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Armstrong en 2010, pour le meilleur et pour le pire ?

Le septuple vainqueur du Tour a confirmé sa participation à l'édition 2010 de la Grande Boucle. Une nouvelle au goût de déjà-vu qui, aux yeux du journaliste Pierre Ballester, témoigne de l'hégémonie du sport-business dans le cyclisme.

C'est sur son compte Twitter que l'Américain Lance Armstrong, 37 ans, a confirmé qu'il allait courir le Tour de France 2010. Si la nouvelle est applaudie par la une du quotidien sportif L'Équipe, propriété du groupe Amaury sport organisation (ASO, société organisatrice du Tour de France), elle fait aussi grincer les dents des détracteurs du septuple vainqueur de la Grande Boucle, dont Pierre Ballester.

L'ancien journaliste de L'Équipe, auteur de plusieurs ouvrages à charge contre Lance Armstrong et les instances internationales de cyclisme, pense que ce retour risque de sérieusement entamer l'esprit sportif de la Grande Boucle au profit du sport-business. Entretien.


FRANCE 24 - Lance Armstrong a annoncé qu’il sera présent sur le Tour de France en 2010. Cela vous surprend-il ?

Pierre Ballester - Non. Plus rien ne peut s’opposer à l’hégémonie inique et inacceptable de Lance Armstrong. Ni l’Union cycliste internationale (UCI) ni les organisateurs du Tour (Amaury sport organisation, ASO). Cela prouve qu’ils se moquent de l’aspect sportif du Tour de France. S’ils avaient l’audace de défendre les valeurs du sport, ils refuseraient d’accepter Armstrong une nouvelle fois. Mais à l’image de notre société, l’argent a pris le pas sur le sport, qui est désormais devenu un alibi pour faire des profits. Ce retour de Lance Armstrong décrédibilise encore un peu plus ce sport et accrédite la thèse du ‘Je suis un tricheur, je reste et me moque du monde’.
 

F24 - Lance Armstrong aura presque 39 ans en 2010. Que cherche-t-il à prouver ? Peut-il encore gagner le Tour de France ?

P. B. - Sportivement, il ne peut pas gagner. On le voit sur ce Tour-ci, la seule chose qui puisse faire perdre Alberto Contador, c’est un contrôle positif aux produits dopants. Et personne n’est à l’abri.

F24 - Pourtant, l’Américain est à 1 minute 37 secondes du leader, Alberto Contador, ce n'est pas si mal...

P. B. - Pour Lance Armstrong, être deuxième, c’est la lanterne rouge. Il est obsédé par la victoire.

F24 - Pourquoi revient-il alors ?

P. B. - Il ne peut pas gagner sportivement, mais il peut gagner politiquement. Il a besoin du Tour pour promouvoir sa fondation [livestrong.org, ndlr]. Il a l’ambition de devenir le Bruce Willis du cancer. Et pour cela, il a besoin de revenir pour se racheter une conduite.

F24 - Peut-on envisager qu’il revienne avec sa propre équipe, au nom de sa fondation ?

P. B. - Lance Armstrong a un ascendant psychologique sur les coureurs, les organisateurs, les instances sportives, sur tout le monde. Qu’il revienne avec sa propre équipe est tout à fait envisageable. Il a besoin de banaliser sa présence sur le Tour, en tant que coureur ou directeur sportif, pour, encore une fois, se racheter une conduite même au détriment du sport. Le Tour est en train de se vider de sa substance. Comme un sablier où le sport s’écoulerait pour être remplacé par l’argent.