Première grande réforme du quinquennat d'Emmanuel Macron, les ordonnances réformant le code du travail doivent être présentées jeudi midi par le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Pénicaud.
Le jour J est enfin arrivé. Le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Pénicaud doivent dévoiler, jeudi 31 août, le contenu des cinq ordonnances réformant le code du travail, tandis que les opposants, syndicaux et politiques, promettent déjà une rentrée chaude dans la rue.
C'est "une réforme de transformation profonde" qui "doit être assez ambitieuse et efficace pour continuer à faire baisser le chômage de masse et permettre de ne pas revenir sur ce sujet durant le quinquennat", explique le président Emmanuel Macron dans un entretien fleuve jeudi dans Le Point.
Édouard Philippe et Muriel Pénicaud dévoileront les ordonnances en deux temps : d'abord aux partenaires sociaux, lors d'une multilatérale prévue à 9h45 à Matignon, puis à la presse lors d'une conférence de presse programmée à 12 heures.
Les grandes lignes de la réforme sont connues. Celle-ci modifie l'articulation entre les accords de branches et d'entreprises. Les premières conserveront la primauté sur les minima conventionnels, les classifications et l'égalité professionnelle notamment, et se verront confier la régulation des contrats courts (CDI de chantier, CDD). En outre, elles pourront décider de faire primer leur accord dans les domaines du handicap ou de la pénibilité par exemple. Sur les autres sujets de négociation, c'est l'entreprise qui primera.
Un agenda social chargé
Deuxième axe de la réforme : le dialogue social dans les entreprises. La fusion de trois des quatre instances représentatives du personnel (délégués du personnel, CE et CHSCT) est déjà actée. Pour les PME dépourvues de délégué syndical, la possibilité de négocier avec un délégué du personnel non mandaté par un syndicat semble actée jusqu'à 50 salariés, mais le gouvernement laisse planer le doute sur le sort réservé aux entreprises de 50 à 300 salariés.
Enfin, troisième bloc de mesures, celles censées "sécuriser les relations de travail". Il s'agit, pour l'essentiel, de mesures relatives au licenciement : plafonnement des dommages et intérêts prud'homaux, harmonisation et réduction des délais de recours, passage à un périmètre national pour apprécier les difficultés économiques des multinationales qui licencient en France.
Plusieurs questions restent en suspens : quels seront le plancher et le plafond des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif ? Quels seront les nouveaux délais pour saisir les prud'hommes ? Jusqu'à quel seuil d'effectifs les entreprises pourront-elles négocier avec des élus non mandatés ? Les employeurs pourront-ils faire valider un accord minoritaire par référendum ?
Les ordonnances sur le code du travail sont présentées par le gouvernement comme la première étape d'une "rénovation du modèle social" français. Suivront la réforme de l'assurance chômage, de la formation professionnelle et de l'apprentissage à partir de septembre, puis celle des retraites en 2018.
Vers de nouvelles manifestations massives de l’opposition ?
Pour les opposants à la réforme, il s'agit surtout d'une "loi travail XXL", dans la droite ligne de la loi El Khomri, qui avait provoqué en 2016 un conflit social inédit sous un gouvernement de gauche. Mais contrairement à 2016, où la CGT et FO manifestaient main dans la main, cette année, la CGT est, pour l'heure, la seule grande organisation syndicale à appeler à manifester le 12 septembre. Le numéro un de FO, Jean-Claude Mailly, a annoncé mercredi que son syndicat ne se joindrait pas à cette journée d'actions, se satisfaisant qu'il y ait eu une "vraie concertation" et que le gouvernement ait "fini par bouger" sur plusieurs points, notamment sur le rôle de la branche.
La CFE-CGC, également vent debout contre la réforme, a elle lancé une campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux. Son président François Hommeril appelle à construire un "mouvement unitaire" contre une réforme qui n'apportera que "précarité" et "dumping social".
L'opposition est aussi politique. La France insoumise compte "déferler" sur Paris le 23 septembre, contre ce qu'elle considère comme un "coup d'État social".