Accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, Charles Taylor s'est présenté, pour la première fois mardi, à la barre du Tribunal spécial pour la Sierra Leone. L'ex-numéro un libérien aura six à huit semaines pour se défendre.
Charles Taylor témoigne aujourd’hui devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), délocalisé à La Haye, aux Pays-Bas, pour raisons de sécurité. L’ancien président du Liberia est en effet le premier témoin appelé à la barre par la défense. Sa première et peut-être sa dernière chance de donner sa version des faits.
L’ex-homme fort de Monrovia plaide non coupable des 11 chefs d’accusation dont il fait l’objet, notamment meurtre, viol, esclavage sexuel et enrôlement d'enfants-soldats. Depuis 2008, il est jugé pour son rôle dans la guerre civile en Sierra Leone qui a fait 120 000 morts et des milliers de mutilés entre 1991 et 2001. Premier chef d’Etat africain à être jugé par un tribunal international, Charles Taylor dispose de six à huit semaines pour se défendre.
A la barre, l’ancien dirigeant libérien a qualifié de "mensonges" les accusations portées contre lui. "Il est très très très malheureux que la désinformation, les mensonges et les rumeurs de l'accusation m'associent" à l'image d'un meurtrier et d'un violeur. Et d’ajouter : "Je me suis battu toute ma vie pour faire ce que je pensais être juste et dans l’intérêt de la justice."
Armes contre diamants
La ligne suivie par ses défenseurs est simple : Charles Taylor tentait d’encourager la paix et non de fomenter une guerre civile en Sierra Leone. L’un des avocats du dictateur, Courtenay Griffiths, a ainsi déclaré aux juges, lundi, qu'il ne contestait pas "la réalité des terribles atrocités commises en Sierra Leone" mais qu'il s'agissait d'établir "qui en porte la plus grande responsabilité, ayant en l'esprit que Taylor a tenté d'aboutir à la paix".
L'ancien chef de l'Etat a également nié avoir reçu des diamants en échange d’armes des rebelles sierra-léonais. Selon l’accusation, il aurait financé le Front révolutionnaire uni (RUF), un groupe de rebelles à l’origine du conflit en Sierra Leone. Charles Taylor leur aurait fourni des armes dans les années 1990, en échange de diamants, principale richesse du Liberia. "Il n'y a pas un seul être humain qui pourrait croire qu'il est vrai que j'ai fait des affaires avec le RUF, recevant des diamants en échange d'armes ou recevant des diamants en échange de quoi que ce soit", a affirmé l’accusé.
Charles Taylor est le premier des 249 témoins que la défense a décidé de faire comparaître. Son témoignage devrait durer plusieurs semaines. L'accusation a, elle, convoqué 91 témoins dont beaucoup ont fourni des descriptions de scènes horribles - amputations, meurtres d'enfants et actes de cannibalisme en Sierra Leone. Le jugement ne sera pas rendu avant mi-2010.