Emmanuel Macron s'est rendu vendredi à Gao, dans le nord du Mali, pour investir pleinement son nouveau rôle de chef des armées. Retour sur dix jours d’une communication bien orchestrée pour endosser le rôle de chef des armées.
À midi, heure de Paris, l'avion du nouveau du président français s’est posé sur la base de Gao, au milieu du désert. Une visite au Mali pour passer les troupes françaises en revue et endosser son rôle de chef des armées. Car le nouveau président le sait, en matière de lutte contre le terrorisme et de conflits internationaux, il a tout à prouver. "Son parcours dans la finance, l’économie ou la philosophie l’a tenu loin des affaires militaires, explique Jean-Dominique Merchet, journaliste de L’Opinion, spécialiste des questions militaires, à France 24. On ne peut pas lui en faire le reproche. L’armée est un univers qu’il ne connaît pas mais qu’il va découvrir par le sommet."
Dès son investiture, dimanche 14 mai, Emmanuel Macron, soucieux de pallier cette lacune, a multiplié les signes pour montrer qu’il accorde une importance prioritaire aux questions de défense et de sécurité. Il est d’abord entré à l’Élysée d’un pas lent, cadencé, rappelant le pas militaire, le regard tourné vers les chefs d’état-major. Dans son discours d’investiture, il a affiché sa volonté de faire de la France "un pays où l’on peut vivre sans avoir peur, où nos armées seront réconfortées".
Le président @EmmanuelMacron et son homologue malien Ibrahim Boubacar Keïta ont tenu un point de presse à Gao https://t.co/loq70PrpcD
— Élysée (@Elysee) 19 mai 2017Plus tard dans la journée, il a passé ses troupes en revue dans les jardins de l’Élysée avant de remonter les Champs-Élysées - fait inédit - à bord d’un command car de l’armée pour ranimer la flamme du Soldat inconnu. À l'avant du véhicule, un drapeau tricolore floqué du symbole du chef des armées pavoisait au son d’une marche militaire. Dans la même après-midi et malgré un programme chargé, il a trouvé le temps de se rendre au chevet de soldats blessés en Afghanistan et au Mali à l’hôpital militaire de Percy, à Clamart.
Pour le moment, Macron "s’installe dans sa fonction"
Ce même jour, il n'a pas oublié non plus les forces de l’ordre. En redescendant l'avenue des Champs-Élysées, le chef d’État fraîchement investi a marqué une pause en lieu et place où le policier Xavier Jugelé est tombé sous les balles d'une attaque terroriste, le 20 mai, durant l’entre-deux-tours de l'élection présidentielle.
Trois jours après son investiture, il n'a pas choisi un ministre de la Défense mais un ministre des "Armées". Une nuance qui replace la dimension militaire au premier rang. Rien d’étonnant donc à ce que son deuxième déplacement à l’étranger, après Berlin, soit consacré aux forces militaires françaises de l’opération Barkhane au Mali.
Enfin, législatives obligent : "Macron sait que l’ordre, l’autorité, la chose militaire sont des notions chéries par la droite, suggère Yves Thréard dans son édito diffusé lundi 15 mai 2017 sur Europe 1. À un mois des législatives, son intention était incontestablement de séduire un électorat de droite qui doute peut-être de ses capacités à relever les défis sur ces terrains-là."
Reste à savoir si toute cette communication suffira à montrer que Macron a la carrure d’un chef de guerre. "Pour l’instant, il s’installe dans sa fonction de chef des armées, considère Jean-Dominique Merchet. Il endossera véritablement le statut lorsqu’il sera dans l’obligation de prendre une décision et d’engager la force."
Le "cap" Macron
Ce qui est sûr, poursuit le spécialiste, "c’est qu’Emmanuel Macron fait entrer la France dans une nouvelle ère de dirigeants : à leurs investitures respectives, Nicolas Sarkozy et François Hollande incarnaient la nouvelle génération d’hommes qui n’avaient pas connu la guerre. Emmanuel Macron appartient lui à une nouvelle génération qui n’a pas connu le service militaire, on a passé un cap."
En tout cas, le chroniqueur militaire l’assure, le jeune âge d’Emmanuel Macron n’est pas un obstacle. Bien au contraire : "La guerre est une affaire de jeunes, les militaires qui combattent sur des zones conflits sont aussi jeunes que lui."