Près de 2 000 candidats se présentent, dimanche, aux élections sénatoriales. Un record pour ce scrutin dont l’issue est cruciale pour la réforme constitutionnelle que souhaite entreprendre le président Emmanuel Macron.
Dernier scrutin de l’année 2017 après la présidentielle et les législatives, les élections sénatoriales du 24 septembre concluent une riche séquence électorale. Les Français n’étant pas appelés aux urnes, les sénatoriales passionnent moins. Leurs résultats seront toutefois observés avec intérêt par Emmanuel Macron et toute la classe politique. Alors pour tout comprendre de ces dernières élections en France avant les européennes de 2019, voici les réponses aux cinq questions que vous vous posez.
- Comment ça marche ?
Les 348 sénateurs siégeant au Palais du Luxembourg sont élus pour six ans mais sont renouvelés par moitié tous les trois ans. En 2014, 178 sénateurs composant la série 2 ont été élus. Cette année, ce sont donc les 170 autres sénateurs composant la série 1 qui voient leur mandat s’achever, correspondant aux élus de 38 départements métropolitains, quatre départements d’outre-mer et deux collectivités d’outre-mer. Par ailleurs, six sièges de sénateurs représentant les Français de l’étranger sont également concernés.
Les sénateurs ne sont pas élus directement par les Français mais par un collège électoral composé des députés et sénateurs, des conseillers régionaux élus dans le département concerné par l’élection, des conseillers de l’Assemblée de Corse, de l’Assemblée de Guyane et de l’Assemblée de Martinique, des conseillers départementaux et des délégués des conseils municipaux. Ces derniers sont en fait les principaux électeurs des sénatoriales puisqu’ils représentent 95 % des 162 000 grands électeurs.
- Vers une nouvelle vague La République en marche ?
Alors qu’Emmanuel Macron espérait encore au début de l’été faire main basse sur le Sénat, les ambitions ont été revues à la baisse trois mois plus tard. D’abord parce que le président de la République est beaucoup moins populaire qu’il ne l’était en juin et que le parti qu’il a créé, La République en marche, ne jouit plus du même pouvoir d’attraction que lors des élections législatives.
Mais aussi et surtout parce que le mode de scrutin ne favorise pas les nouveaux partis. L’essentiel du collège électoral étant constitué des délégués des conseils municipaux, seuls les partis ayant de nombreux élus locaux peuvent prétendre faire le plein de voix. La droite devrait donc conserver sa majorité. La République en marche, de son côté, s’est toutefois attachée à poursuivre son opération de décomposition des anciens partis politiques en opérant quelques prises de choix. Des sénateurs sortants Les Républicains, UDI et socialistes portent ainsi désormais les couleurs LREM. Au total, le groupe La République en marche au Sénat, qui compte 29 sénateurs actuellement, espère atteindre la cinquantaine de membres à l’issue du scrutin.
- Le Sénat, est-ce si important pour Emmanuel Macron ?
Si le Sénat n’est pas un rouage aussi essentiel dans l’appareil législatif que l’Assemblée nationale, le président de la République n’oublie pas qu’il aura besoin des sénateurs pour faire voter sa réforme constitutionnelle. Pour modifier la Constitution, Emmanuel Macron doit obtenir une majorité des trois cinquièmes au Parlement, soit 555 élus à trouver à l’Assemblée nationale et au Sénat. Or, si le président peut compter sur le soutien d’un peu moins de 400 députés (issus des groupes LREM, MoDem et Constructifs), il lui faut encore environ 160 sénateurs pour s’assurer un feu vert à sa révision de la Constitution.
L’élection de 160 sénateurs LREM étant exclue, le camp présidentiel espère convaincre des sénateurs issus d’autres partis de se rallier à la réforme constitutionnelle. "Les parlementaires ne sont pas des béni-oui-oui et le cadre a évolué. On est passé d’un système d’obéissance à un système d’adhésion", juge dans Le Monde Jean-Paul Delevoye, le président de la commission d’investiture de La République en marche, pour qui les frontières politiques "sont beaucoup plus souples et plus poreuses qu’avant".
- Quel enjeu pour les autres partis ?
L’arrivée fracassante de La République en marche sur la scène politique va continuer de provoquer des divisions, aussi bien chez Les Républicains qu’au Parti socialiste et avec leurs alliés traditionnels respectifs.
Si localement, certains résultats sont difficiles à prédire, la droite devrait toutefois conserver la majorité et le Parti socialiste limiter davantage la casse que lors des législatives, même si le PS va nécessairement perdre des sièges puisqu’il avait perdu de nombreux élus locaux lors des municipales de 2014.
Jugeant le mode de scrutin désavantageux, La France insoumise a décidé de faire l’impasse sur ce scrutin. Le Front national, en revanche, tentera de faire élire son premier sénateur. C’est dans le Pas-de-Calais qu’il a le plus de chances d’y parvenir : Christopher Szczurek, l’adjoint au maire d’Hénin-Beaumont Steeve Briois, y conduira la liste du parti de Marine Le Pen.
- Des personnalités parmi les candidats ?
Au total – et c’est un record –, 1 996 candidats se présentent aux élections sénatoriales. On retrouve parmi eux certains noms connus dont deux membres du gouvernement d’Édouard Philippe. Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, sénatrice MoDem sortante du Loir-et-Cher, tentera de conserver son siège, tandis que le ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin est candidat sur la liste LREM dans le Nord – mais en 11e position donc peu de chances qu’il soit élu.
D’autres personnalités politiques tenteront, elles, de conserver leur siège malgré la multiplication des listes et les dissidences. C’est le cas notamment du secrétaire national du Parti communiste Pierre Laurent (Paris) et du président LR du Sénat Gérard Larcher (Yvelines). Ce dernier va devoir faire face à trois autres listes de droite, dont celle de l’ancien député Jacques Myard, qui lui reproche d’être trop conciliant à l’égard d’Emmanuel Macron.