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Le sulfureux parti DUP, dernier espoir de Theresa May pour une majorité au Parlement

Le Parti conservateur britannique de Theresa May a perdu sa majorité absolue au Parlement et dépend désormais des ultra-conservateurs du DUP, dont les dix élus permettraient d'atteindre les 326 sièges requis pour gouverner tant bien que mal.

Faute de grives, on mange des merles. Fragilisée après la perte de sa majorité absolue aux législatives anticipées, jeudi 8 juin, le Première ministre britannique Theresa May fait les yeux doux aux ultra-conservateurs pro-Brexit du Parti démocrate unioniste (DUP). Les dix élus du mouvement protestant nord-irlandais permettraient aux Tories (318 députés) d'atteindre les 326 sièges requis pour gouverner.

Parti anti-gay

Samedi, le bureau de la Première ministre allait jusqu’à avancer qu’un "schéma d’accord" avait été conclu, affirmation démentie depuis par le DUP, qui évoque plutôt des discussions positives. Theresa May doit rencontrer, mardi 13 juin, la dirigeante du DUP et ancienne Première ministre d’Irlande du Nord, Arlene Foster. La perspective d’une telle union fait l'objet de fortes critiques au Royaume-Uni, à cause du conservatisme social du parti nord-irlandais, farouchement opposé au mariage des homosexuels et à l'avortement.

Plusieurs centaines de personnes ont manifesté, samedi, près de Downing Street en scandant : "Raciste, sexiste, anti-gay, le DUP doit partir". Une pétition dénonçant une "tentative désespérée et choquante pour rester au pouvoir" a déjà recueilli plus de 725 000 signatures. Ruth Davidson, à la tête des conservateurs écossais, a réclamé des assurances en cas d'accord avec le DUP sur les droits de la communauté LGBT, elle qui a prévu de se marier prochainement avec sa compagne irlandaise. "Soyons clair : ce n'est pas parce que le DUP accepte de nous soutenir sur les questions économiques ou sécuritaires, que nous sommes d'accord avec tout leur programme", a souligné Michael Fallon, reconduit au ministère de la Défense.

Neutralité questionnée

Créé en 1971, le DUP est aujourd’hui le premier parti siégeant à l’Assemblée d’Irlande du Nord. Son fondateur, aujourd'hui décédé, le révérend Ian Paisley, prêchait contre l’homosexualité et soutenait les lois la pénalisant. Connu au Royaume-Uni sous le surnom de "Dr No", il s’est opposé à tout accord avec les catholiques et la mise en œuvre de l’accord du Vendredi saint, signé en 1998 pour mettre fin à trente ans de troubles politiques ayant fait des milliers de morts en Irlande du Nord. Le nom de Ian Paisley et de son parti restent depuis associés à cette période dans les mémoires britanniques, bien que le révérend ait par la suite accepté de partager le pouvoir avec ses ennemis républicains du Sinn Fein.

Un accord entre les conservateurs et le DUP poserait la question de la neutralité du gouvernement britannique en Irlande du Nord, une région toujours soumise à de fortes tensions vingt ans après la fin des "Troubles". Le Premier ministre irlandais, Enda Kenny, a fait part de sa "préoccupation" devant le projet d'accord. Il a prévenu Theresa May que "rien ne devait remettre en cause l'Accord du Vendredi saint".

Opposés au "hard Brexit"

Au-delà de son sulfureux passé, le DUP affiche une position claire en faveur du Brexit, alors que l'Irlande du Nord avait voté contre à 55,8 % lors du référendum de juin 2016. "Nous défendons un programme consistant à renforcer l'Union, à obtenir un bon accord pour l'Irlande du Nord dans le cadre de la sortie de l'UE", confiait Arlene Foster lundi. Opposée au "hard Brexit", qui signifierait en cas d’échec des négociations avec Bruxelles, la fin de la libre-circulation des capitaux, des personnes, des services et des marchandises, y compris avec l’Irlande, elle dit préférer une séparation en douceur.

"We will of course act in the National interest for the UK as whole and Northern Ireland in particular" says @DUPLeader #GE2017 pic.twitter.com/rD6VgiPBf7

— SophyRidge On Sunday (@RidgeOnSunday) 11 juin 2017

L'ancienne ministre de la Fonction publique, survivante d'un attentat à la bombe orchestré par l'IRA en 1988, est vue comme une femme dure, ayant grandi à l'époque des "Troubles". Elle a poursuivi la lancée politique social-conservatrice efficace entreprise par le DUP en 2008, après la démission de Ian Paisley.

Avec Reuters et AFP