
Trois personnes, proches de la famille, ont été interpellées mercredi, plus de trente ans après la découverte dans une rivière du corps du petit garçon. Un rebondissement qui relance l'une des affaires judiciaires les plus connues de France.
C’est un fait divers que personne n’a oublié. Le 16 octobre 1984, le corps de Grégory, quatre ans, était retrouvé pieds et poings liés dans la Vologne, la rivière de son village. Le lendemain, le père du petit garçon recevait une lettre anonyme : "J'espère que tu mourras de chagrin, le chef. Ce n'est pas ton argent qui pourra te redonner ton fils. Voilà ma vengeance", disait le corbeau dans ce courrier posté le jour du crime.
Trente-deux ans après les faits, l’une des grandes énigmes judiciaires de ces dernières décennies est-elle en passe d’être résolue ? Les enquêteurs sont extrêmement prudents mais mercredi 14 juin, trois personnes, des proches de la famille, ont été interpellées dans les Vosges, a annoncé le parquet général de Dijon. Les interpellations, "qui visent des personnes très proches du coeur de l’affaire, ont pour but d’éclaircir certains points et d’apporter des réponses à des questions posées, parfois de longue date, par des zones d’ombre de la procédure", indique le parquet dans un communiqué sans autre précision.
Parce que 32 ans c'est long
L' #AFP a listé les protagonistes de cette affaire Grégory aussi sordide que complexe et surréaliste.. pic.twitter.com/jZg8GD8lSa
Selon une source proche de l'enquête, les gardés à vue sont Marcel Jacob, l'oncle du père de Grégory, Jean-Marie Villemin, et sa femme Jacqueline, ainsi que Ginette Villemin, veuve de Michel Villemin qui était le frère de Jean-Marie et l’oncle de l’enfant. Les parents de Jean-Marie Villemin sont en outre entendus comme simples témoins en raison de leur grand âge, a-t-on précisé de même source. Selon le journal L’Est républicain, les personnes en garde à vue seraient soupçonnées des faits de complicité d’assassinat, non-dénonciation de crime, non-assistance à personne en danger et abstention volontaire d’empêcher un crime. Les garde à vue peuvent se prolonger jusqu’à vendredi matin.
"Un pas grandissime"
L’avocat des parents de Grégory, Jean-Marie et Christine Villemin, est ressorti optimiste du bureau de la présidente de la chambre de l’instruction de Dijon, Claire Barbier, qui l’a reçu dans l’après-midi. "Je suis très, très confiant quant à l’issue car, sur le chemin de la vérité, on a fait un pas grandissime", a dit à Reuters Me Thierry Mozer.
Le parquet présente les interpellations comme l’aboutissement d’un "travail d’analyse criminelle très approfondi" mené par le service central de renseignement criminel de la gendarmerie pour reconstituer "dans l’espace et dans le temps l’ensemble des témoins et des éléments intéressants apparus dans la procédure" les jours précédant et suivant la commission du crime.
Des documents privés ont également été exploités, l’ensemble de ce travail permettant de "recueillir ou de confirmer des éléments, dont certains avaient déjà attiré l’attention des enquêteurs et des magistrats dans le passé", ajoute le parquet. Ni les analyses ADN, ni l'expertise de la voix du "corbeau" qui harcelait les parents et avait évoqué le crime dans un appel téléphonique n'ont en revanche permis de faire avancer le dossier. Bernard Laroche, un parent, avait été mis en examen pour le meurtre, puis libéré, en raison d'erreurs de procédure notamment. Il a été abattu par le père de l'enfant avant que la mère, Christine Villemin, soit elle-même poursuivie. La cour d'appel de Dijon l'a finalement innocentée en 1993.
La piste exploitée mercredi fera-t-elle éclater la vérité ? Le dossier a déjà été rouvert par deux fois, en 2000 et 2008, pour réaliser des analyses ADN de pièce du dossier, expertises qui se sont révélées infructueuses mais ont permis, à chaque fois, de relancer le délai de prescription.
Avec Reuters