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Référendum en Catalogne : un casse-tête pour les mairies

À mesure que le référendum d'autodétermination de la Catalogne du 1er octobre approche, la tension s'intensifie entre Madrid et le pouvoir catalan. Au milieu de ce bras de fer, les mairies se retrouvent contraintes de se positionner.

Nuria Marin a été l’une des premières maires de Catalogne à annoncer que sa mairie de L'Hospitalet de Llobregat, 255 000 habitants, n'ouvrira pas ses locaux municipaux pour l’organisation du référendum d'autodétermination. "Je refuse de soutenir un scrutin qui a été décidé de façon unilatérale", affirme à France 24 l’édile socialiste de la deuxième ville de la région, voisine de Barcelone.

Faig arribar la resposta al President @KRLS i al Vicepresident @junqueras en relació a la cessió d'espais municipals per l' #1O pic.twitter.com/9Rr1RX0QBl

  Núria Marín (@nuriamarinlh) 8 septembre 2017

La loi entérinée par le parlement de la Generalitat de Catalogne, le 6 septembre, a été invalidée par le Conseil constitutionnel espagnol. Depuis, quelque 200 maires, principalement issus du Parti socialiste catalan (PSC) ont affirmé ne pas vouloir organiser ce scrutin. Alors que le gouvernement catalan a appelé les électeurs à "regarder droit dans les yeux" les maires "pour leur demander s’ils les laisseront finalement voter", la pression s’est intensifiée ces derniers jours envers ces élus réfractaires, dont les villes représentent plus de 3 millions des 7,5 millions de Catalans – au point qu’ils ont dû rappeler dans un manifeste le "droit à la pleine liberté d’expression, sans aucun type d’intimidation, de discrimination ou de menace".

Menaces et insultes

Certains ont été victimes de menaces, plusieurs ont reçu des injures ("vieille merde", "on va vous mettre une raclée"), quand d’autres ont vu les murs de leur mairie taggés, relève notamment le quotidien régional La Vanguardia, dans son édition du 13 septembre.

Face à de telles intimidations, Nuria Marin est montée au créneau pour interpeller le président de la Generalitat, Carles Puigdemont, à l’occasion de la fête nationale catalane lundi 11 septembre, en lui lançant en public : "Laissez les maires tranquilles !". Pour l'élue, "les indépendantistes doivent prendre en charge l’organisation de leur scrutin dans leurs propres locaux : lycées, centres de santé ou maisons de retraite", précise-t-elle.

Reste que la situation des quelque 674 maires qui ont accepté d’ouvrir leurs salles municipales pour le scrutin n’est pas plus sereine. Ils sont, eux, la cible du gouvernement espagnol de Mariano Rajoy, bien décidé à freiner leurs ferveurs indépendantistes.  Le procureur général de l'État les a cités à comparaître. Au cas où un maire ne répondrait pas, le parquet demande même d'"ordonner son arrestation" pour qu'il soit amené au parquet "dans les plus brefs délais".

"Je ne peux pas m'occuper de ces bêtises"

Mais les maires indépendantistes ne semblent pas vouloir faire marche arrière. "J’ai beaucoup de travail et je ne peux pas m’occuper de ces bêtises. S’ils veulent parler avec moi, ils savent où me trouver", a tweeté sur un ton provocant le maire de L’Argentera (136 habitants), Eudald Calvo, en accord avec son camp, le petit parti anticapitaliste et séparatiste d’extrême gauche CUP, qui a prévenu que ses seize maires "ne comparaîtront pas" devant les magistrats.

Tinc molta feina i no puc estar per aquestes tonteries. Qui vulgui parlar amb mi, ja sap on trobar-me #HolaDictadura https://t.co/owomtG8HPD

  Eudald (@eudaldcc) 13 septembre 2017

Plus modérés, les édiles du PDeCAT (conservateur et indépendantiste) ne sont pas moins déterminés. "Quand plus de 700 maires sont poursuivis par la justice, ce ne sont pas les maires qui ont un problème, c'est la justice", a déclaré Miquel Buch, maire de la ville côtière de Premià de Mar (28 000 habitants). Pour sa part, la maire de Barcelone (1,6 million d’habitants) Ada Colau, élue par le soutien de Podemos (pro-indépendantiste), qui ne s’était pas encore prononcée, a fini par annoncer, mercredi, qu'elle "faciliterait" le vote dans la capitale.

Devant le bras de fer que se livrent Madrid et le gouvernement catalan, Nuria Marin juge inopportun de "reporter une telle responsabilité sur les maires qui se retrouvent face à une situation très complexe". Et de conclure : "Mariano Rajoy et Carles Puigdemont doivent retourner à la table des négociations pour trouver un accord".