t-il ajouté, en référence au PDK et à l'UPK, du président irakien Jalal Talabani, dont la liste commune avait obtenu 89,5% de suffrages en 2005.
Ces deux partis, qui règnent en maîtres sur la politique locale depuis plusieurs décennies, devraient une nouvelle fois sortir vainqueurs mais l'enjeu du scrutin réside dans le score des listes dissidentes. Une situation inédite depuis le premier scrutin kurde en 1992.
"Je vais voter pour la liste Goran car le système politique au Kurdistan a besoin de changement et de renouveau et d'une opposition parlementaire réelle et forte", a assuré Ziz Hassan.
La liste "Goran" (Changement en kurde), emmenée par l'ancien numéro deux de l'UPK, Noucherwan Moustapha, est le principal challenger face au PDK et l'UPK et a fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille.
La victoire de la liste commune "Kurdistania" de l'UPK et du PDK "est aussi claire que la lumière du soleil dans un ciel bleu azur", a en revanche estimé une électrice enthousiaste, Chilane Othman 36 ans, dans un autre bureau de vote de Souleimaniyeh.
"Ce scrutin est une victoire pour le peuple kurde et pour le peuple irakien", a affirmé M. Barzani à la presse dans son fief de Salaheddine, au nord d'Erbil. "Nous espérons que ces élections seront un premier pas dans le règlement des différends avec Bagdad", a-t-il ajouté.
Restant toutefois inflexible, il a ajouté en réponse à une question sur son programme: "Je travaillerai pour récupérer les territoires disputés".
Dans un message télévisé, le Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, a tendu la main en indiquant que ces élections étaient une étape "pour construire un Irak démocratique et jouir des richesses du pays dont la dictature (de Saddam Hussein) nous a privées".
Bagdad et Erbil se disputent le contrôle de seize secteurs dans les provinces limitrophes du Kurdistan, au premier rang desquels la ville de Kirkouk, dont le sous-sol regorge de pétrole.
Les résultats des scrutins ne devraient pas être connus avant plusieurs jours. Les bulletins de toute la région seront rassemblés à Erbil puis envoyés à Bagdad pour y être comptés par la commission électorale.