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Le drame de Charlottesville fait ressurgir les liens entre le père de Trump et le Ku Klux Klan

Un article d'archives du New York Times révèle que Fred Trump, le père de l'actuel président américain, a été arrêté lors d'une manifestation du Ku Klux Klan (KKK) en 1927.

"Le racisme, c'est le mal." Farouchement critiqué pour son indulgence à l’égard des groupuscules d’extrême droite après le drame de Charlottesville, Donald Trump a tenté de redresser la barre, lundi 14 août, lors d’une brève allocution depuis la Maison Blanche. "Ceux qui ont recours à la violence en son nom sont des criminels et des voyous, y compris le KKK, les néonazis et les suprémacistes blancs (...), qui sont à l'opposé de tout ce qui nous est cher en tant qu'Américains", a-t-il dénoncé.

Mais cette réaction a trop tardé. Les réseaux sociaux et les médias américains ont déjà déterré une arme redoutable : un article du New York Times datant de mai 1927, dans lequel on apprend qu’un certain Fred Trump, le père de Donald, résidant à l’époque avec sa mère au 175-24, Devonshire road dans le Queens, à New York, a été arrêté lors de violents heurts aux côtés de six autres hommes du Ku Klux Klan.

L'incident s'est produit alors qu’un millier de membres du KKK se dirigent vers le quartier Jamaica. Vêtus de leurs robes blanches à capuches pointues, ils viennent prendre part à un défilé en l’honneur des soldats des forces armées américaines morts au combat. Dans un climat de tension avec les forces de l'ordre, la manifestation dégénère et des affrontements monstres éclatent. D’abord arrêté, Fred Trump est finalement relâché et échappe aux poursuites.

Un argument anti-Trump depuis 2015

Ce n’est pas la première fois que l’anecdote refait surface. En septembre 2015, le site américain d’information high tech Boing Boing avait déterré l’affaire alors que Donald Trump entamait sa campagne pour obtenir l’investiture républicaine. Dans une interview accordée au New York Times, ce dernier avait nié en bloc toute implication de son père, martelant à plusieurs reprises qu’il n’avait en aucun cas fait l’objet de poursuites.

Rebelote en 2016 : l’article ressurgit lorsque le futur président refuse de s’opposer clairement au soutien, un tantinet gênant, de David Duke. Cet ancien dirigeant du KKK, qui était présent samedi au rassemblement suprémaciste de Charlottesville, a appelé l’année dernière à voter en faveur du milliardaire. Le principal intéressé avait d'abord refusé de commenter, puis a fini par rétorquer simplement qu’il ne connaissait pas David Duke. Pourtant, quelques années auparavant, en 2000, c’est bien Donald Trump qui avait refusé de se présenter à la présidence de la petite formation conservatrice Reform Party, parce qu’il comptait notamment dans ses rangs un certain David Duke. "Ce n’est pas le genre d’entourage que je souhaite garder", avait-il alors justifié.

Dessin de la Maison Blanche coiffée d'une capuche du KKK, tweeté par un compte satirique.

This. pic.twitter.com/yjQdvBTCTB

— Frank Underwood (@FrankUnderwocd) 15 août 2017

Avec un tel passif, la brève allocution du 15 août peine à apaiser les critiques qui estiment que le président a trop tardé à désapprouver explicitement les militants xénophobes présents lors du drame de samedi à Charlottesville. Un sympathisant néonazi de 20 ans a délibérément foncé dans des contre-manifestants, tuant ainsi une femme de 32 ans et blessant 19 personnes.

D’ordinaire prompt à réagir, notamment sur Twitter où il ne prend généralement pas de gants, Donald Trump a, dans un premier temps, renvoyé dos à dos les deux parties. "Nous condamnons dans les termes les plus forts ces démonstrations flagrantes de haine, de bigoterie et de violence de tous les côtés, de nombreux côtés", a-t-il ainsi commenté depuis son golf dans le New Jersey, ignorant les questions des journalistes lui demandant s’il dénonçait l’idéologie des groupuscules à l’origine de la manifestation.

Des patrons tournent le dos à Trump

Entre temps, les patrons de Merck, Under Armour et Intel ont annoncé leur départ d’un groupe d'entrepreneurs conseillant Donald Trump afin de protester contre les atermoiements et l’indulgence du président envers les groupuscules d’extrême droite. "Les dirigeants américains doivent honorer nos valeurs fondamentales en rejetant clairement les manifestations de haine, de sectarisme et toute revendication de suprématie qui nient l'idéal américain voulant que tous les hommes ont été créés égaux", a indiqué Kenneth Frazier le PDG de Merck, ouvrant le bal avec un tweet diffusé lundi sur le compte de l’entreprise pharmaceutique.

Puis Kevin Plank, PDG et fondateur de l'équipementier sportif Under Armour, lui a emboîté le pas, expliquant que sa société était "active dans l'innovation et les sports, pas la politique". Même décision de la part de Brian Krzanich, à la tête du géant informatique Intel : "Je pars parce que je veux avancer, alors que beaucoup à Washington semblent davantage intéressés par le fait d'attaquer quiconque n'est pas d'accord avec eux". Et le patron de conclure : "Nous devrions honorer – et non pas attaquer – ceux qui se sont levés pour l'égalité et d'autres valeurs chères aux Américains. J'espère que cela changera et je reste désireux de servir quand ce sera le cas".

Les proches de Trump calment le jeu

Du côté de Washington, on s’efforce de calmer le jeu. La fille de Donald Trump, Ivanka, et le vice-président Mike Pence sont tous deux montés au créneau affirmant que le racisme et l'idéologie suprémaciste n’avaient pas leur place dans la société américaine. Steve Bannon, conseiller stratégique et relais de l'alt-right à la Maison Blanche pourrait, en outre, être remercié, selon le New York Times, qui le décrit comme un "nationaliste implacable", figure du "muslim ban" et du fameux mur mexicain.

Pas sûr que cela soit suffisant : peu après son allocution, Donald Trump a retweeté un article concernant le fort taux de criminalité dans un quartier majoritairement noir de Chicago. De quoi remettre le feu aux poudres pour les détracteurs du président, qui voient là un signal amical adressé à l’alt-right.